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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon
Autoren: André Castelot
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assurément l’un des plus beaux paysages du monde.
    Après une dernière escale – le 28 août – dans la rade de Bahia, au Brésil, les deux navires mettent le cap sur Sainte-Hélène. Au fur et à mesure qu’ils approchent de l’île, les anciens compagnons de l’Empereur assaillis par le souvenir qui les hante depuis dix-neuf années, sentent leur coeur prêt à éclater.
    Au soir du jeudi 7 octobre les hautes et sinistres murailles de basalte, toutes crevassées de vallées étroites, apparaissent, se dressant comme une vaste tour au-dessus de l’Océan.
    Lorsque la Belle Poule s’avance vers l’île, Emmanuel de Las Cases pousse un cri : la montagne de Barnes-Point, à l’est du plateau de Deadwood, semble dessiner le profil de l’Empereur ! Du moins telle fut leur impression que j’ai mal retrouvée en dépit de mes vols en rase-vagues, autour du Barn.
    Saluée par deux vaisseaux – un anglais et un français, l’Oreste – qui se trouvent à l’ancre, la frégate du prince de Joinville mouille devant Jamestown, tapi entre ses deux murs de lave.
    Le lendemain – 9 octobre – le prince et ses compagnons montent à Plantation House rendre visite au vieux gouverneur britannique lord-général Middlemore. Souffrant, appuyé sur l’épaule de son fils, il annonce gravement à ses visiteurs :
    — Messieurs, jeudi 15 octobre, les restes mortels de l’empereur Napoléon seront remis entre vos mains.
    Les « pèlerins » remontent à cheval, gagnent la route de Hut’s Gâte, l’ancienne demeure de Bertrand et, abandonnant leurs chevaux, descendent entre les araucarias le vaste cirque de rochers noirs formant le Bol à punch. Bientôt – on devine leurs sentiments – ils arrivent à la tombe, dont la lourde dalle a été entourée d’une grille provenant de la vaste clôture en fer, forgée en Angleterre, et qui devait servir à enclore « la prison » de l’Empereur. « Ma cage », disait le proscrit en passant les mains sur ces fers de lance. Les géraniums de Mme Bertrand se sont développés, des myosotis, des pensées ont poussé. Un vieux sergent monte la garde. Joinville se découvre, l’abbé s’agenouille imité par les anciens serviteurs – et le silence n’est plus troublé que par le bruit de la source de l’Empereur dont le murmure est toujours là et anime la solitude.
    Après avoir cueilli quelques fleurs et des feuilles du vieux saule, ils retournent vers Hut’s Gâte et, laissant la route qui monte vers le pic de Diane, prennent à gauche le chemin qui, contournant les bords du Bol à punch, conduit au plateau aride de Longwood. Ils atteignent, enfin, les deux petits pavillons où se tenait autrefois le corps de garde. Ils s’avancent, le coeur battant. Et bientôt se présente l’affreuse réalité : le jardin de l’Empereur a disparu, des moutons y paissent mais les immortelles dorées semées par le Proscrit se sont reproduites et couvrent, comme aujourd’hui, le plateau. Les bâtiments ont été transformés en ferme, les murs sont lézardés, presque en ruines, il n’y a plus de vitres aux fenêtres. Le petit groupe entre, la gorge serrée : les planchers, recouverts de fumier, sont pourris. Les Français pénètrent dans le salon où l’Empereur a rendu le dernier soupir. Il n’y a plus de cheminée, plus de portes, on a converti la pièce en moulin et pour l’installer, il a fallu défoncer le plafond... Emmanuel Las Cases s’enfuit craignant d’éclater en sanglots. Les deux fameuses petites pièces – le cabinet et la chambre de l’Empereur – ont été transformées en écurie. Des planches obstruent les croisées. Une mangeoire occupe la place de la table de travail de Napoléon et de son petit lit de fer qui, derrière les rideaux verts, abritait ses rêveries... Les Français ne peuvent retenir leur indignation et leurs larmes. Gênés, les officiers anglais détournent les yeux.
    Le Conseil de l’île était responsable de ce déplorable état de choses et le gouverneur Walker en 1823 avait, en effet, estimé que les bâtiments devaient être mis à disposition du fermier de Longwood. « Ils ne pouvaient être appliqués à une plus utile et nécessaire utilisation », avait-il écrit dans son rapport, avec inconscience... du moins on veut l’espérer.

    Le soir du mercredi 14 octobre, la mission quitte l’escadre. Il fait un temps merveilleux. Le prince de Joinville ne se joindra pas à ses compagnons. Il trouve plus digne
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