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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable
Autoren: Michel de Decker
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bon prix au baron James de Rothschild. Et même si elle eut pu en espérer davantage, elle avait préféré tenir que courir.
    — C’est du moins un acquéreur très solvable et qui paie comptant, c’est à considérer.
    Il est vrai qu’elle avait été à bonne école.
    Charles Maurice allait devoir attendre vingt-quatre ans pour la retrouver au paradis, attendre jusqu’au 19 septembre de 1862, jour où elle ferma définitivement ses délicieux yeux bleu-noir.
    Qu’aperçoit-il encore maintenant qu’il est installé au plus haut des cieux ?
    Pauline, qu’il avait aimée comme sa fille – et qui l’était probablement, comme on le sait. Elle se prépare à épouser Henri de Castellane et elle ne quittera la terre qu’en 1890.
    Charlotte, qu’il avait également élevée comme sa fille – et qui l’était sans doute aussi ! Il l’avait mariée à son neveu le baron Alexandre-Daniel de Talleyrand, le troisième fils de l’oncle Louis Marie Anne. Certes, pour l’instant, son époux n’était qu’un modeste préfet du Pas-de-Calais mais puisqu’il aimait sa femme...
    Et Charles avec qui il s’était malencontreusement fâché, hier, à Londres ? Ce fils qu’il avait eu avec la belle Adélaïde de Flahaut et qui était né au Louvre, dans le palais des rois, et qui lui avait donné cinq petites-filles après avoir épousé la belle Margaret Mercer Elphinstone ? Eh bien ! il allait devoir attendre jusqu’au 1 er septembre de 1870 pour le retrouver au royaume des ombres.
    Le 1 er septembre de 1870, c’est-à-dire trois jours avant la chute du Second Empire dans la cuvette de Sedan.
    Entre-temps, le 9 mars de 1865 précisément, le duc de Morny, fils de Flahaut et de la reine Hortense, l’avait déjà rejoint dans son monde meilleur.
     
    Deux ans plus tôt, le 13 août, il avait accueilli ce garçon génial qu’il avait fait un jour, accidentellement sans doute, à la pulpeuse femme de son prédécesseur aux relations extérieures : Eugène Delacroix.
    Et il pouvait être fier de lui.
    En 1824, il avait vivement recommandé à Sosthène de La Rochefoucauld, qui s’occupait des achats de l’État, de faire, pour 6 000 francs, l’acquisition d’une toile de ce peintre au romantisme fou. On avait un peu rechigné, il s’en souvenait, sous les lambris de la culture du temps, car ce tableau exposé au Salon avait provoqué un vrai scandale. Il figurait en effet les Scènes des massacres de Scio , et les cadavres s’y entassaient, verdâtres, comme de vrais cadavres et non comme des morts académiques.
     
    Kelly, qui était d’Inde, la vicomtesse de Laval, la duchesse de Luynes, la duchesse de Fitz-James, madame de la Châtre, la comtesse de Brionne, l’abbesse de Remiremont, la princesse de Carignan, la tendre Vaudémont, la rugueuse Germaine de Staël, la fidèle et borgne Tyszkiewicz, sans oublier Julienne Picot, jolie petite dentellière de la rue du Vieux-Colombier, Luzy, la danseuse affriolante, et toutes celles qui avaient un jour été sous son charme et séduites pas son suaviter in modo , il n’en manquait pas une. À l’annonce de son arrivée aux portes du paradis, elles s’étaient toutes précipitées en rang par deux.
    — Quelle grande et belle armée ! avait alors songé Napoléon qui les observait nerveusement dans sa lorgnette.
     
    Et puis vint le moment où l’évêque d’Autun défroqué dut se présenter devant le Tout-Puissant pour la terrible épreuve de la pesée de l’âme. Comment le Roi du ciel et de la terre allait-il réagir ? Il connaissait évidemment son curriculum vitae , il savait qu’il avait beaucoup boité de droite et de gauche – surtout de droite ! –, trop navigué en eaux troubles, trop souvent abordé à Cythère.
    Mais allons ! Charles Maurice n’avait-il pas manoeuvré une poignée d’empereurs, dupé plus de vingt rois, et roulé une centaine de ministres dans la farine ? Non, il n’était pas inquiet le moins du monde. Et d’ailleurs, en fin joueur de whist qu’il avait été, il savait que son jeu était bon et surtout qu’il disposait d’une carte qui pèserait lourd dans le bon plateau de la balance.
     
    Introduit dans la grande salle du trône du Père éternel, après la révérence d’usage, il prit aussitôt la parole.
    — Oui, dit-il, j’avoue que j’ai été capable de tout et même de faire le bien...
    Et aussitôt, dans la foulée – puisque devenu pur esprit il ne claudiquait plus
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