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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable
Autoren: Michel de Decker
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prière et les cours que vous irez entendre à la Sorbonne ! Aucune flânerie n’étant autorisée sur le chemin de l’université, qu’on se le dise !
    On a pourtant vu qu’après avoir croisé le joli minois de Julienne la dentellière, Talleyrand avait été habile à se ménager certaines libertés dans le règlement imposé par les ecclésiastiques.
    Et ce n’était qu’un début ! Car si la brodeuse était parvenue à se glisser secrètement dans l’enceinte du séminaire, Dorothée, elle, fit son entrée par la grande porte, à savoir tout simplement celle de l’église de Saint-Sulpice.
    Bien qu’elle fût une actrice de la Comédie-Française, Dorothée Luzy (Dorinville pour l’état civil) était extrêmement croyante et pratiquante. Sans doute convenait-il qu’elle rachetât sur un prie-Dieu le péché de chair qu’elle était amenée à commettre fréquemment mais à regret. Car c’était fatal, c’était le métier qui voulait cela ! On n’était pas impunément soubrette sur les plus belles planches de Paris ! Il fallait payer de sa personne !
    La Luzy vivait au 6 de la rue Férou dans un hôtel que lui avait trouvé son protecteur et amant, un receveur général qui répondait au nom de Landry. Or, la rue Férou se trouvait à deux pas de Saint-Sulpice, où elle avait donc pris l’habitude de venir se repentir chaque matin.
    Vraiment se repentir ?
    Peut-être se contentait-elle simplement d’implorer l’indulgence du Très-Haut à la façon de cette autre comédienne, Augustine Brohan, qui fera longtemps, elle, les belles nuits d’Alfred de Musset et qui, chaque soir, au moment de se mettre au lit, invoquait la mère de Dieu en ces termes :
    — Ô Marie, conçue sans péché, faites que je pèche sans concevoir.
    Il n’empêche que Dorothée était assidue à l’office.
    Et que Charles Maurice, qui n’y assistait généralement que du bout des yeux, ne put être sans la remarquer. Parce qu’elle était mignonne et qu’elle ressemblait à « une jeune personne très pure ».
    — C’est vrai, elle avait un air simple et modeste, ajoute-t-il.
    Dans ces conditions, un jour, n’y tenant plus, juste avant que l’officiant ne lance son ite missa est , il se décide. Il se glisse vers le porche. C’est là qu’il l’attendra, c’est là qu’il s’extasiera sur sa beauté et qu’il lui proposera de faire quelques pas avec elle. Pourvu seulement qu’elle ne marche pas à trop grandes enjambées !
    La voilà !
    Et dehors l’orage vient d’éclater et la pluie cliquette sur le parvis.
    « Un petit coin de parapluie contre un coin de paradis... »
    Or, Charles Maurice dispose précisément de ce petit parapluie qu’il utilise souvent telle une canne.
    L’orage, oui, et avec quel coup de foudre ! Car Dorothée ne refuse pas de se laisser abriter par ce jeune homme qui vient de l’aborder, de même qu’elle ne refuse pas de le laisser entrer chez elle alors que le parapluie n’y est plus vraiment de mise.
    Elle a un peu plus de vingt-quatre ans, la petite Dorinville, tandis que Charles Maurice en compte à peine dix-huit, mais qu’importe ! Au contraire, même ! Il ne sait que si peu de choses de la tendresse d’une mère, il a tant besoin de douceur et d’affection.
    — Il était nostalgique de caresses, dira, fort joliment, une de ses nombreuses admiratrices de passage.
    — C’est vrai, reconnaît le jeune séminariste ébloui, elle me permit de monter chez elle, et sans embarras elle me proposa d’y revenir. J’y fus d’abord tous les trois ou quatre jours, ensuite plus souvent.
    Ce qui veut donc dire qu’il méprisait complètement le règlement intérieur de la maison que dirigeait alors le père Bourachot. Mais la main de Bourachot était molle. Quand on songe, par exemple, que la bibliothèque dans laquelle se plongeait Talleyrand à chaque récréation débordait d’ouvrages révolutionnaires !
    — Oui, je me nourrissais de l’histoire des révoltes, des séditions et des bouleversements de tous les pays.
    Bourachot était laxiste. Il n’avait pas suivi les conseils de son prédécesseur, Jean Cousturier qui, avant d’être inhumé dans la crypte de la chapelle en 1770, avait tenu, lui, à mettre en garde le clergé de France. Et avec un sens étonnant de la prémonition !
    — Il faudra vous attendre à voir le trône renversé et l’Église persécutée, avait-il confié à ses collaborateurs sur son lit d’agonie. Je ne
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