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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur
Autoren: Gary Jennings
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sentirai sans doute encore mieux.
    Tout en me rapprochant de notre camp, je songeais que les
joyeux feux de cuisson, brillant de leur chaleureuse lumière le long des
falaises, donnaient à notre campement l’aspect d’une pièce immense et dépourvue
de toit, mais douillette et reposante, posée telle une île dans la nuit noire.
Les hommes qui n’étaient pas de surveillance faisaient déjà la queue près des
feux de camp, et les aides du coquus avaient commencé de les servir,
mais ils me laissèrent bien sûr passer. L’un des serveurs me donna une pleine
outre de vin, et j’accrochai sa courroie à mon épaule. Un autre me tendit deux
bols de bois, et le coquus était en train de les remplir à la louche
d’un ragoût à l’aspect fort appétissant quand nous sursautâmes tous à un cri
strident surgi de l’obscurité, au-dessus de la route :
    —  Hiri Anaslaúhts !
    La sentinelle postée là-bas nous mettait frénétiquement en
garde :
    — Attention ! Une attaque surprise !
    Il n’eut le temps que d’ajouter un seul autre mot, avant de
se faire abattre :
    —  Thusundi ! [153]
    Ils n’étaient pas un millier. Mais le bruit de tonnerre de
leurs sabots résonnant sur le rude revêtement de la route ne pouvait
tromper : ils étaient bien plus nombreux que nous. L’instant d’après, ils
nous tombèrent dessus, de partout, à peine visibles à la lueur des feux.
J’entrevis fugitivement des cavaliers en armes, portant l’armure des Goths et
des casques semblables aux nôtres, avant qu’ils ne piétinent nos brasiers, les
réduisant à des cendres volantes et des étincelles éparses, emportées au vent.
Mais les assaillants ne brandissaient pas leurs armes ; ce premier assaut
semblait uniquement conçu pour nous terroriser et neutraliser nos feux, car les
chevaux firent demi-tour. En repartant, nos agresseurs coupèrent les piquets
qui retenaient nos bêtes et les éparpillèrent, afin de nous en priver.
    Tous, moi compris, avaient à l’instant laissé tomber leur
nourriture et leurs ustensiles pour dégainer précipitamment leurs épées. Tandis
que tous les autres se précipitaient vers l’endroit où ils avaient laissé leurs
armes les plus lourdes, je temporisai un instant, indécis quant au meilleur
endroit où aller me poster. Quand brusquement, l’ optio Daila surgit à
mon côté et aboya :
    — Filez ! Prenez la princesse, et…
    — Quelqu’un veille sur elle, Daila.
    — Plus maintenant. Cette sentinelle avait des ordres,
au cas où nous serions attaqués. Tuer l’autre traîtresse, puis nous rejoindre.
Le voilà qui arrive en courant. Allez-y, et…
    — Tuer qui ? fis-je en écho, perplexe. Quelle
autre traîtresse ?
    — Enfin, c’est évident. Elle savait que nous avions
choisi cette route. Elle a dû les en avertir, je ne sais comment… Cette
servante khazar !
    Je gémis alors faiblement :
    —  Akh, Daila, Daila… Quelle mauvaise idée…
    — Vous m’entendez ? Filez ! Si la princesse
est capturée, elle sera leur otage. Conduisez-la jusqu’à la rivière. Essayez de
l’emmener vers l’aval, loin de cette…
    Mais une nouvelle vague d’assaut l’interrompit, et cette
fois les épées tournoyaient furieusement, tout comme les haches de guerre et
les masses d’armes hérissées de pointes. Daila brandit son bouclier pour parer
le coup de hache d’un cavalier, lequel m’aurait très certainement assommé, car
j’étais demeuré sur place sonné et paralysé, jusqu’à ce que ce bruit du métal
lourd s’écrasant contre le cuir me secouât de mon ahurissement. Je frappai
l’ennemi d’une volte de mon épée, et m’escamotai ainsi que l’avait ordonné
Daila.
    J’avais du mal à courir, le cœur alourdi comme si une pierre
tombale pesait sur ma poitrine, mais je courais. Ce faisant, je me disais que
Daila pouvait difficilement être tenu responsable de sa funeste supposition.
Après tout, une servante khazar avait bel et bien tenté de perturber nos
plans ; alors pourquoi pas une autre ? Bien sûr, il était tout
simplement très probable que l’ennemi désireux de nous voler le pactum, quel
qu’il fût, voyant que le traître recruté parmi les nôtres n’avait pas réussi à
le leur transmettre, en ait déduit que nous l’avions arrêté… et qu’avertis de
la présence de l’ennemi, nous allions quitter Pautalia par une autre route que
celle initialement prévue. Mais quand bien même il eût été possible, au
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