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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville
Autoren: Robert Merle
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donner mon sentiment, pour infirme qu’il apparaisse, mais
véridiquement tel que je le conçus dans les jours et dans les nuits qui
suivirent mon retour à mes douces retraites paternelles, car je ne manquais pas
alors, sauvé du péril, à méditer continuement sur ce grand événement de la
Saint-Barthélémy auquel Dieu, ou dois-je dire la Fortune, avait voulu que je
fusse mêlé.
    Au début comme
au terme de ces rêveries, je jugeai qu’il y avait danger à opiner que la male
heure qui vous tombait sus était par le Seigneur voulue, voyant dans ce
pensement comme le commencement d’une molle résignation, alors qu’il faut, à ma
jugeote, parer la botte d’un adversaire avant de tenir la navrure qu’il vous
eût infligée comme une épreuve envoyée par le ciel. Si épreuve il y a, osais-je
m’apenser, surmontons-la avant qu’il nous en cuise plus outre.
    Après avoir si
souvent cogité sur ces points ambigueux, et alors, en mes vertes années, et à
l’heure où, barbon, j’écris ces lignes, je ne puis encore décider si c’est
Dieu, ou le sort, qui me voulut là où, sans le savoir, je n’avais rien à faire,
quérant à tous échos une grâce inutile. Mais d’une chose je me suis bien persuadé
et m’y tiendrai aussi ferme qu’arapède sur roche en dépit des vagues et des
houles. Ayant vu en cette haineuse Paris, dans toute étendue, les effets
détestables du zèle religieux, je me fis alors – à la face de ma propre
âme et sur mon salut même – le serment de ne permettre mie que le zèle de
mon Église me tirât jamais l’épée du fourreau, opinant que les disputes sur
telle ou telle forme du culte devaient être abandonnées aux clercs, et sans que
le couteau soit appelé à trancher, lequel couteau ne résout rien, comme
le Duc d’Anjou, assiégeant un an plus tard La Rochelle huguenote, osa l’écrire
« à son bien-aimé frère et souverain », celui-là même qui devant les
hommes et l’Histoire et j’ose dire aussi devant Dieu, porte la responsabilité
de la Saint-Barthélemy.
    Mon Quéribus
fit merveille auprès de la noblesse catholique du Sarladais, ayant assez du
seigneur d’oc en lui pour faire passer le muguet de cour, et jouant à plein en
ses courtois discours de l’amitié qu’il était bien connu que le Duc d’Anjou lui
portait, ce qui n’était pas, dans la réalité, sans quelque conséquence, Charles IX
étant sans enfant mâle et fort égrotant – de sorte que le Baron fut ouï
partout avec l’autorité qui s’attachait au quasi-favori du futur souverain, et
ne manqua pas de faire de ma propre faveur auprès de son maître un portrait si
flatté que vous eussiez cru que Son Altesse avait dépêché à l’aube du 24 août
une demi-enseigne au moins de ses mantelets rouges pour me protéger au logis
contre la fureur de la commune.
    Je remis de ma
personne à M. de la Porte la grâce du roi, laquelle, pour inutile qu’elle fût
devenue, donna quelque couleur au visage que mon Quéribus me voulait donner. En
bref, le Baron fit si bien et la balance de l’opinion pencha si fort à mon
avantage que même si la Dame de Fontenac n’avait pas retiré sa plainte, on
n’eût pas trouvé un seul juge au Présidial pour me condamner, le plus rebiqué
d’entre eux se contentant de répéter en catimini au sénéchal de Sarlat le mot
de Catherine de Médicis : Je vois bien que ce sont des chats, vos
huguenots, puisqu’ils retombent toujours sur leurs pieds.
    Monsieur, au
Louvre, ayant gracieusement donné son pourpoint à un de ses favoris, lequel
m’avait baillé le sien, Quéribus parti, en peu de temps, ce fut moi, en Sarlat,
qui fus réputé avoir reçu le pourpoint de Monsieur. Et vous ne sauriez croire
quel prodigieux reflet ce satin-là projeta sur ma personne, à telle enseigne
que tout le bon de mon caractère fut tout soudain porté aux nues et enfin
tirées de l’oubli (où ma décollation les aurait à jamais rejetées) les louables
actions de ma vie, à savoir la part que j’avais prise aux côtés de mon père à
la défaite du Baron-boucher de la Lendrevie, et le sauvetage, à la pointe de
mon épée, du malheureux Évêque de Nismes, sans parler de M. de Montcalm dont
l’affaire était céans moins connue. Tant est que j’eusse pu, tout huguenot que
je fusse (encore que réputé moins zélé même que je n’étais), marier, sur le
poids de ma neuve réputation, nombre de gentilles demoiselles du Sarladais dont
les mères arguaient
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