Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles
Autoren: Michel David
Vom Netzwerk:
travailler.
    – Est-ce qu’il
va manger avec vous, monsieur le curé ? demanda la vieille dame.
    – Non
madame. Installez-le sur un coin de table dans la cuisine. Perdez-le pas de vue
quand il sera ici et gardez-le en dedans juste le temps des repas.
    Sur
ces mots, le prêtre prit la direction de son bureau. Depuis la veille, il ne
cessait de se demander si le mauvais coup de l’adolescent n’était qu’une
mauvaise blague d’un chenapan ou un geste malicieux suggéré par Eugène Tremblay,
qui détestait Ernest Veilleux et son clan. Il ne possédait aucune preuve contre
le voisin de son cousin, mais son intuition lui disait qu’il n’était
probablement pas tout à fait étranger à l’affaire.
    – Probable
que toute la paroisse s’en doute, dit Antoine Lussier à mi-voix en fermant la
porte de son bureau derrière lui. Mais je suis pas pour en parler à Ernest. Il
va encore s’énerver comme un pou et
prendre le mors aux dents. Je suis tout de même pas pour mettre le feu aux
poudres dans la paroisse pour cette histoire-là.
    Non, le
curé Lussier ne ferait rien de tel, mais il saurait bien faire payer le prix de
cette humiliation à l’endroit de son vicaire, s’il découvrait un jour que
Tremblay était derrière tout ça.

Chapitre 2
Le pont
    Une
dizaine de jours plus tard, la température était devenue un peu plus fraîche. En
ce mercredi avant-midi, le ciel charriait de lourds nuages gris poussés par un
petit vent du nord, ce qui n’annonçait rien de bon.
    Ce matin-là, Marthe
Giguère sursauta violemment en voyant une figure inconnue apparaître à l’une
des fenêtres de l’étable où elle était occupée à nourrir les veaux.
    – Mon
Dieu, que j’ai eu peur ! s’exclama-t-elle en lâchant le seau de lait frais
qu’elle présentait à un jeune veau. Qu’est-ce que vous voulez ?
    Le
visage disparut momentanément pour réapparaître un instant plus tard à la porte
de l’étable, qu’on venait de pousser. Il appartenait à un homme de taille
moyenne vêtu d’un strict costume noir, le cou enserré dans un large col en
celluloïd. Son nez assez imposant était garni de lunettes à monture d’acier. L’homme
retira poliment son chapeau, découvrant une large calvitie.
    – Excusez-moi
de vous avoir fait peur, madame, mais je cherche monsieur le maire. Est-ce que
je suis bien chez Wilfrid Giguère ?
    Se
rendant compte qu’elle avait affaire à un homme bien éduqué et non à un maraudeur,
la femme blonde d’une quarantaine d’années s’avança vers l’inconnu en s’essuyant
les mains sur son large tablier.
    – Il y a pas
d’offense. Vous êtes bien à la bonne place. Mon mari est dans la remise à côté
en train de réparer un attelage.
    – Merci, madame,
fit l’homme en refermant la porte.
    Durant
une seconde, il sembla chercher du regard l a porte
de la remise voisine et il s’avança prudemment entre les mares laissées par la
pluie abondante de la nuit précédente. La porte s’ouvrit au moment où il allait
frapper. Un grand homme maigre à la chevelure poivre et sel clairsemée le
dévisagea, attendant de toute évidence qu’il se présente.
    – Bonjour, monsieur
le maire. Je pense que votre député vous a annoncé ma visite. Alcide Gauthier, du
ministère de la Voirie, dit l’homme en tendant la main.
    – Ça fait une
éternité que j’ai pas vu Hormidas Joyal, fit Wilfrid Giguère en serrant la main
tendue. La dernière fois, c’était au début de juin.
    – Il
vous a pas dit que je viendrais vous voir ? demanda le fonctionnaire, surpris.
    – N… non, pas
que je me souvienne.
    – Il vous a
pas parlé du pont ?
    – Ah
oui ! J’y suis. On est en 1922 et on nous parle d e ce pont-là depuis vingt ans. À chaque élection, on nous le
promet. Puis, plus personne en parle j usqu’aux
élections suivantes.
    – Ça a tout l’air que ça pourrait
bien changer, répliqua l’homme en prenant une pose avantageuse.
    – Êtes-vous
en train de me dire, vous, que Taschereau se prépare à aller en élection ?
railla le maire, narquois. Il vient à peine de remplacer Lomer Gouin.
    – Moi, j’annonce
rien, se défendit l’autre en éclatant de rire. Tout ce que je sais, c’est qu’on
a l’air de croire que vous votez du bon bord et qu’on tient à ce que ça
continue.
    – Vous saurez
que je fais plus que voter du bon bord. J’ai travaillé pas mal pour les rouges
aux dernières élections, expliqua le maire, en bombant le
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher