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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol
Autoren: Michel Zévaco
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l’arrêta :
    – Je suis prêt, dit-il. J’ai les trois « vivants », madame. M’apportez-vous le « mort » ?
    – Les trois vivants ! balbutia la reine.
    – Indispensables pour ce que vous m’avez commandé. Je les ai eus aujourd’hui, non sans peine… À vous de me fournir l’enfant mort – « de mort violente », n’oubliez pas !
    – De mort violente, oui ! répéta Isabeau.
    – Mais « sans effusion de sang », n’oubliez pas !… Hâtez-vous, madame. Les trois vivants attendent… Regardez…
    Il tira un rideau. Bois-Redon ferma les yeux… Isabeau regarda :
    Il y avait simplement trois escabeaux – des escabeaux cloués au plancher, impossibles à bouger. C’était simplement trois escabeaux en chêne. Mais chacun d’eux, supportait une effigie de la peur – trois vivantes effigies, secouées d’instant en instant de spasmes terriblement réguliers – trois représentations de ce qu’il peut y avoir d’anormal, de monstrueux, d’extra-humain dans la peur – les silhouettes convulsées de trois adolescents solidement bâillonnés, solidement attachés. Le premier paraissait quatorze ans, le deuxième quinze, le troisième seize.
    La vision disparut : l’homme venait de pousser le rideau. La reine essuya la sueur froide qui perlait à son front. Elle raffermit ses nerfs, et elle dit :
    – Saïtano, ce n’est pas pour « cela » que je suis venue ce soir.
    L’homme de l’horreur parut étonné. Du regard, il interrogea la sombre visiteuse. Elle se pencha, murmura quelques mots. Celui qu’elle avait appelé Saïtano sourit, hocha la tête, ouvrit une armoire de fer, promena son doigt parmi les quantités de flacons d’une étagère, en choisit un et le tendit à la reine :
    – Prenez, c’est la foudre.
    Isabeau saisit le flacon, le cacha sous son manteau – et Saïtano l’escorta jusqu’à la rue, en répétant :…
    – Au plus tôt l’enfant mort ! Ou je ne réponds pas des trois vivants…
    La reine frissonna longuement, et enfin répondit :
    – Eh bien ! cette nuit… oui, dès cette nuit, peut-être !
    Et elle s’en alla, songe mortel qu’engloutit la nuit complice… elle s’en alla vers la maison où attendait la mère de Roselys… où habitait Hardy… un enfant !… et elle songeait « à ces trois vivants qui ATTENDAIENT l’enfant mort !… ».
    Un silence d’angoisse pesait sur le logis Passavant.
    Sur le coup d’une heure du matin, il y eut la brusque invasion du logis ; il y eut quelques cris, et tout fut fini : la petite garnison de dix mercenaires était prisonnière, les gens du service gardés à vue, les salles occupées.
    Le capitaine des gardes attendait Isabeau près de la porte d’entrée. En peu de mots, il raconta l’exploit, et termina :
    – Tout s’est passé en douceur, sauf pour le petit chevalier. Quel démon, madame ! À preuve Claude le Borgne, qui gît là quelque part, le ventre ouvert… quel enragé démon !…
    – Le jeune Passavant n’est pas blessé ?
    – Pas une égratignure ! fit le capitaine.
    – Bien. Très bien !
    Puis, ce rapide colloque :
    – La chapelle ? – Éclairée, disposée. – Le scribe ? – Dans la chapelle, madame, avec ses écritoires et grimoires. – Le prêtre ? – À l’autel, tout prêt aux oremus. – Et elle ? – Au pied de l’autel, en prières. – Et… lui ? – Le comte de Nevers attend devant la porte de l’oratoire. – Bien ! Conduisez-moi. Ici, Bois-Redon ! et attention !
    Le colosse à figure de poupée eut un mouvement d’épaules sous la cotte de mailles, et un mouvement de la main vers la poignée de sa dague. C’était éloquent. Cela suffit à Isabeau. Elle arriva devant l’oratoire, et vit Jean sans Peur figé. Le cœur de la reine battit à grands coups. Mais, refoulant donc cette émotion d’amour :
    – Êtes-vous prêt ? dit-elle. – Madame, c’est horrible !… – « Êtes-vous prêt ? » – Madame, si cela se découvre, c’est pour moi la mort infamante… – ÊTES-VOUS PRÊT ?…
    Et la reine, oui, cette femme qui adorait sûrement Jean sans Peur, du regard, cria à Bois-Redon : Attention !
    Jean sans Peur saisit le sinistre coup d’œil et, cette fois, répondit : « Je suis prêt ! »
    Ils entrèrent tous quatre dans l’oratoire.
    La reine marcha tout droit à Laurence d’Ambrun agenouillée, la figure dans les mains, et la toucha à l’épaule. Laurence frissonna… Penchée
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