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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)
Autoren: James Fenimore Cooper
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quelques instants, et sembla puiser de la confiance dans ses traits.
    – Job conduira l’officier chez Mrs Lechmere, dit-il, si l’officier veut empêcher les grenadiers de le rattraper avant qu’il soit revenu de North-End.
    – Ah ! ah ! dit l’officier en riant, il y a quelque chose de l’adresse d’un fou dans cet arrangement. Eh bien ! j’accepte vos conditions ; mais prenez garde de ne pas me mener contempler les sépultures au clair de lune, ou je vous livrerai aux grenadiers, et j’appellerai pour les aider l’infanterie légère, l’artillerie et tous les corps de l’armée.
    Après cette menace faite en riant, l’officier suivit son agile conducteur, ayant fait ses adieux au boiteux obligeant, qui continua à recommander à l’idiot de prendre le chemin le plus droit, tant qu’il put lui faire entendre sa voix. Le jeune guide marchait si rapidement, qu’à peine l’officier put-il jeter un coup d’œil à la hâte sur les rues étroites et tortueuses qu’il traversait. Un ou deux regards lui suffirent pour reconnaître qu’il était dans la partie la plus sale et la plus mal bâtie de la ville, et, malgré tous ses efforts, il n’y trouva rien qui pût rappeler à sa mémoire son pays natal. Meriton, qui suivait son maître pas à pas, ne faisait que se plaindre du mauvais chemin et de sa longueur. Enfin l’officier commença lui-même à douter un peu de la bonne foi de son conducteur.
    – N’avez-vous rien de mieux à montrer à un concitoyen qui revient dans son pays après dix-sept ans d’absence ? s’écria-t-il. Tâchez donc de nous faire passer par quelques plus belles rues, s’il y en a de plus belles à Boston !
    L’idiot s’arrêta un instant et regarda l’officier avec un air d’étonnement véritable ; alors, sans lui répondre, il changea de direction, et, après une ou deux déviations, il entra dans un passage si étroit, qu’en étendant les bras on pouvait toucher les deux murailles. L’officier hésita un instant à le suivre dans cette allée tortueuse ; mais un coude lui cachant déjà son guide, il se décida, doubla le pas, et regagna le terrain qu’il avait perdu. Ils sortirent enfin de ce passage obscur, et se trouvèrent dans une rue plus large.
    – Là ! dit Job d’un air de triomphe en regardant l’allée qu’ils venaient de traverser, le roi demeure-t-il dans une rue comme celle-là ?
    – Sa Majesté doit vous le céder à cet égard, répondit l’officier.
    – Mrs Lechmere est une grande dame, continua l’idiot suivant évidemment le cours de ses idées décousues, et pour rien au monde elle ne voudrait demeurer dans cette rue, quoiqu’elle soit aussi étroite que la route qui conduit au ciel, comme dit la vieille Nab ; je suppose que c’est pour cette raison qu’on l’appelle la rue des Méthodistes.
    – J’ai certainement entendu dire que la rue dont vous parlez est étroite, on dit aussi qu’elle est droite, dit l’officier qui ne pouvait s’empêcher de s’amuser un peu du babillage de son guide ; mais en avant, le temps passe vite, et il ne faut pas le perdre.
    Job tourna sur sa droite, et, marchant le premier d’un pas agile, il passa par une autre allée qui méritait pourtant un peu mieux le nom de rue, et où les premiers étages des bâtiments construits en bois faisaient saillie en s’avançant de chaque côté. Après avoir suivi pendant quelque temps les détours irréguliers de leur route, ils entrèrent dans une place triangulaire, de quelques verges d’étendue, et Job, dédaignant de suivre les murailles comme il l’avait fait jusqu’alors, s’avança directement vers le centre. Là, s’arrêtant encore une fois et regardant d’un air très-sérieux un bâtiment formant un des côtés du triangle, il dit d’une voix qui exprimait toute son admiration :
    – Voyez, voilà Old-North ; avez-vous jamais vu une aussi belle église ? Le roi adore-t-il Dieu dans un pareil temple ?
    L’officier ne gronda point l’idiot de la liberté qu’il prenait, car dans l’architecture simple et antique de cet édifice construit en bois, il reconnut un des premiers efforts de ces constructeurs puritains dont le goût grossier s’est transmis à leur postérité avec tant de déviations, toutes dans le style de la même école, et avec si peu de perfectionnements. À ces considérations se joignaient des souvenirs qui commençaient à renaître, et il sourit en se rappelant le temps où il
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