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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol
Autoren: Michel Zévaco
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comme le mauvais ange, Isabeau, dans un murmure :
    – J’ai simulé une perquisition ; les gens de ce logis sont gardés et ne sauront rien…
    – Oui, Majesté, oui… soyez rassurée, ma bonne, ma généreuse Majesté ! Plutôt m’arracher la langue… oh ! dire que, tout à l’heure, je vous ai haïe !… Dire que vous donnez un nom à ma fille !… Et que vous me laissez vivre !…
    – Allons, calmez-vous, levez-vous…
    Laurence d’Ambrun, secouée de sanglots, se met debout… et alors elle frémit ! Son sein palpite ! Pour un instant, Laurence est redevenue l’amante !… En foule, les souvenirs d’amour, de son premier, de son unique amour, se sont levés en elle… et son front s’empourpre : le regard de Laurence vient de tomber sur Jean sans Peur !…
    La reine voit Laurence qui recule et se courbe devant Nevers, vaincue – et alors elle donne l’ordre au prêtre :
    – Voici les actes, là, sur cette table… Voici les témoins : ce gentilhomme, mon scribe, mon capitaine, – et moi !… Voici les fiancés : noble demoiselle Laurence d’Ambrun ; très haut et puissant seigneur Jean de Bourgogne, comte de la marche de Nevers… Remplissez votre office, messire !
    – Vous savez, murmure sourdement le prêtre, vous savez que ce sera un sacrilège !
    – Et vous savez, vous, que, si vous ajoutez un mot, je vous fais jeter dans les fosses de la tour Huidelonne !
    Le prêtre blêmit, soupire, et l’office commence ! L’office qui unit à Laurence d’Ambrun Jean sans Peur, l’époux de Marguerite de Hainaut !… Quinze minutes plus tard, tout est terminé ; il n’y a plus qu’à signer les actes déposés là-bas, à l’entrée de l’oratoire, sur la table… une petite table sur laquelle attend aussi une coupe… Pourquoi ? Pour qui cette coupe dont le métal scintille faiblement là-bas ?…
    Le premier, d’une main agitée, le prêtre signe : et il s’en va.
    Le capitaine trace une croix : et il s’en va.
    Le scribe signe : et il s’en va.
    Bois-Redon signe… et il reste, lui !
    La reine, alors, dans un violent parafe, appose son nom sur l’acte de mariage, comme sur un acte de condamnation à mort. Et c’est le tour de Jean sans Peur. Il prend une plume, la dépose, la reprend, et enfin, le front ruisselant de sueur, lentement, il écrit… il signe… il a signé !
    – À vous ! prononce la reine.
    D’un geste d’emportement sublime, tandis que la rosée de ses larmes se répand plus tiède, plus précipitée, Laurence a saisi la plume… La reine s’est glissée vers la coupe de métal !… Laurence écrit, signe de son nom, signe de ses larmes… La reine emplit la coupe ! Elle l’emplit de ce que contient le flacon ! Elle l’emplit du poison de Saïtano !…
    Enivrée, balbutiante, extasiée, Laurence d’Ambrun se redresse… et alors, soudain, l’horreur la saisit à la gorge, son cœur se brise, ses jambes fléchissent, elle comprend… elle a compris !… La reine, terrible, implacable, lui tend la coupe !… La mère s’écrase à genoux, se traîne, lève les mains, et, dans une déchirante clameur :
    – Grâce ! Grâce ! Laissez-moi revoir ma fille une dernière fois !…
    Et la reine, rudement, violemment :
    – BUVEZ !
    Laurence, d’un bond, se releva, recula, affolée, criant : – Je ne veux pas m’en aller sans revoir ma fille ! – Buvez ! répéta Isabeau en marchant sur elle. Laurence grelotta : – Laissez-moi revoir ma fille, et puis je veux bien mourir…
    Ce mot, soudain, déchaîna en elle l’instinct de vivre. Elle hurla : « Non ! non, je ne veux pas mourir ! » Sa fille Roselys, le chevalier Hardy, le mariage, la promesse de disparaître, tout cela s’effondra ; elle ne fut plus qu’une pauvre chair pantelante au contact de la mort, condamné s’arc-boutant pour se refuser à l’échafaud, cerf pleurant devant la meute, agonisant qui s’accroche furieusement aux tentures du lit… formes diverses du même sentiment chez toute créature poussée au bord du néant.

III – LE POISON DE SAÏTANO
    L’homme de la Cité qu’on appelait Saïtano, après avoir escorté la reine et Bois-Redon jusqu’à la rue, était rentré chez lui. Il avait couru jusqu’à l’armoire de fer et passé en revue ses flacons alignés.
    – Très bien, murmura-t-il en refermant. Toute la question est de savoir si l’être quelconque à qui mon « poison » est destiné sera oui ou non
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