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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur
Autoren: Gary Jennings
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son
propre roi, sa nation et ses compatriotes ?
    Daila répondit d’un ton sarcastique :
    — Nous l’avons interrogé, et comme vous pouvez le voir,
nous n’y avons pas mis les formes. Il a finalement avoué qu’il était tombé
amoureux de l’une des jeunes filles khazars, dans la maison d’hôtes de
Constantinople. C’est elle qui l’a poussé à cette trahison.
    Raison de plus, pensai-je, pour partager la responsabilité
avec lui, car c’est moi qui avais demandé à mes deux archers de loger à
l’intérieur, là-bas, au lieu de dormir dans la cour avec leurs compagnons.
    — J’ai été d’une navrante insouciance, soupirai-je.
    Daila ne put s’empêcher de grommeler un énergique :
«  Jawaíla ! » [150]
    — Je me suis naturellement douté que les servantes du xenodokheíon devaient toutes être des espionnes. Mais il ne m’est jamais venu à l’esprit
qu’elles parviendraient à persuader un de mes hommes de me trahir.
    — Tout ça pour une cause aussi sordide…, grogna l’ optio. Cette piètre et dérisoire chose : l’amour ! L’amour, qui plus
est, pour un instrument de maison d’hôtes, ayant déjà servi à un nombre
incalculable d’invités. Il n’aura certes pas droit à la mort d’un guerrier.
    Daila marcha sur l’homme effondré et gratifia sa tête déjà
branlante d’une série d’allers-retours supplémentaires.
    — Relève-toi, misérable nullité ! Debout, qu’on
puisse te pendre !
    — Il le mérite, c’est sûr, fis-je. Mais évitons de nous
donner en spectacle aux locaux, et d’exciter leur curiosité quant aux
dissensions dans nos rangs. Ne, Optio. Liquidons-le sur-le-champ, et chargeons-le
sur une de nos bêtes telle une vulgaire marchandise. Nous nous débarrasserons
ensuite de son cadavre quelque part dans le désert le long de la route.
    Daila regimba quelque peu, mais finit par convenir :
    —  Ja, vous avez raison.
    Il porta la main à son épée.
    — Vous voulez le faire, Saio Thorn, ou je m’en
charge ?
    — Un instant, tempérai-je, soudain taraudé d’une
inquiétante pensée.
    Et je l’attirai à nouveau de côté.
    — Se pourrait-il que l’archer ait informé sa soupirante
de l’existence de notre messagère anticipée ?
    — Il ne l’aurait pas pu. Ni lui, ni aucun autre homme
de la troupe. Excepté vous et moi, qui étions les seuls à savoir. Lorsque j’ai
escorté la jeune fille jusqu’à la porte de la ville, j’étais seul. Il ne pourra
dire à personne, non plus, que nous transportons un pactum contrefait.
    Le fait que Daila m’ait implicitement qualifié d’homme me
rendit un peu confiance, et je m’enhardis à demander :
    — Et lors de sa confession, a-t-il parlé de… quelque
chose d’autre ?
    L ’optio haussa les épaules.
    — Pour le reste, il délirait. Je crains de l’avoir
secoué un peu fort, et un peu trop longtemps.
    Comme si cette remarque l’avait réveillé, le prisonnier à
demi inanimé remua et releva la tête. Il nous regarda, Daila et moi, du seul
œil qu’il pouvait encore ouvrir, et cet œil rouge et malveillant se fixa sur
moi. Lorsque l’archer parla, il projeta un nuage de sang, et son discours fut
brouillé par ses dents cassées et ses lèvres déchirées.
    — Vous… vous n’êtes pas… pas maréchal… ni guerrier… pas
Thorn.
    Il toussa, déglutit et tenta de poursuivre :
    — Il n’y a pas d’homme du nom de Thorn.
    — Vous voyez ? fit Daila. Du délire.
    — Pas de Thorn… et la princesse n’a pas de serv…
    Sa confession cessa abruptement, car d’un seul et même
mouvement, j’avais dégainé mon épée, marché sur lui et tranché sa gorge.
    — Maintenant, faites-le disparaître, dis-je aux deux
hommes qui tenaient encore son corps debout. Roulez-le dans une couverture, et
jetez-le sur une selle de bât.
    J’avais fini par faire usage de ma lame-serpent toute neuve.
Mais je n’avais pas de quoi en être fier, sa première victime ayant été l’un de
mes compatriotes ostrogoths. Et ce n’est pas tant pour le punir de sa trahison
que je l’avais tué, mais pour l’empêcher de divulguer mon secret… Cette révélation
aurait constitué, aux yeux de ses camarades comme des miens, quelque chose
d’encore bien plus horrible que sa propre traîtrise. Mais je ne l’avais pas
supprimé pour cette seule raison. Mon geste avait aussi pour but immédiat de
permettre à Veleda de continuer à prendre soin de la princesse souffrante, et
le
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