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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol
Autoren: Michel Zévaco
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La mère acheva :
    – Je demande un nom pour ma fille. En échange, j’offre ma vie. Voilà. C’est tout. Décidez, Majesté !
    Alors la jalousie, la rage, la terreur même d’une dénonciation jetèrent dans l’esprit d’Isabeau leurs poisons corrosifs. Et tout à coup son regard s’éclaira d’une lueur funeste. Depuis plus d’une heure, elle cherchait le moyen sûr de tuer Laurence en évitant le scandale d’un meurtre en plein palais. Et voilà que ce moyen, Laurence elle-même l’avait trouvé ! Un sourire glissa sur ses lèvres livides, pareil à ces lueurs des nuages porteurs de foudre. La reine, brusquement, se pencha sur Laurence :
    – Vous m’avez vaincue, dit-elle. Vous avez fait naître la pitié en moi. Je vous pardonne. Je vous sauve, vous et votre enfant…
    – Majesté ! Majesté ! Que dites-vous !…
    – Eh bien ! oui, votre fille aura le nom auquel elle a droit ! Ce mariage, dès cette nuit, se fera, mais secret ! Et vous vivrez !
    – Grâce ! délira l’infortunée. Ne vous jouez pas de moi !…
    – Vous vivrez. Allez. Soyez forte. Retirez-vous au logis Passavant. Dans une heure, je vous y rejoins !
    – Seigneur ! écoutez mon ardente prière ! Seigneur, protégez la reine ! Seigneur, bénissez la reine !…
    Isabeau, déjà, était partie. La mère de Roselys demeura prosternée, à peine respirante, bien près de succomber sous le poids énorme de cette joie, Roselys entoura son cou de ses deux bras et murmura :
    – Vite, allons retrouver Hardy qui nous défendra, lui !
    – Oui, oui ! fit la mère toute pantelante.
    Et, transfigurée, légère, enivrée, sa fille dans ses bras, elle s’élança…
    Isabeau s’était arrêtée dans la salle de Mathebrune. Là, écumante, elle frappa d’un violent coup de marteau un large timbre, qui rendit un son lugubre et prolongé. À cet appel, le palais tressaille, son apparente solitude s’anime, des pas précipités secouent le silence de ses profondeurs, des flambeaux éclairent autour de la reine la robe de drap noir d’un prêtre, la robe de bure d’un secrétaire muni d’un écritoire à la ceinture, la robe d’acier du capitaine des gardes, d’autres encore. À chacun pris à part, Isabeau donne des instructions précises. Et chacun s’éloigne en hâte… Demeurée seule, la reine murmura, ou plutôt haleta :
    – À lui, maintenant ! Malheur, malheur, s’il hésite ! Bois-Redon est là !…
    Et rude, agressive, elle entra dans sa chambre, où Nevers attendait cette amante de dix-huit ans.
    Que dit-elle ? Qu’exigea-t-elle ? Qu’imposa-t-elle ?… Jean sans Peur était l’homme de la force et de la cruauté froide. Jean sans Peur ne reculait ni devant le meurtre violent, ni devant le crime lâche. Mais lorsqu’il sortit et que, à son tour, il eut franchi l’enceinte de l’Hôtel Saint-Pol, il tremblait…
    Lui parti, la reine s’enveloppa d’un manteau à capuche, et, dans la ruelle de son lit, ouvrit une petite porte secrète. Apparut une cellule carrée, où, sur l’unique siège, était assis un homme tout jeune, une façon de colosse à figure très douce. C’était le fameux Bois-Redon, futur capitaine du palais, futur… mais alors garde du corps, chien de la reine, prêt, sur un signe, à ramper, à mordre, à caresser, à éventrer…
    – Bois-Redon tu vas marcher près de moi. Tu ne me quitteras pas de la longueur du bras. Tu n’entendras, tu ne verras rien de ce qui se dira ou se fera…
    – Bon. Je serai muet, et sourd, et aveugle. Où va la reine ?
    – Au logis Passavant, rue Saint-Martin ; mais d’abord dans la Cité, rue aux Fèves. (Bois-Redon pâlit un peu.) Maintenant, retiens ceci : qui que ce soit, manant ou prince, si je te dis : frappe…
    Bois-Redon sourit. D’un geste redoutable, il assura sa dague, et, hors l’Hôtel Saint-Pol, se mit à marcher près de la reine, faisant craquer ses muscles puissants et sondant la nuit de son mufle tendu. Près des moulins Notre-Dame, ils descendirent sur la Berge. Bois-Redon détacha un esquif et, en quelques coups d’aviron, porta la reine dans la Cité. Évitant le Val d’Amour et ses bruyants cabarets nocturnes, ils s’arrêtèrent dans la rue aux Fèves devant une maison basse. Peut-être étaient-ils attendus : la porte s’ouvrit ; ils entrèrent… Bois-Redon fit un signe de croix.
    L’homme qui avait ouvert à la reine lui fit traverser une première salle. Dans une seconde, il
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