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Les hommes naissent tous le même jour - Crépuscule - Tome II

Les hommes naissent tous le même jour - Crépuscule - Tome II

Titel: Les hommes naissent tous le même jour - Crépuscule - Tome II
Autoren: Max Gallo
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Wehrmacht. »
    Karin s’était contenue, raide, les bras croisés, elle baissait la tête, ne répondait pas à Ernst Klein qui pérorait, lui demandait d’être fière. Il avait longuement parlé avec Dietrich, lui avait conseillé l’école des officiers de la Luftwaffe, il avait ri : « La guerre sera peut-être finie avant, puisque tout va si vite. » Karin l’avait raccompagné et sur le seuil, elle avait dit, la tête droite, le regard cherchant les yeux d’Ernst : « Général, je ne suis pas fière des morts. Ceux que j’aime, je veux les garder vivants. » Elle s’était détournée et parce qu’il claquait la porte, elle sut qu’elle l’avait atteint.
    — Karin.
    Karl lui effleurait l’épaule. Elle sursautait.
    — Tu pars, disait-elle en souriant. Tu as vu Dietrich ?
    — Je lui ai dit de te surveiller, disait Karl. Repas pris régulièrement, moral, je l’ai nommé officier-intendant de cette maison.
    Elle l’aidait à passer sa capote. Il coiffait sa casquette. L’ordonnance attendait sur le palier, joignant bruyamment les talons quand la porte s’ouvrait. Karin continuait de parler puis tout à coup elle s’interrompait, se laissait aller contre la poitrine de Karl. Elle reconnaissait l’odeur de laine, l’odeur de la guerre.
    La guerre, écrivait Allen Roy Gallway, a en septembre 1939, en Pologne, une nouvelle fois changé de visage. J’ai vu, comme je l’avais vu en Espagne, des hommes mourir. J’ai subi à Varsovie, comme je les avais subis à Barcelone, les bombardements aériens, mais, je n’avais jamais entendu le grincement que font des dizaines de chenilles de tanks avançant de front à près de soixante kilomètres à l’heure. Un millénaire séparait les cavaliers polonais de ces machines d’acier lancées dans les plaines de l’Europe orientale.
    Dans quelques mois, dans quelques semaines peut-être, ces armées tourneront leurs tourelles, leurs lunettes de visée et leurs canons vers l’Ouest. Il suffit de lire dans les journaux allemands les listes de promotion, les messages de félicitation de Hitler à son armée, pour découvrir qu’une nouvelle génération d’officiers supérieurs a vu le jour dans le III e  Reich. Ces généraux, Rommel ou Guderian, ces colonels Menninger, qui ont quarante ans, sont des aventuriers de la stratégie. Les vieux généraux français ou anglais, dont certains étaient déjà à l’âge de la retraite en 1914, pourront-ils s’opposer à ces hommes jeunes qui – tel Menninger ou Rommel – conduisent eux-mêmes les vagues d’assaut…
    Allen repoussa la machine à écrire. Voilà qui ne ferait pas plaisir aux Français, peut-être Serge Cordelier pourrait-il comprendre. Il y a un an, chez lui, à Cabris, au Mas Cordelier, il avait montré à Allen ces photos de panzers qui roulaient dans la campagne prussienne. Serge craignait le pire.
    Un an. Premiers jours de janvier 1939, de belles journées ensoleillées, la Corse qu’Allen apercevait à l’horizon depuis les planches d’oliviers situées en contrebas du Mas Cordelier. Sarah Berelovitz, à l’une des fenêtres du mas, au-dessus du porche, appelait Allen, lui jetait une lettre : « D’Amérique, de New York », criait-elle. Allen avait cru un instant que Tina lui annonçait sa venue, mais ce n’était que les vœux pour l’année nouvelle et une photo de Tina avec Bowler, et entre eux, l’enfant, Jorge.
    Un an passé. Les événements broyant les jours, l’accord entre Staline et Hitler, Sarah qui faisait une moue de dégoût.
    « … Si je vous disais, Allen, qu’un moment j’ai travaillé pour les Russes, pour Staline. »
    Allen souriait, serrait Sarah contre lui :
    « … Je sais, Sarah, disait-il, je sais. Ils ont même essayé de vous tuer à Barcelone, j’ai compris ça. »
    « … J’ai honte maintenant, disait Sarah, honte. »
    « … C’est de la colère qu’il faut », répondait Allen.
    Pour la distraire, il se penchait vers elle, montrait une jeune femme au profil régulier, c’était une soirée d’août, le rouge sur Paris, la Seine encore bruissante d’éclats dorés, et les fenêtres de l’appartement de Sarah, quai de Béthune, étaient grandes ouvertes, les tentes de toile baissées, la jeune femme avait le visage teint par cette lumière ocre, ce crépuscule.
    — Catherine ? interrogeait Sarah.
    Allen, discrètement, désignait du doigt la jeune femme immobile.
    — Catherine Jaspars, la fille de
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