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Les hommes perdus

Les hommes perdus

Titel: Les hommes perdus
Autoren: Robert Margerit
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bien capable, quoi que tu en penses, de réussir. Selon moi, l’affaire demeure, pour le moment, entre Crêtistes et Thermidoriens. »
    Le 7 Germinal, Claude ne fut pas surpris de voir le Carrousel envahi par une cohorte de ménagères racolant toutes les passantes pour se grossir. La manœuvre débutait de la sorte. Quand il traversa la cour du Palais national, elles menaient grand tapage devant les arcades dont la garde leur refusait l’entrée.
    Dans la salle de la Convention, Barère se trouvait à son tour en butte aux ardeurs vengeresses des Dantonistes. Il s’était défendu d’avance par une brochure, Les Alors, où lui aussi déclarait l’action des Comités indissociable des votes de l’Assemblée : Alors Danton s’écriait… Alors la Convention décrétait… Il développait à présent ce thème. Claude arrivait en retard, étant allé à Neuilly embrasser sa femme et son fils. Il s’assit juste à point pour entendre Legendre répliquer durement à Barère : « Espères-tu, toi aussi, te décharger sur les morts ? Est-ce donc Danton qui a dit : «  Portons la terreur à l’ordre du jour » ? C’est toi, à cette tribune même.
    — Quelquefois, avoua Barère embarrassé, l’enthousiasme révolutionnaire a pu nous faire dévier de la ligne géométrique ; mais, quand nous avons reconnu notre erreur, nous l’avons réparée.
    — Tes « carmagnoles » entraient-elles dans la ligne géométrique ? lui jeta André Dumont. Était-il dans la ligne géométrique d’envoyer Danton au Tribunal de sang ? »
    Barère répondit que l’accusation contre Danton n’avait pas été concertée par le Comité de Salut public, mais seulement par Saint-Just et Robespierre, lequel avait fourni au jeune homme les éléments de son rapport. « Et vous, ajouta-t-il avec plus de justesse, qu’avez-vous tenté pour défendre Danton le 11 Germinal ? Hormis Legendre, personne ici n’a osé seulement élever la voix ! »
    Le président interrompit les débats en annonçant, après avoir agité sa sonnette : « Une délégation de citoyennes demande à être entendue. Voulez-vous la recevoir ? » On acquiesça. Vingt femmes furent introduites par la porte des pétitionnaires. Une de ces citoyennes, personne fort délurée, s’avançant vers la barre, prit la parole au nom de ses compagnes pour se plaindre de n’avoir reçu qu’une demi-ration de pain. Comme Thibaudeau voulait répondre, elles se mirent toutes à crier : « Du pain ! Donnez-nous du pain ! » Boissy d’Anglas n’eut pas plus de succès en déclarant qu’un convoi venait d’arriver ; la seconde partie de la ration serait distribuée ce soir. Elles écoutèrent un instant puis recommencèrent leur vaine clameur, reprise en chœur par les patriotes des tribunes et des gradins. C’était évidemment un coup monté ; si ces femmes désiraient tant du pain, elles n’avaient qu’à se rendre dans les boulangeries, au lieu de rester à piailler comme des volailles. Thibaudeau ordonna aux huissiers de les faire sortir, et l’on revint au procès.
    L’absurdité de cette interminable dispute, qui renouvelait, à trois ans de distance, la folie des Girondins attaquant sans fin Marat, Robespierre et Danton, exaspérait Claude malgré sa patience. Tout était odieux et faux dans la querelle, les défenses aussi bien que les accusations. Carnot avait déformé la vérité pour se tirer d’affaire. Barère, lui, avec son adresse hypocrite, mentait carrément. Claude aurait voulu dire à la Convention : « Oui, Robespierre a effectivement fourni à Saint-Just les détails du rapport sur les Dantonistes, mais en lui recommandant la clémence, et après avoir mainte fois refusé à Billaud-Varenne, à Collot d’Herbois, la mise en accusation de Danton et de Camille Desmoulins. C’est Collot, Billaud, Amar, Vadier, Voulland qui la lui ont finalement imposée. Saint-Just non plus ne souhaitait pas la mort de Danton ni de Camille. Robespierre et Saint-Just n’entendaient point les traduire devant le Tribunal révolutionnaire, mais devant vous. Ce sont encore Billaud, Collot et ces trois membres du Comité de Sûreté générale qui ont arraché au Comité de Salut public et à celui de législation l’arrestation immédiate. Rappelez-vous les paroles de Billaud lui-même, à cette tribune, le 9Thermidor : Robespierre s’est opposé avec acharnement à l’arrestation de Danton ; sans nos efforts, à Collot et à moi,
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