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Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Titel: Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS
Autoren: Boris Thiolay
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Prologue
    Les maternités devaient donner le jour à des enfants « parfaits », grands, blonds, aux yeux bleus. Erwin, Gisèle, Walter, Georges, Christiane et tous leurs petits semblables, qui y sont nés et auxquels ce livre est consacré, sont aujourd’hui à l’âge de la retraite. Ils ont « fait » leur vie : la plupart d’entre eux se sont mariés, ont eu des enfants à leur tour. Mais ils restent marqués de manière indélébile par le sceau de leurs origines. Un secret qu’ils ont découvert sur le tard, le jour où une mère vieillissante a brisé le tabou. Ou bien lorsqu’ils ont pu enfin consulter, à partir des années 1990, leur dossier personnel à l’Assistance publique. Ce secret, celui de leur naissance, renvoie à l’un des projets les plus terrifiants entrepris par les nazis : créer une « race supérieure de Germains nordiques », qui devait constituer la future élite d’un Troisième Reich censé durer 1 000 ans… Pour y parvenir, des nurseries spéciales – les Lebensborn (Fontaines de vie, en vieil allemand) – furent conçues, administrées et gardées, entre 1935 et 1945, par la Schutzstaffel (escadron de protection), autrement dit la SS, l’organisation la plus redoutable de l’appareil d’État National-socialiste.
    Ces maternités accueillaient des femmes enceintes de membres de la SS. Très souvent, ces femmes étaient des filles mères souhaitant accoucher dans l’anonymat. Les deux parents, soumis à des examens médicaux et à une sélection rigoureuse, devaient correspondre aux critères de pureté raciale « aryenne » définis par le régime hitlérien. Les enfants illégitimes pouvaient être abandonnés au Lebensborn  : toutes les traces de leurs origines étaient alors effacées, du nom des parents au lieu de naissance. Seuls les responsables de l’organisation connaissaient leur véritable ascendance, consignée dans un registre d’état civil confidentiel qui ne fut jamais retrouvé. Seule importait l’apparence physique de ces bambins destinés à grossir les rangs d’une légion programmée pour changer la face du monde…
    L’idée de partir à la recherche des enfants du Lebensborn m’est venue au début de l’année 2008, à l’occasion d’un reportage en Allemagne. Quelques mois plus tôt, le Service international de recherches (SIR) de la Croix-Rouge avait ouvert ses archives aux historiens et à la presse. Par cet intermédiaire, j’avais pu relater dans L’Express , une autre histoire singulière : celle de Français qui, à la mort de leur père, avaient découvert que ce dernier avait eu un enfant caché, pendant la Deuxième Guerre mondiale. Prisonniers ou travailleurs réquisitionnés en Allemagne, ces hommes, certains célibataires, d’autres déjà pères de famille, avaient tout simplement rencontré une jeune femme, à la ferme ou à l’usine où ils étaient affectés. Des petits « bâtards » étaient nés de ces amours interdites. La paix revenue, les Français étaient rentrés chez eux, avaient repris le cours de leur vie, rechignant à évoquer ces années sombres. Mais, soixante ans plus tard, grâce à ce service de recherches de la Croix-Rouge, leurs enfants avaient pu retrouver un demi-frère ou une demi-sœur dont ils avaient toujours ignoré l’existence.
    Depuis 1946, le SIR est établi à Bad Arolsen, une ville de 16 000 habitants, à l’architecture baroque, dans la campagne du Land de Hesse. À l’intérieur de six bâtiments quasi anonymes, qui abritaient auparavant une caserne de la Gestapo, est conservé le plus gros fonds documentaire au monde concernant les victimes du régime nazi : déportés, prisonniers politiques, travailleurs esclaves, familles séparées, enfants déplacés, etc. Au total, 50 millions de références, qui concernent 17,5 millions de personnes. Le long de vingt-six kilomètres de linéaires, au fil de lourdes armoires de métal coulissantes, se dessine la géographie de l’horreur – Dachau, Drancy, Belzec, Treblinka, Auschwitz… Avec une maniaquerie administrative glaçante, les nazis notaient tout : le nombre de poux sur chaque détenu ou le décompte de plusieurs dizaines de déportés fusillés, à deux minutes d’intervalle, au camp de Mauthausen, le 20 avril 1942, pour célébrer l’anniversaire de Hitler…
    À Bad Arolsen, le visiteur est prié d’enfiler des gants de coton blanc pour manipuler les feuillets de papier jaunis par le temps.
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