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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur
Autoren: Gary Jennings
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milieu
d’une telle attaque éclair, d’expliquer tout cela à Daila, à quoi cela
aurait-il servi ? J’avais fait des pieds et des mains pour faire croire à
Daila qu’il y avait effectivement une servante khazar avec nous. Cette erreur
coupable, plus encore que lui, c’est moi qui l’avais commise. Une fois encore,
tout était ma faute.
    Dans la carruca, je trouvai Amalamena ainsi que je
l’avais redouté, mais hélas je m’y attendais. À l’intérieur n’était allumée
qu’une simple bougie, et sa faible lueur ne pouvait être suffisante pour que la
sentinelle ait pu distinguer qui était réellement la « servante
khazar ». Mais il avait eu assez de lumière pour la tuer d’un coup d’épée
bien planté… dans sa pâle poitrine de jeune fille, juste en dessous de
l’endroit où pendait la fiole du lait de la Vierge. Il ne coulait pas beaucoup
de sang de l’étroite blessure ; ma sœur bien-aimée n’en avait plus guère à
répandre.
    À tout prendre, me dis-je, cela avait été une mort plus
rapide, plus propre que celle que les deux médecins lui avaient prévue. Et elle
était morte avec dignité, sans avoir à lutter pour conserver une dernière
étincelle de vie, ni à implorer un sursis contre son inéluctable et terrible
affaiblissement. Elle avait été heureuse tout le jour, insouciante, et la mort
l’avait cueillie ainsi. On distinguait encore l’ombre d’une fossette sur son
visage, et ses yeux ouverts, bien qu’ayant perdu leur brillance, avaient encore
la charmante couleur des feux de Saint-Elme.
    Je refermai doucement ses paupières ivoirines sur les globes
bleutés, et avec la même douceur, déposai un baiser sur ses lèvres d’un rose
perle ; elles étaient encore chaudes. Puis, dans un lourd soupir, je fis
demi-tour afin de rejoindre mes compagnons pour ce qui ne pouvait être, à très
brève échéance, que leur mort à eux aussi. Même d’assez loin, je pouvais
entendre le fracas métallique du combat, mais je savais qu’il ne durerait plus
très longtemps. Notre ennemi, vraisemblablement Théodoric Strabo, ayant échoué
à récupérer le document par la ruse, entendait à présent clairement s’en saisir
par la force, et il avait engagé pour cela suffisamment de troupes pour tous
nous anéantir. Je soupirai de nouveau : pas plus tard que ce matin, j’avais
utilisé pour la première fois mon épée au serpent torsadé ; j’allais à
présent la brandir pour la dernière fois. Et les hommes de Strabo, bien
qu’étant de détestables renégats, n’en étaient pas moins des Ostrogoths. Mon
épée n’aurait donc jamais goûté un autre sang que celui de mes compatriotes.
    Mais je m’arrêtai soudain. Je n’avais pas peur de mourir, et
cette idée ne m’inspirait aucune répulsion ; c’était pour un guerrier une
fin prévisible et somme toute honorable. Cependant, ma mort serait un regrettable
gâchis, si je pouvais être d’une plus grande utilité pour mon roi en gardant la
vie. Daila m’avait demandé de mettre Amalamena en sûreté, de peur que si elle
venait à survivre à cette rixe, elle ne devînt l’otage de Strabo. Et si
celui-ci en disposait comme d’une rançon, il pouvait espérer exiger du roi
Théodoric n’importe quelle concession, y compris l’abandon de tout ce que le pactum de Zénon venait de lui accorder. Certes, Strabo ne pouvait plus, désormais,
utiliser la princesse à cette fin d’extorsion. Mais, supposition… Et s’il
croyait qu’il l’avait bel et bien capturée ? Une princesse de
substitution – captive certes, mais parmi les rangs les plus élevés de
l’ennemi, au cœur de sa puissance la plus secrète – ne pourrait-elle s’avérer
un guerrier plus efficace que toutes les armées de l’extérieur ?
    En toute hâte, j’ôtai mon armure, mes bottes et tout le
reste de mon équipement, et les jetai parmi les broussailles de l’obscurité, à
l’arrière de la voiture. Je fus sur le point de me débarrasser également de ma
précieuse épée-serpent, puis j’eus une meilleure idée. Je l’ôtai de sa ceinture
et de son étui, mais lui offris un nouveau bain de sang, quoique factice et
pathétique à la fois. Je plaçai avec grand soin sa pointe à l’entrée de la
blessure qu’avait forée la sentinelle dans la poitrine d’Amalamena, prononçai à
l’intention de cette dernière quelques pieux mots d’adieu, enfonçai l’épée
aussi profond que la fois précédente et la laissai en place,
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