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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue
Autoren: Ildefonso Falcones
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Salve et les Commandements en
espagnol : les enfants maures, grâce aux leçons qu’ils recevaient du
sacristain ; les hommes et les femmes, à travers les cours de religion
qu’on leur donnait le vendredi et le samedi, et auxquels ils devaient assister
sous peine de se voir frappés d’une amende et d’une interdiction de mariage.
Lorsqu’ils prouvaient qu’ils connaissaient par cœur les prières, alors
seulement ils étaient exemptés de venir en classe.
    Pendant la messe, certains priaient. Les enfants, attentifs
au sacristain, le faisaient à voix haute, presque en criant, ainsi que le leur
avaient appris leurs parents qui, de cette manière, pouvaient tromper la
présence agitée du bénéficier et prononcer en cachette : Allahu Akbar. Beaucoup
le murmuraient les yeux fermés, en soupirant.
    — Au nom de Dieu, le Tout-Clément ! Délivre-moi de
mes défauts, de mes vices…, entendait-on dans les rangées des hommes dès que
don Salvador s’éloignait un peu.
    Mais il ne s’écartait pas beaucoup, comme s’il redoutait
qu’on le défie en invoquant le Dieu des musulmans dans le temple chrétien, au
cours de la grand-messe.
    — Au nom de Dieu, Souverain ! Guide-moi par ton
pouvoir…, s’exclama un jeune Maure plusieurs rangs derrière, couvert par le
tumulte du Notre-Père crié par les enfants.
    Don Salvador se retourna vivement.
    — Ô Miséricordieux ! Emmène-moi dans ta gloire…,
en profita pour implorer un autre homme depuis le côté opposé.
    Le bénéficier rougit de colère.
    — Au nom de Dieu, Miséricordieux ! insista un
troisième homme.
    Soudain, une fois la prière chrétienne terminée, l’âpre voix
du prêtre s’imposa de nouveau.
    — Loué soit Ton nom, put-on entendre ce jour-là depuis
un rang au fond.
    La plupart des Maures restèrent immobiles, droits et
impénétrables ; certains soutenaient le regard de don Salvador, la
majorité s’y dérobait ; qui avait osé louer le nom d’Allah ? Le
bénéficier passa brutalement entre les rangs, mais il ne put désigner le
sacrilège.
    En milieu de messe, sous l’œil vigilant de don Martín
toujours assis, le sacristain et le bénéficier, l’un avec le livre, l’autre
avec une corbeille, recueillirent les oboles des paroissiens : pièces de
maille, pain, œufs, lin… Seuls les pauvres étaient dispensés de faire des
dons ; si un riche ne donnait rien pendant trois dimanches, il recevait
une amende. Andrés consignait en détail qui donnait quoi.
    Lorsque retentit la « clochette de mort », comme
on appelait celle qui annonçait la consécration, les Maures s’agenouillèrent de
mauvaise grâce au milieu des démonstrations de piété des vieux-chrétiens. La
clochette de mort carillonna au moment où le prêtre, le dos tourné aux paroissiens,
levait l’hostie ; on l’entendit de nouveau quand, toujours de dos, il leva
le calice. Le prêtre s’apprêtait à dire les paroles sacramentelles quand, tout
à coup, courroucé par le bourdonnement qui agitait l’église, il se retourna
vers les fidèles, le visage furieux.
    — Chiens ! cria-t-il.
    L’imprécation éclaboussa de salive le verre sacré.
    — Que signifient ces murmures ? Taisez-vous,
hérétiques ! Agenouillez-vous comme il se doit pour recevoir le Christ, le
seul Dieu ! Toi ! – Son index désigna un vieil homme au
troisième rang. – Redresse-toi ! N’essaie pas d’idolâtrer ton faux
dieu. Regardez ! Levez les yeux lorsqu’on vous offre le saint
sacrement !
    Son regard foudroya deux Maures de plus avant de continuer.
Puis, hommes et femmes vinrent en silence manger « le pain ».
Beaucoup s’efforçaient de conserver la pâte de blé humectée dans leur bouche
afin de pouvoir la recracher chez eux ; tous les Maures, sans exception,
faisaient ensuite des gargarismes pour se débarrasser des restes.
    Les gens quittèrent l’église après la bénédiction de
paix ; les chrétiens la reçurent avec dévotion ; les autres, plus
nombreux, se signèrent à l’envers pour abuser le prêtre, affirmant en silence
l’unicité de Dieu et raillant la Sainte-Trinité, qu’ils devaient invoquer en
faisant le signe de croix. Les Maures se dépêchèrent de rentrer chez eux
recracher l’hostie. Les quelques chrétiens du village s’entassèrent aux portes
de l’église pour discuter, indifférents aux insultes proférées par leurs
enfants à la vieille femme qui, ayant fini par tomber de l’échelle, était
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