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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie
Autoren: Robert Merle
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levait, il allait à sa rencontre, le
saluait à plusieurs reprises en levant son chapeau comme pour faire honneur au
pays qu’il représentait. Et pour peu que le dignitaire appartînt à un royaume
ami, comme la Savoie, et qu’il ne l’eût vu de longtemps, il allait jusqu’à
l’embrassade. Dans la suite de l’entretien, chaque fois que l’ambassadeur en
lui donnant de « Votre Majesté » lui baillait en même temps une
bonnetade, Louis ne laissait pas aussitôt de lui rendre ce salut. Ce qui ne
l’empêchait pas d’écouter le discours de son vis-à-vis avec une extrême
attention, son jeune visage – ma belle lectrice se ramentoit qu’il n’avait
pas encore seize ans – étant pénétré tout à la fois de gravité, de dignité
et de bienveillance.
    Telle ne fut pas la réception qu’il fit au représentant du
royaume que j’ai dit, lequel tâchait, on s’en souvient, d’empiéter sur une
principauté qui était chère à nos cœurs. Quand le duc de Monteleone apparut et
s’avança vers lui, Louis, pour répondre à son salut, se leva à moitié de sa chaire
et souleva à demi son chapeau. Puis d’entrée de jeu, il dit sans phrase, sans
rhétorique et sans le moindre détour, que si les troupes de son bien-aimé
cousin continuaient à attaquer la Savoie, il prendrait les armes pour se porter
au secours de ses amis.
    Le duc de Monteleone, chez qui tout – le corps et le
visage – était long, maigre et roide, et à qui on avait eu quelque mal à
faire entendre à son arrivée en France que, s’il pouvait, étant Grand
d’Espagne, rester couvert devant son propre souverain, il devait se découvrir
devant le roi de France, fut étonné d’un discours aussi ferme que laconique, et
l’interprétant comme une preuve d’inexpérience, il pensa gagner à la main sur
un roi si béjaune.
    — Sire, dit-il, ceci est pour moi tellement inattendu
que je m’abstiendrai d’écrire à mon roi que le roi de France a l’intention de
prendre les armes en faveur de la Savoie.
    Étant placé derrière Monsieur de Villeroy, lequel était
debout derrière la chaire de Sa Majesté, je ne pus voir le visage de Louis
quand il répliqua, mais je sentis à l’intonation de sa voix qu’il jugeait fort
offensant le dédain que laissaient apparaître les paroles de l’ambassadeur.
    — Monsieur, dit-il avec froideur, écrivez seulement que
pour avoir la paix générale, il faut commencer par accorder une suspension
d’armes, sinon, la Savoie étant unie à ma couronne, je ne laisserai pas de
l’assister.
    Un silence suivit cette déclaration.
    — Puisque Votre Majesté, dit le duc de Monteleone en
s’inclinant, mais sans rien perdre de sa superbe, le désire ainsi, j’écrirai ce
qu’elle m’a dit d’écrire au roi, mais je regrette que cette décision-là ait été
conseillée à Votre Majesté.
    À cette insolence à peine voilée, Louis redressa le torse et
la tête et dit sans hausser la voix :
    — Rien d’autre, Monsieur, ne me conseille, que
l’intérêt de mon service.
    Et il ajouta d’une voix glaciale :
    — Je vous ai dit ma volonté. Faites-la entendre à votre
maître, et vous en allez trouver Monsieur de Villeroy, qui vous dira le surplus
de mes intentions.
    Ce fut la première et la dernière fois que Monsieur de
Monteleone tenta de le prendre de haut avec le roi. Non qu’il fût sot, mais
ayant peu approché Louis du temps de la régence, il en tenait encore pour la
version de l’« enfant enfantissime » répandue par sa mère. Tant est
que le vingt-quatre avril 1617 le prit sans vert et le laissa béant. Mais
convaincu, comme souvent les diplomates, de sa propre infaillibilité, il finit
par se persuader que la paternité du coup d’État revenait non pas au roi, mais
à Monsieur de Luynes et à son entourage. Or, il n’en était rien, je peux
l’affirmer, puisque j’appartenais à la poignée des conjurés qui entouraient
Louis. Dans nos réunions secrètes, le pauvre Luynes, si charmant et si couard,
ne proposa jamais que la fuite. S’il n’avait tenu qu’à lui, Concini serait
encore vivant, et la régente, assise sur son trône usurpé.
    À l’égard de l’Espagne, Louis ne se contenta pas d’une
menace d’intervention. Il expédia sans tant languir des troupes commandées par
Lesdiguières, lequel contraignit les Espagnols à lever le siège de Verceil. Il
est bien vrai que le Conseil des affaires, à une large majorité, avait
conseillé cette
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