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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus
Autoren: Arlette Cousture
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légumes et de fruits. Il jeta un regard par la fenêtre, retint fermement l’herbier par une cordelette et, soudain, s’endormit profondément dans le fauteuil, l’herbier en équilibre sur les genoux. C’est dans cette position plutôt humiliante qu’il fut réveillé par des moqueries. Brûlant la politesse, il monta à la chambre qu’il occupait et s’y endormit de nouveau. Personne ne parvint à l’éveiller pour le souper.
    La soirée étant encore jeune, Élisabeth exécuta un solo devant M. Porowski, qui l’applaudit avec admiration.
    – Bientôt, tu pourras presque faire rougir ta mère.
    – Pourquoi la faire rougir?
    – Parce qu’elle ne pourra plus cacher sa fierté.
    Jerzy fit une petite grimace de dépit mais il savait que sa sœur avait beaucoup plus de talent que lui.
    Ils allèrent tous dormir très tôt. Le lendemain matin, fidèle à ses habitudes, Jerzy s’installa dans le potager pour jouer du violon. Il rentra ravi de la température qui s’annonçait encore clémente mais fut accueilli par la figure inquiète de son père. La radio était allumée et une voix annonçait que la Société des Nations ne craignait nullement pour Dantzig. Un porte-parole de la Société avait même ajouté que le problème politique polonais n’était pas d’importance internationale. Jerzy s’assit lentement.
    – Qu’est-ce que ça veut dire, papa?
    – Que nous sommes un petit pays.
    Tomasz n’ajouta rien, se contentant d’emplir son assiette et d’inviter Jan et Élisabeth à faire comme lui. Ils retournèrent rapidement aux champs pendant que M me Porowska préparait les sacs de provisions qu’ils rapporteraient à Zofia.
    Jerzy se mit les mains dans la terre après avoir rappelé que c’était la terre d’un pays aux frontières fragiles qu’il était prêt à défendre. Tomasz le regarda, effrayé par les pensées qui se bousculaient dans sa tête. Il prit une botte de carottes et les montra à son fils en disant que c’était aussi cette terre qui les nourrissait. M. Porowski ne dit rien et s’extasia devant la taille des queues d’oignons.
    M. Porowski raccompagna Tomasz et les enfants à la gare tandis que Jerzy resta à la ferme. Le dos courbaturé et les ongles noirs, Jan et Élisabeth somnolèrent sur une banquette. Les hommes parlèrent rapidement, presque furtivement, avant de se taire, les deux suivant en silence le même sillon de pensée, espérant que Jerzy puisse rapporter d’autres provisions à la maison.
    L’arrivée du train leur emplit le nez d’odeur de charbon et les poumons de vapeur. Les roues glissèrent sur les rails en crissant, faisant frissonner Élisabeth et Jan. Les yeux cireux, ils montèrent à bord, Élisabeth portant les violons et Jan deux paniers de provisions. Tomasz tapota le dos de son ami en lui donnant l’accolade, ramassa ensuite deux énormes poches de jute bien remplies. M. Porowski le regarda disparaître comme s’il avait été aspiré par les volutes de crachin du train.
    Tomasz devina le pays à la lueur des lampadaires qui longeaient la voie ici et là. Il s’abandonna la tête sur le dossier et tenta de ne penser à rien d’autre qu’à l’insignifiance des politiciens, auxquels l’histoire ne semblait rien apprendre. La lune, quand les nuages le lui permettaient, éclairait tantôt les champs, tantôt les hameaux. Le ciel s’illumina et Tomasz reconnutles lueurs de la ville de Cracovie. Il éveilla Élisabeth qui, à son tour, secoua Jan. Le train se faufila le long des quais et ils eurent tout juste le temps de sortir de la gare pour attraper le dernier tramway.
    Zofia les entendit monter l’escalier et elle soupira de soulagement. Si elle l’avait pu, elle aurait pris le train et serait allée les retrouver à Wezerow. Il lui faudrait écrire à Jerzy pour lui expliquer les raisons de son absence. Tomasz ouvrit la porte et laissa passer Jan qui retenait avec peine une terrible envie d’uriner. Tomasz et Élisabeth passèrent directement à la cuisine déposer les provisions.
    – Mais la récolte s’annonce exceptionnelle!
    – S’annonce... Rien ne garantit qu’elle le sera.
    Zofia fit une discrète moue. Depuis le départ de Villeneuve, Tomasz n’avait cessé d’analyser tous les articles de journaux et toutes les déclarations dont il avait pris connaissance, faisant constamment le lien entre le positionnement de Hitler sur l’échiquier européen et l’imminence d’une attaque. Zofia avait pensé que
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