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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie
Autoren: Robert Merle
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ne me l’avez-vous pas dit alors ?
dit Louis après un silence.
    — Je pensais, Sire, que vous étiez d’accord sur le
principe du tri et que c’était par inadvertance que Monsieur de Puisieux ne
vous avait pas porté la dépêche du duc de Savoie.
    — Et qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?
    — L’acharnement de Monsieur de Puisieux à retarder
toute intervention dans la Valteline.
    Un long silence suivit cette phrase tandis que Louis, les
yeux baissés, manipulait sa reliure avec une adresse confondante. Il dit enfin
sans lever les yeux :
    — Vous ne parlerez de tout cela à âme qui vive. Vous
pouvez vous retirer, d’Orbieu.
    Et comme je me dirigeais vers la porte après avoir pris
congé, il me rappela et me dit :
    — Siorac, je n’ai pas trouvé mauvais que vous alliez
voir Monsieur de Schomberg, quoiqu’il fût en disgrâce.
     
    *
    * *
     
    Beaumarchais, l’homme qui avait révélé au roi la détresse de
ses finances, menait de front deux entreprises qui eussent paru incompatibles à
tout homme de sens : il était à la fois trésorier de l’Épargne, charge
qu’il avait achetée et qu’il possédait en propre, mais il était par ailleurs un
financier établi à son propre compte, confusion qu’on pourra trouver
regrettable et qui explique, sans qu’on ait à le souligner davantage, que ce
n’était point précisément par dévouement aux intérêts de l’État que
Beaumarchais avait fait cette cruelle révélation à Sa Majesté, mais bien sûr
pour en tirer quelque profit. En effet, Monsieur de Schomberg à peine
tronçonné, Beaumarchais proposa à Sa Majesté de remplacer le surintendant par
son propre gendre, moyennant quoi il ferait au Trésor les avances si absolument
nécessaires à la marche de l’État que, sans elles, nous allions droit à la
banqueroute. Son candidat, le marquis de La Vieuville, noble d’épée de vieille
souche, avait depuis peu épousé la dot de Mademoiselle Beaumarchais, et son
beau-père trouvait délectable l’idée que son gendre pût être surintendant des
Finances, tandis que lui-même continuerait à veiller avec un soin attentif sur
le trésor de l’Épargne…
    Tout déplut à Louis dans un bargouin de cette farine, mais
la situation était désespérée. Il l’accepta de force forcée, mais à deux
conditions que tout autre financier eût trouvées insultantes : La
Vieuville n’était nommé que pour un an et chaque jour il devait rendre compte
de l’état des Finances au chancelier Brûlart de Sillery.
    Cette clause paraissait encore indiquer chez le roi un
certain degré de confiance à l’endroit du chancelier. Mais en fait il n’en
était rien. Mille indices, chaque jour, me prouvaient que Louis, ayant ouvert
les yeux sur les Brûlart, ne les refermerait pas, et qu’ils n’étaient guère
auprès de lui en odeur de sainteté. Un incident me le confirma qui prit la
forme absurde, comme souvent à la Cour, d’un conflit de préséance. Des fameuses
fleurs de lys que le comte de Soissons voulait sous Henri IV interdire à
la future duchesse de Vendôme de porter sur sa robe de mariée, jusqu’à la
serviette de table de Louis que se disputèrent âprement le comte de Soissons,
fils du précédent, et le prince de Condé, les exemples abondaient de ces
petites querelles qui passionnaient la Cour parce qu’elles cachaient en fait de
grandes ambitions.
    Or depuis l’édit de 1576 les cardinaux admis au Conseil des
affaires n’avaient plus la préséance sur les princes du sang. Mais
l’avaient-ils ou ne l’avaient-ils pas sur le chancelier ? Telle était la
gravissime question qu’on se posait. Le cardinal de La Rochefoucauld, qui avait
remplacé le cardinal de Retz au Conseil, prétendait que oui. Le chancelier
Brûlart de Sillery prétendait que non. La Cour se rangea en deux clans :
l’un pour le cardinal, l’autre pour le chancelier. Comme toujours Louis, aussi
circonspect en politique que téméraire sur le champ de bataille, ne se pressait
pas de prendre position.
    Le cardinal de La Rochefoucauld reçut une alliée de poids,
car la reine-mère se prononça pour lui et la Cour en fit des sourires et des
caquetages, tout un chacun entendant bien du reste qu’elle avait été chapitrée
là-dessus par un autre cardinal qui préparait son propre avenir. Louis ne me
demanda pas mon avis et, rétrospectivement effrayé par la balle qui était passée
si près de mes plumes après l’exil de Schomberg,
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