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Serge Fiori : s'enlever du chemin

Serge Fiori : s'enlever du chemin

Titel: Serge Fiori : s'enlever du chemin
Autoren: Louise Thériault
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avait l’influence d’un Ennio Morricone chez lui. Le musicien d’Harmonium, pour
sa part, croit plutôt que c’est son grand-père qui lui a instillé ces valeurs italiennes, liées à la musique romantique.
Lorsqu’il repense à son aïeul et qu’il se remémore l’intrigant paradoxe entre son côté mafieux et bandit, et son
goût prononcé pour le décorum, les parures et les soupers
officiels, Serge évoque la scène du mariage qui apparaît au
début du film Le parrain de Coppola   : alors que la cérémonie bat son plein, le parrain, de son côté, fait du business et
traficote dans son bureau   !
    L’enfance de Fiori, c’est la démesure italienne. Il l’a vrai
ment constaté en voyant la trilogie de Coppola et en s’imprégnant de la musique de Nino Rota, qui le rejoint profondément. Cette fascination va laisser des traces dans l’œuvre
de Serge Fiori. Au sein de sa musique se manifeste un côté
résolument nationaliste québécois. Il ressent de vifs sentiments d’appartenance, de fidélité et de loyauté à l’égard du
Québec   ; ces sentiments, ce sont ses racines italiennes qui
en sont responsables. La chose peut sembler contradictoire, mais pour Fiori, ça ne l’est pas   : il a peut-être choisi
le contexte québécois, mais il exécute le tout à l’italienne.
    Lorsqu’il repense à son grand-père, Serge comprend
immédiatement pourquoi il se sent sicilien dans l’âme, et
québécois sur le plan du cœur. Pourtant, bien qu’il admette
l’héritage italien de Giuseppe, Serge Fiori garde le souvenir
d’un homme aussi fascinant qu’inquiétant   : il se reconnaissait peut-être en son grand-père, mais jamais il ne parvint
à bien le cerner et à entretenir des rapports affectifs avec
lui. Giuseppe s’avérait un homme distant, toujours isolé du
reste de la famille   : dans sa demeure, quand la fête battait
son plein et que la famille festoyait bruyamment dans la
cuisine, lui demeurait au salon, installé devant des piles de
papiers et de licences – il avait la responsabilité de les attribuer, parfois un peu arbitrairement – et de liasses de billets
de banque attachées par des élastiques, magouillant au
téléphone, s’engueulant avec l’un ou l’autre de ses interlocuteurs. Puis, vers deux heures du matin, il enfilait son
manteau et disparaissait dans la nuit pour ne rentrer qu’au
petit matin. Pas étonnant que Le parrain ait tant marqué le
musicien.

    Chacun devient le premier homme
    Sorti d’une autre forme
    La terre lui fournit un visage
    La lune lui donne son langage
    Le
premier
ciel
     
    Revenons en arrière.
    Lorsque Giuseppe débarque à Montréal au début du siècle, il est loin de s’imaginer qu’il va engendrer une famille
de musiciens, encore moins que le nom de Fiori marquera l’histoire de la musique au Québec. Né dans un village
des Abruzzes, il n’a que dix-sept ans lorsqu’il arrive dans
la métropole. Certains membres de la famille croient que
Giuseppe aurait troqué Fioré, son nom original, pour celui
de Fiori, tant il est rare de trouver cette dénomination dans
la région des Abruzzes. Fiori serait plutôt un patronyme
répandu en Corse.
    Giuseppe se marie à Alida Giraldi (surnommée Ida),
elle-même d’origine italienne, mais née au Québec   ; son
épouse lui donne quatre enfants   : trois garçons et une fille.
Naissent ainsi tour à tour Émile, Frank, Palmira et Georges,
le père de Serge. La famille s’établit dans la Petite Italie et
tous les bébés sont baptisés à l’église Notre-Dame-de-la-Défense. Tous les membres de la famille, à l’exception de
Giuseppe, parlent couramment trois langues   : le français,
l’anglais et l’italien. De son côté, Giuseppe baragouine
tout juste le français et l’anglais, les mélange allègrement
et gardera un fort accent tout au long de sa vie. Incapable
de prononcer des mots aussi simples qu’Aspirine (casparina, dira-t-il), il s’impatientera régulièrement de n’être pas
compris.
    Giuseppe fixe, dans sa chambre, des affiches de Daniel
Johnson (le père) et de John Diefenbaker   ; il s’implique
aussi aux élections pour le compte de l’Union nationale,
dont il est l’un des organisateurs. Il gagne par ailleurs sa vie
en exécutant de menus boulots que, selon ses proches, il
conviendrait davantage de qualifier de petites magouilles.
Il prend en charge la fanfare du
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