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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie
Autoren: Robert Merle
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confronte le roi, reprit le père
Joseph, est le suivant : il ne veut pas être gouverné, mais il ne veut pas
gouverner lui-même. Il aime trop la chasse pour s’appliquer à connaître les
affaires assez à fond, pour prendre des décisions et veiller ensuite à leur
exécution. Il veut donc quelqu’un au-dessus de lui, mais qui soit assez avisé
pour demeurer toujours au-dessous et ne jamais prendre de décision sans le
consulter sur tout.
    Un assez long silence suivit ce propos et Fogacer et moi
échangeâmes un regard. Était-ce là, dans la bouche du père Joseph, un portrait
véridique du cardinal ou une esquisse de sa stratégie future à l’égard de
Louis ?
    Je repris :
    — Quelle mine fait à La Vieuville la reine-mère quand
il la va visiter, le savez-vous ?
    — Bah ! dit le père Joseph, il est pour elle un
outil précieux, quoique sans usage ultérieur. Elle le presse quotidiennement de
quérir du roi de prendre Richelieu en son Conseil.
    — Et que répond La Vieuville ?
    — « Madame, dit-il, ce serait ma perte à brève
échéance, et à longue échéance la vôtre. »
    — Le coquin n’est pas sot, dit Fogacer en arquant ses
sourcils diaboliques.
    Mais ce ne fut là qu’un éclair. La seconde d’après, son
visage reprit la bonhomie rassurante qui convenait à un chanoine du Sacré
Chapitre.
    — Et La Vieuville va-t-il faire à la parfin auprès du
roi cette démarche fatale ? dis-je avec un sourire.
    — Il l’a faite, dit le père Joseph. Il s’y est résigné.
Il a pensé qu’au cas où il tomberait du pouvoir, la reine-mère serait du moins
le coussin qui amortirait sa chute.
    À quoi je ris, et Fogacer aussi, tant est que le père
Joseph, levant les sourcils, nous demanda d’un air naïf qui n’était aucunement
joué :
    — Ai-je dit quelque chose de disconvenable ?
     
    *
    * *
     
    Le gros orteil du roi ne guérissant pas et le doulant de plus
en plus, Héroard finit par persuader Louis de demeurer un jour au logis. Louis
accepta la rage au cœur et, quoiqu’il trouvât toujours à s’occuper à de petits
travaux auxquels il excellait, je voyais bien que le cœur n’y était pas et
qu’il songeait prou, mais peu à ce qu’il faisait, étant déquiété et perplexe.
    —  Sioac, dit-il, rompant à la parfin un silence
qui durait depuis une heure, de grâce, venez céans !
    Je m’approchai de la table sur laquelle il travaillait à
peindre sur un fort papier un projet de vitrage.
    — Eh bien, dit-il, qu’en pensez-vous ?
    — Il est fort beau.
    — Je ne vous parle pas du vitrail, dit-il sans lever la
tête et sans en dire plus.
    — Si je vous entends bien, Sire, vous me demandez ce
que je pense du présent prédicament.
    — C’est cela même.
    — À dire le vrai, Sire, ce que vous en pensez
vous-même. Primo, que vous n’allez pas tarder à renvoyer La Vieuville…
    — Continuez.
    —  Secundo, que vous allez mettre le cardinal en
votre Conseil.
    — Nenni, nenni, c’est bien là le hic.
    — Sire, le hic, c’est que vous craignez que le
cardinal, du fait de son caractère altier et dominateur, en arrive à vous
tyranniser, mais c’est justement ce qu’il ne fera jamais.
    — Pourquoi ?
    — Sire, vous avez disgracié les ministres de Concini.
Vous étiez sur le point de disgracier Monsieur de Luynes quand il est mort.
Vous avez disgracié le prince de Condé parce qu’il n’en faisait qu’à sa tête.
Vous avez disgracié les Brûlart. Vous allez sans doute disgracier La Vieuville.
Quelle puissance au monde vous pourrait retenir d’exiler le cardinal de
Richelieu s’il ne vous donnait pas satisfaction ? Croyez-vous que si vous
disiez un jour à Vitry ou à Praslin : « Allez prendre le cardinal
chez lui et conduisez-le en Avignon avec défense de rentrer en France », croyez-vous
qu’on ne vous obéirait pas ?
    — Mais à supposer que je le prenne en mon Conseil, ne
va-t-il pas entrer un peu trop dans les vues de la reine-mère ?
    — Sire, le cardinal est un homme qui aspire au pouvoir.
Et ce pouvoir, il ne peut le tenir que de vous, et non pas de Sa Majesté la
reine-mère. C’est donc à vous qu’il obéira. Sans doute, pris entre la
reine-mère et vous, il connaîtra des moments délicats, mais cela sera son
affaire et non la vôtre.
    — Avez-vous déjà rencontré le cardinal ?
    — Oui, Sire, à Angoulême, alors que j’étais dans la
suite du cardinal de La Rochefoucauld.
    — Qu’en
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