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Aïcha

Aïcha

Titel: Aïcha
Autoren: Marek Halter
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l’Envoyé. Le Tout-Puissant prévoit tout. Alors qu’elle était très jeune, Il accorda à Aïcha Mère des Croyants un don qui rendit sa mémoire incomparable.
    Lorsqu’elle me sentit près d’elle, Mère Aïcha caressa tendrement mon bras. Elle me dit :
    — Zama’a, ma fille, ne t’attriste pas de mon état. Allah me prépare pour Son jugement. Mais j’ai encore à dire et je n’y vois plus. Prends le calame. Tu es la seule qui puisse mettre une main où le Seigneur a voulu que je mette la mienne. Prends le calame et écris. Je te donne les mots, compose les phrases.
    J’obéis.
     
    Comme la chaleur était très grande, Mère Aïcha se reposait le jour et me dictait la nuit. Pour elle, l’ombre et la lumière de notre monde ne comptaient plus.
    Au premier jour du mois très saint de muharram, anniversaire de l’arrivée des Musulmans dans Madina, Mère Aïcha devint silencieuse. Elle ne respirait plus que par saccades et ne pouvait plus dicter.
    Le deuxième jour, un peu de souffle lui revint. Elle me dit :
    — Zama’a, ma fille, place-toi derrière moi, que je pose ma tête contre ta poitrine, comme j’ai pris la tête de mon époux au jour de sa mort.
    J’obéis en pleurant.
    Au soir, la bien-aimée du Prophète voulut de nouveau me dicter ses souvenirs. Le souffle lui manquait, elle devait s’interrompre souvent. Elle me répéta :
    — Je te donne les mots, fais les phrases.
     
    À l’aube du troisième jour de muharram, elle se tut.
    Je la gardai tout contre moi, comme elle me l’avait demandé. Je baignai son visage d’eau et respirai son odeur suave en pleurant en silence.
    Je disais :
    — Ô ma mère, ô ma mère, ne t’éloigne pas !
    Je savais qu’elle était encore vivante, car elle me répondait en serrant mon poignet.
     
    Au midi du troisième jour de muharram, la Mère des Croyants Omm Salama se fit porter dans la chambre de la mourante pour prier devant elle.
    Cela jusqu’au soir. Quand, l’appel du muezzin résonna contre nos murs, la main de Mère Aïcha serra la mienne. Elle murmura :
    — Bilâl appelle à la prière !
    Puis :
    — Ô, Omm Salama, te voilà ! Ma soeur dans l’amour de notre époux, je te vois sans mes yeux.
    Puis encore :
    — Omm Salama ! Achève ce qui n’est pas achevé avec ma fille Zama’a !
    Puis, après un moment de silence, nous entendîmes dans sa gorge :
    — Tu mourras et eux aussi ils mourront [33] .
    Mère Aïcha s’éteignit avant la fin de la prière du soir.
    Elle resta dans mes bras jusqu’à l’aube et tout du long son odeur suave m’enivra.
     
    Elle avait demandé que, sur sa tombe, l’on prononce les mêmes paroles que le Prophète avait prononcées sur la tombe de Khadija bint Khowaylid, son épouse de la révélation :
    … Par l’aube.
    Par la nuit sereine.
    Ton Rabb ne t’abandonne ni te déteste.
    La vie future te sera plus belle que celle de nos jours.
    Ton Rabb, bientôt, te fera le don nécessaire [34] .
     
    Le quinzième jour du mois de muharram, la Mère des Croyants Omm Salama demanda à lire les rouleaux écrits par la défunte. Après avoir pris conseil auprès d’Allah, je les lui donnai.
    Le vingtième jour, elle me dit :
    — Zama’a, ma fille, obéissons à la défunte. Prends ton calame, ton rouleau et ton encre, et viens écouter la vieille que je suis. Le tourment d’Aïcha, celle qui fut la bien-aimée de notre époux Muhammad, je le connais.
    Je m’agenouillai dans sa chambre fraîche, comme elle me le demandait. Elle me dit :
    — Écris.
    Et j’écrivis sous sa dictée.

2.
    Voici ce qu’il en est de la mort de notre époux, le Prophète Muhammad.
    Je peux le raconter, car ce sont des choses que j’ai vues de mes yeux et entendues de mes oreilles, moi, Omm Salama.
    Le Tout-Puissant jugera si je mens.
     
    Le treizième jour du mois de rabî’a, notre époux, mourant, se sentit un peu mieux. Il s’adossa aux coussins de la couche d’Aïcha. De là, il entendait tout ce qu’il se passait dans la mosquée. Il s’en montra content. Nous, ses épouses, lui apportâmes de l’eau, du lait et tout ce dont il pouvait avoir besoin. C’était très peu.
    Nous nous reposions à tour de rôle, car cela faisait presque un mois que notre époux était malade. La seule qui ne le quittait pas un instant, c’était Aïcha. Dans mon souvenir, je ne la vois pas dormir de tout ce temps.
    Ce jour-là, l’Envoyé entendit la prière dirigée par Abu Bakr.
    — Oh, dit-il,
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