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Les Poilus (La France sacrifiée)

Les Poilus (La France sacrifiée)

Titel: Les Poilus (La France sacrifiée)
Autoren: Pierre Miquel
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que le régiment de marche de la Légion étrangère (neuf citations). Quatre régiments de zouaves basés en Afrique du Nord, trois de tirailleurs et un mixte de zouaves et de tirailleurs avaient eu les honneurs de la fourragère rouge, avec le bataillon des fusiliers marins de Dixmude et cinq de chasseurs à pied. Quatre régiments d’infanterie métropolitaine seulement, ceux de Langres, Toul, Bourg et Fontainebleau, avaient été jugés dignes d’une telle récompense, avec le 43 e d’infanterie coloniale. Une élite de l’armée s’était dégagée de la masse des divisions ordinaires au combat, venue très largement de l’outre-mer. Elle avait payé le prix le plus fort.
    Plusieurs classes d’âge avaient disparu, ou étaient réduites à l’état d’invalides. Per Jakez Hélias racontait que les poilus bretons, pour garder le prix du billet de train, rentraient chez eux à pied. La pénurie d’hommes était telle dans les fermes qu’ils étaient reçus à bras ouverts, invités plusieurs jours à partager les repas familiaux, avec les jeunes filles de la maison, et lâchés à regret. La fécondité française, déjà faible avant la guerre, était amputée de sa jeunesse.
    Les pertes allemandes étaient plus fortes, mais inférieures aux pertes françaises, au regard du total de la population : 1 950 000 morts, sans compter les mutilés et les disparus. La grande Allemagne du Kaiser avait sacrifié ses adolescents dans une guerre inexpiable, où Ludendorff avait fini par lever la classe des dix-huit ans. Les Allemands étaient morts sur tous les fronts, de Russie en Orient, de France en Italie. Jusqu’au dernier moment la discipline prussienne avait maintenu le silence dans les rangs et l’obéissance aux ordres, en dépit de la lassitude. Le soldat allemand s’était révélé aussi efficace dans la retraite que dans l’offensive, et les Stosstruppen décimées s’étaient unies aux vieilles troupes encore valides des régiments d’élite de l’ancienne Prusse, de la garde du Kaiser, pour retarder l’avance alliée, comme l’avait exigé l’état-major.
    Non seulement les soldats n’étaient pas déshonorés par une capitulation en rase campagne, mais ils étaient attendus au pays pour rendre un dernier service. Quand le régime s’était écroulé, leur retour avait été salué comme une délivrance par tous ceux qui redoutaient l’extension de la révolution bolchevique, à commencer par les militants sociaux-démocrates et par les députés du Centre catholique. Les bourgeois décoraient leurs maisons de banderoles célébrant « les héros du front ». Ils rentraient dans les villes de garnison dans une ambiance de fête. Comment Wilson pourrait-il expliquer à la nouvelle Allemagne restée douloureusement patriote que le militarisme était un péché ?
    Il serait difficile aux Alliés de désarmer les Allemands du front de l’Est. Pendant les négociations du Conseil de la paix à Paris, ils se hâtaient d’expédier à Dantzig les deux divisions polonaises du général Haller pour tenter de rendre inutile la présence armée des Feldgrau sur la ligne de résistance au bolchevisme. Dans cet esprit, Wilson accepterait le principe d’une occupation de l’Allemagne rhénane, qui permettrait aux troupes alliées de secourir la population et de prévenir la révolution.
    Les troupes allemandes avaient abandonné l’Ukraine et les territoires russes, mais des corps francs étaient longtemps tolérés par les Alliés qui avaient limité, au traité de Versailles, à 100 000 hommes les effectifs de l’armée allemande. Le mémoire du général Groener, chef de l’état-major général allemand, faisait encore état, le 17 juin 1919, quelques jours avant la signature du traité, d’une force opérationnelle de 389 000 hommes. L’armistice n’avait pas limité immédiatement les effectifs de l’armée allemande. Il avait désarmé et consigné la marine, mais établi à 5 000 canons seulement et à 25 000 mitrailleuses et 5 000 camions le chiffre des livraisons nécessaires. Les Allemands gardaient donc un armement suffisant pour combattre les bolcheviks à l’intérieur comme à l’extérieur.
    Comment pouvaient-ils se présenter comme les champions de la contre-révolution dans l’Est alors qu’ils avaient constamment aidé les bolcheviks en Russie ? Le 8 août 1918 encore, ils avaient volé à leur secours. Les blancs avaient alors pris Kazan. Les Tchèques
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