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Titus

Titus

Titel: Titus
Autoren: Max Gallo
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sommes assis dans la cour intérieure, au bord de la fontaine.
    — On a torturé de mille façons ceux qui avaient été faits prisonniers, a poursuivi Ben Zacchari. On les a mutilés, brûlés. On a exigé d’eux qu’ils reconnaissent l’empereur pour maître. Pas un d’entre eux n’a desserré les lèvres.
    Il a pris son front dans ses mains.
    — Folie, fidélité, force de caractère : chacun choisit l’explication qu’il veut, mais ils ont préféré la mort en silence. Leurs corps paraissaient insensibles, et certains souriaient comme si la joie les habitait. Serenus, j’ai remercié Dieu d’avoir évité à Léda ces souffrances.
    Il s’est encore tassé, cachant son visage derrière ses paumes.
    — Les enfants, a-t-il murmuré, même les enfants ont été soumis à la torture, et aucun d’eux n’a voulu appeler « maître » l’empereur. La force de leur volonté, celle de leur foi l’emportaient sur la faiblesse de leur corps.
    Il s’est redressé.
    — Qui a trahi son peuple, sa foi ? Ces hommes, ces enfants, ces femmes étaient-ils fous, ou bien moi, nous qui nous sommes inclinés devant César, sommes-nous les renégats, les apostats, les vrais traîtres ?
    — À Massada…, ai-je commencé.
    Il m’a arrêté en secouant la tête. Il savait.
    — Dieu, notre Loi condamnent le suicide, a-t-il murmuré. Mais cette mort choisie pour éviter de livrer son corps à l’ennemi, de risquer de lui donner son âme afin de fuir la souffrance, est un acte de liberté. L’âme regagne ainsi son séjour natal, elle participe de la force des bienheureux, d’une puissance libre de toute entrave, elle demeure vivante et, comme Dieu lui-même, invisible au regard humain.
    J’ai mesuré la force de la tentation qu’il exprimait.
    Depuis la mort de Léda, Ben Zacchari devait songer à chaque instant à en finir avec la vie, à se débarrasser de ce poids de chair et de désespoir, afin de trouver le repos.
    — Pourquoi craindre la mort, a-t-il encore murmuré, n’est-il pas insensé de rechercher la liberté dans la vie ici-bas et de refuser celle qui est éternelle ?
    Je me suis tu longuement. Je n’avais rien à répondre. J’avais moi aussi connu cette tentation-là.
    — Ces deux femmes, ces cinq enfants, ai-je enfin repris, ces survivants de Massada que Dieu a choisi d’épargner, de conduire jusqu’à toi, qui va s’occuper d’eux, leur transmettre la foi de leur peuple, ta foi, Ben Zacchari ?
    Il m’a regardé quelques instants, puis a commencé à marcher autour de la fontaine, les mains dans le dos, comme liées, pareilles à celles d’un prisonnier, mais la tête levée vers le ciel.

 
     
43
    Comme Ben Zacchari, j’ai regardé le ciel et tenté ainsi d’échapper à cette terre gorgée de sang.
    J’avais quitté Alexandrie avec Anan et chevauché sur la piste qui, à travers le désert de Judée, puis le long du rivage, conduit au port de Césarée. Pas un village ou une ville qui n’eût été un lieu de souffrance.
    À Héliopolis, j’ai vu les soldats que commandait Lupus, gouverneur d’Égypte, briser les portes du temple juif et commencer à le piller.
    J’ai posé la main sur l’épaule d’Anan, dont je comprenais et partageais la douleur.
    Un centurion s’est approché de nous, a appuyé la pointe de son glaive sur la poitrine d’Anan, et j’ai dû hurler avec ma voix de commandement que cet homme était à moi, que celui qui l’offenserait ou le blesserait en répondrait devant les tribunaux de l’empereur.
    Des soldats nous ont entourés, puis les tribuns et Lupus se sont avancés vers nous.
    Lupus, qui m’avait reçu dans son palais d’Alexandrie, m’a reconnu, a écarté les soldats, s’est étonné de ma présence, et quand je lui ai expliqué que je me rendais à Césarée afin de m’y embarquer pour l’Italie, il a ricané.
    J’avais l’esprit aussi tortueux que celui d’un Juif ! Comment pouvais-je ignorer que, chaque jour, plusieurs galères et voiliers quittaient le port d’Alexandrie pour ceux d’Ostie ou de Puteoli ? Il suffisait de six jours, si les vents étaient favorables, pour gagner l’Italie. Il n’y avait pas en Méditerranée de port mieux situé que celui de la deuxième ville de l’Empire. On venait de toutes les provinces d’Asie et d’Afrique, et même de Grèce, pour s’y embarquer.
    — Et toi, Serenus, toi qui as déjà fait ce voyage, tu traverses le désert en compagnie d’un Juif pour te
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