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L'énigme des blancs manteaux

Titel: L'énigme des blancs manteaux
Autoren: Jean-François Parot
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tailles. Le lieutenant de police, grand habitué des lieux, s'y déplaçait avec aisance. Le désarroi du jeune homme n'avait d'égal que celui qui s'était emparé de lui lors de son arrivée à Paris, deux années auparavant. Les regards qu'il devinait posés sur lui, inconnu accompagnant un personnage redouté, accentuaient encore son malaise. Il se sentait engoncé dans un habit qu'il portait pour la première fois. L'idée folle le saisit que quelqu'un allait soupçonner que la commande avait été passée pour un autre que lui. Il ne distingua rien de l'itinéraire emprunté et se retrouva dans une vaste pièce au milieu d'une douzaine de personnes qui faisaient cercle autour d'un homme de haute taille, qu'un valet aidait à retirer un habit bleu galonné d'or 85 . L'homme quittait sa chemise et se faisaitessuyer. Un petit vieillard fardé et couvert de bijoux lui tendait la rechange. L'homme dictait quelques noms d'une voix morne à un huissier. Sartine poussa brutalement Nicolas du coude pour qu'il tire son chapeau. Il comprit alors qu'il se trouvait devant le roi. Il fut surpris des conversations qui continuaient à voix basse entre les quelques assistants présents. Un homme qu'il ne reconnut pas sur-le-champ s'approcha de lui et lui parla à l'oreille.
    — Je suis fort aise de vous revoir, monsieur. Vous voilà au débotté du roi. Mes compliments. Sa Majesté est en train de désigner ceux qui auront l'honneur de souper avec lui.
    Il salua aussi Sartine qui ne cacha pas son étonnement de voir Nicolas en pied d'amitié avec M. de La Borde, premier valet de chambre du roi. La mine de son chef réconforta le jeune homme. Il n'était pas le seul à éprouver des surprises. La voix du roi s'éleva.
    — Richelieu, dit-il en s'adressant au petit vieillard, j'espère que vous avez fait la paix avec d'Ayen au sujet de savoir qui, de vous ou de lui, doit placer au bal du manège. Consultez Durfort 86 .
    — Je me conformerai aux ordres de Votre Majesté. Cependant, Sire, puis-je faire observer...
    — Que la chasse n'était pas bonne, coupa le roi. Deux cerfs manqués à Fausse Repose. Un troisième réfugié dans l'étang aux biches. On a dû s'y reprendre à trois fois pour le tirer. Nous ne sommes guère heureux en ce moment.

    Le vieux maréchal salua en grimaçant. Le roi ayant achevé de se changer se dirigea vers un petit escalier et disparut aux yeux d'une assistance inclinée. Nicolas n'avait pas eu le temps d'éprouver d'émotion que déjà La Borde les entraînait.
    — Nous gagnons les petits appartements, luiexpliqua-t-il. Le roi veut entendre, dans le secret de ses cabinets et de votre propre bouche, le récit d'une certaine enquête. L'humeur n'est pas bonne aujourd'hui, la chasse n'a pas réussi à faire oublier les soucis. Mais ne craignez rien, tout se passera bien. Parlez avec assurance, sans timidité, car si vous hésitez, le roi se refermera. Soyez plaisant sans être long, mais suffisamment pour soutenir l'intérêt. Le roi est bienveillant dans son intérieur, surtout avec la jeunesse.
    Ils se retrouvèrent dans une antichambre assez basse de plafond, puis traversèrent une galerie décorée de grands tableaux. La Borde expliqua que le roi avait souhaité voir illustrer le thème des chasses exotiques. Il y avait représentés là des animaux et des personnages de contrées lointaines que Nicolas n'avait jamais eu l'occasion de voir 87 . Un valet les fit entrer dans un salon lambrissé en partie de boiseries blanches rehaussées d'or. La pièce donnait une impression d'équilibre heureux. Assis sur un fauteuil de damas rouge, le roi buvait un verre de vin qu'une dame venait de lui verser. Ils s'inclinèrent tous, le chapeau à la main. Le roi leur fit un petit geste. La femme tendit la main à Sartine, s'assit à son tour et répondit d'une noble inclinaison au salut des autres arrivants.
    — Alors Sartine, demanda le roi, comment va votre ville ?
    Le lieutenant général de police déféra à la question du monarque et la conversation s'engagea. Nicolas se sentait étrangement serein. Il ne parvenait pas à croire qu'il se trouvait devant son souverain. Il voyait un homme de belle allure, à la silhouette dégagée, avec un regard doux accentué par la grandeur des yeux. Ce regard ne s'arrêtait pas sur les assistants, mais fixait le plus souvent le vide. Du visage, au front dégagé, émanait une grande dignité. L'âge et lafatigue se lisaient pourtant dans les bouffissures et
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