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Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Titel: Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi
Autoren: Max Gallo
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suscité, approuvé la bulle pontificale Unigenitus, Dei Filius . Elle condamne les propositions jansénistes qui placent au centre du salut de chaque chrétien la grâce que Dieu lui accorde : « Tous ceux que Dieu veut sauver le sont infailliblement. Sans la grâce nous ne pouvons rien faire sinon notre propre condamnation. »
    Propositions, dit la bulle, « fausses, captieuses, malsonnantes, capables de blesser les oreilles pieuses, scandaleuses, pernicieuses, téméraires, injurieuses à l’Église, outrageantes pour les puissances séculières, séditieuses, impies, blasphématoires, suspectes d’hérésie ».
    Il est sûr d’avoir eu raison quelles que soient les réserves et les résistances de quelques évêques de l’Église de France.
    Il est le Roi Très-Chrétien, le héraut et le défenseur de Dieu et du pape.



41.
     
     
    Il regarde ses deux fils, le duc du Maine et le comte de Toulouse, assis de part et d’autre de Mme de Maintenon.
    Les valets passent, courbés, et servent de l’orangeade dans de grands verres de cristal à lisière d’or.
    Il soulève à peine la main de son genou et les dix violons du roi, debout au fond de la pièce dans la pénombre, commencent à jouer.
    Il ferme les yeux.
    Il aime ce moment d’après souper, dans l’intimité des appartements de Mme de Maintenon. La musique le berce. Elle accompagne le ballet de ses souvenirs.
    Il voit passer la silhouette dorée d’Athénaïs de Montespan, et parfois un sourire, une expression du duc du Maine ou du comte de Toulouse lui rappelle avec précision le visage de cette femme, leur mère.
    Il la revoit dansant avec lui, elle, Vénus, lui, Apollon. C’était il y a près de cinquante ans. Il était le Dieu solaire, entouré de jeunes femmes, régnant sur l’île enchantée.
    Tout cela est si loin qu’il ne peut évoquer ces souvenirs qu’avec ses vieux compagnons, le maréchal de Villeroi et le duc de Gramont.
    Et c’est pour pouvoir échanger quelques bribes de ce passé avec eux qu’il les convie souvent à ces soirées.
    Mais après quelques phrases, il se tait.
    Ces souvenirs lui rappellent ce qu’il est devenu, ce vieil homme de soixante-seize ans, dont à la Cour on guette les faiblesses, ces moments de vertige qui le saisissent, ces vapeurs qui empourprent son visage, et le pas traînant, la claudication parfois quand les genoux refusent de se plier.
    On attend, il le sait, sa mort. Elle lui a déjà presque tout arraché.
     
    Que lui reste-t-il de cette famille qui lui semblait si vigoureuse, arbre dont il était le tronc avec tant de branches ?
    Il y a ces fils bâtards, le duc du Maine et le comte de Toulouse. Et puis le duc de Berry, le frère cadet du duc de Bourgogne. Et quand il voit ce dernier petit-fils, il ne peut s’empêcher de lui dire :
    — Mon cher enfant, je n’ai donc plus que vous.
    Car il craint que le duc d’Anjou, son dernier arrière-petit-fils, un enfant souffreteux d’à peine quatre ans, ne soit emporté par ces maladies qui ont tué ses frères aînés.
    Il voudrait préparer sa succession, et presque chaque soir le duc du Maine et Mme de Maintenon lui rapportent qu’à la Cour on est persuadé que le duc d’Orléans sera, dès la disparition du roi, un régent tout-puissant, s’entourant de Conseils composés des ducs et des princes, changeant ainsi la manière de gouverner du royaume.
    Que pourra un roi qui n’aura pas dix ans ?
    Et certains ajoutent à mi-voix : « Et encore faut-il que le duc d’Anjou survive…»
    Ils rappellent comment tous ceux dont l’existence était un obstacle sur le chemin qui mène Philippe d’Orléans au trône sont morts.
    Il écoute. Il n’aime pas Philippe d’Orléans. Il ne le soupçonne pas d’être un empoisonneur, mais il se méfie de lui, de sa vie de débauche, de son ambition, de sa volonté de régner contre les descendants directs, le duc de Berry, le duc d’Anjou, et les deux bâtards légitimés qui, issus aussi du roi, devraient prendre place dans la succession.
    C’est ce qu’il veut. C’est ce que Mme de Maintenon et le duc du Maine lui suggèrent chaque soir.
    Mais il hésite encore. Il sait qu’il ne respectera pas, en décidant cela, ce que les parlementaires, les ducs, tel ce Saint-Simon, appellent les lois fondamentales du royaume.
    Mais il est le roi Louis le Grand, et Dieu lui a donné le pouvoir de gouverner le royaume, donc de changer, s’il le veut, s’il le juge utile au bien de ses sujets,
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