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L'envol des tourterelles

Titel: L'envol des tourterelles
Autoren: Arlette Cousture
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belle et pouvait pardonner. Maintenant, il savait qu’il n’avait tué personne.
    Nicolas le rejoignit et s’assit près de lui, le força à replier ses jambes pour qu’elles ne soient pas heurtées ou écrasées par une automobile, lui passa un bras autour du cou et pleura avec lui toutes les peurs de sa dernière année et sa joie d’avoir déterré un mort dont il ne savait pas grand-chose si ce n’est qu’il le réhabiliterait aux yeux de sa famille et lui permettrait de rentrer avec la certitude de ne pas avoir perdu son temps et de ne pas avoir fait grisonner son père inutilement.
    Nicolas invita son père dans sa piaule, qui consistait en une minuscule pièce sans eau et sans fenêtre, n’ayant qu’un puits de lumière que la saleté de la ville avait opacifié à un point tel que seule la nuit était véritablement belle à reconnaître puisqu’elle faisait disparaître la tristesse de la crasse par le velouté de son encre noire. Jan aurait voulu s’émouvoir des terribles conditions de vie de son fils, mais celui-ci s’en chargea lui-même, parlant pendant des heures de ses rêves déçus, de ses désillusions. Jan fit de grands efforts pour ne rien perdre des paroles de Nicolas, car le fait de savoir Adam tout près lui encombrait presque tout le cœur. Ce jour était si rempli et si indigeste qu’il demanda où étaient les W-C. et alla vomir toute sa nervosité. Nicolas lui servit un thé dans la seule tasse qu’il avait et raconta qu’il était parti dans l’intention de refaire le périple de son oncle.
    – Comment va-t-il?
    – Bien. Et Stanislas est retourné là-bas pour travailler avec lui.
    Nicolas laissa cette nouvelle faire son chemin, puis continua à raconter son périple.
    – La Pologne, c’était le rêve. Ce l’est encore, mais j’aimerais y aller avec toi.
    – Pour la langue?
    – Oui, c’est certain, mais surtout pour situer tes souvenirs.
    – Qu’est-ce que tu fais ici?
    – Ici, on parle français. Je ne suis pas Stanislas ou Sophie, moi. Je ne parle pas trois langues.
    Jan aurait voulu connaître les raisons qui avaient empêché son fils de communiquer avec eux, mais il n’osa le questionner, savourant chaque seconde de cette nuit et ne voulant pas le heurter.
    – Comment va maman?
    – Je pense qu’elle va mieux depuis que je lui ai dit que je venais te retrouver.
    – Est-ce que je lui ai donné des cheveux gris, à elle aussi?
    – Oui, et quelques petites rides autour de la bouche, et des cernes sous les yeux.
    – Vous devez me détester.
    – Non, jamais. Nous nous sommes inquiétés et interrogés, c’est tout.
    – Tout ce qui est arrivé est la faute de Stanislas. Et heureusement, parce que, d’abord, sans Stanislas, je ne serais jamais venu à Paris, et ensuite, sans Stanislas, je n’aurais jamais reconnu ton frère. Élisabeth le disait, aussi, que Stanislas ressemblait plus à Adam que toi à Jerzy. Elle avait 1’œil.
    – Élisabeth a eu une petite fille.
    – Une autre violoniste à l’horizon.
    – Probablement pas, Nicolas. La fille d’Élisabeth est sourde.
    Le visage de Nicolas se décomposa comme s’il venait d’entendre la pire des nouvelles. Il se précipita dans les bras de son père et recommença à pleurer, mais, cette fois, il lui demanda de lui pardonner, conscient qu’il avait contribué à précipiter sa famille en enfer.
    Nicolas ne voulut pas accompagner son père, sentant qu’il était préférable que celui-ci se retrouve seul face à son passé et à cet intolérable et indescriptible présent. Il lui indiqua toute la routine d’Adam et Jan se rendit chez ce dernier après ses heures de cours, soit à vingt et une heures.
    – Je t’attends ici, papa. Si tu as des problèmes, viens me chercher.
    Jan sonna à la porte et, le cœur battant, la main serrée sur les cordes du violoncelle de son père, il écouta les pas qui s’approchaient et prit conscience qu’il ne pourrait plus prier son frère. La porte s’ouvrit et il ne put prononcer une seule parole pendant une bonne minute, dérouté par la similitude entre le regard d’Adam et celui de Stanislas.
    – Pardonnez-moi. Je voudrais prendre des renseignements sur les cours que vous donnez...
    – Entrez, je vous en prie.
    Jan entra dans un petit studio avec des poutres au plafond. À l’extrémité gauche, une cuisine incroyablement minuscule, et il devina que la salle de bains était derrière la porte fermée, entre la cuisine et la porte d’entrée.
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