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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie
Autoren: Robert Merle
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il décide de courre le cerf. « Sire, protestent ses
veneurs, cela ne se peut. Il pleut. Et la pluie va brouiller le nez des
chiens. » Louis passe outre, et tenant son limier, il quête lui-même l’animal,
il s’attelle à cette tâche trois heures d’affilée sous pluie et grêle. Il
trouve enfin la proie, et comme il n’y a plus alors qu’à garder le contact, il
laisse ce soin à ses veneurs, remonte au château, va à messe et voit la reine.
Bref, il remplit ses devoirs coutumiers. Il mange aussi, et rebotté il descend
derechef à la garenne et poursuit le cerf qu’il a détourné le matin. La course
dure cinq heures, de une heure de l’après-dînée à six heures du soir. La nuit
tombe, l’animal est enfin aux abois et Louis remonte au château. On le dévêt,
on l’essuye, on le change. Il va voir la reine. Au cours de cette mémorable
journée, il lui a consacré deux fois dix minutes, et au cerf, huit heures.
    Parce qu’il était grand chasseur et aussi parce qu’en son
règne il châtia exemplairement les rebelles et les traîtres, on a dit qu’il y
avait en lui un grain de cruauté. Loin de souscrire à ce jugement, j’en
disconviens tout à plein. Je dirais quant à moi que rien ne passait chez lui
avant le souci de la justice.
    Ma belle lectrice, se peut, se ramentoit qu’à l’âge de dix
ans, préparant de ses mains une œufmeslette pour sa petite sœur Élisabeth, il
lui avait dit que d’aucuns méchants l’appelaient Louis le Bègue, mais qu’il
voulait, lui, qu’on l’appelât Louis le Juste. C’était le temps où les iniquités
de sa mère à son endroit le blessaient d’autant plus cruellement qu’il ne
pouvait protester contre elles à la franche marguerite : on l’eût fouetté.
    D’où une tenace rancœur qui fermenta en lui tout le temps de
la régence et fit beaucoup, à mon sentiment, pour mettre en lui cette roideur
de justicier qui explique les sévérités de son règne. Je n’en citerai à cette
date qu’un exemple. On lui avait donné une compagnie de soldats suisses qui
avaient son âge, et qu’il menait, comme lui-même, à la dure. Et je me ramentois
qu’un an après le coup d’État, ayant à l’improviste visité ces béjaunes en
leurs quartiers à sept heures du matin, il trouva l’un d’eux paressant encore
au lit. Irrité de cette indiscipline, Louis le fit porter dans la cour sur le
fumier des chevaux et ordonna qu’on lui barbouillât le visage avec cette
fiente.
    Certes, c’était là peu de chose eu égard aux punitions
autrement féroces – comme le morion, le piquet, le chevalet ou l ’estrapade [3]  –
que nos capitaines, en ce pays, infligent à leurs soldats. Et peut-être
celle-ci ne me frappa tant que parce que j’en fus le témoin.
    Cette raideur à punir, c’était là le point où, à mon
sentiment, il différait le plus de son père. Louis ne pardonnait pas volontiers,
et jamais deux fois. Mais cette inflexibilité ne voulait pas dire qu’il faillît
le moindrement en sentiments humains. Quand il apprit qu’une femme, à laquelle
il avait quelque raison de garder une fort mauvaise dent : pour la nommer,
l’épouse de Concini, Leonora Galigaï, avait été condamnée à être décapitée et
brûlée [4] , le récit qu’on lui fit de cette
exécution tant le bouleversa qu’il ne put dormir de la nuit. Je m’apense quant
à moi qu’il eût préféré qu’on la renvoyât en Italie, après qu’on eut trouvé un
autre moyen qu’un sordide procès en sorcellerie pour lui faire dégorger
l’immense picorée que son emprise sur la régente lui avait permis d’amasser.
     
    *
    * *
     
    La date du treize septembre 1617 est demeurée gravée en ma
remembrance, comme en celle de Monsieur de Luynes, mais pour une raison sans
aucun doute tout à plein étrangère à la sienne.
    Il se mariait ce jour-là. Il y avait belle heurette qu’il en
avait exprimé le désir à Louis, en fait dès le lendemain du coup d’État, alors
que Louis le comblait de dons et d’honneurs. Devenu un des seigneurs les plus
riches, et à coup sûr le plus influent du royaume, il désirait fonder une
lignée qui perpétuât cette grande faveur où il se trouvait.
    L’amour de Louis pour lui paraissant sans limites et les
caquets de cour à ce sujet étant ce que j’ai dit, il se peut aussi que Luynes
ait désiré une fois pour toutes clore ces bons becs en prouvant qu’il n’était
pas, quant à lui, insensible aux charmes du gentil
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