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Le temps des poisons

Le temps des poisons

Titel: Le temps des poisons
Autoren: C.L. Grace
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multiples reliques saintes pendues aux poutres de la chambre, éloigneraient les diables.
    Contrarié, Louis fit la grimace. Il pensait avoir pris un poisson, pourtant sa canne était lâche à présent, comme tant de choses dans la vie. Il changea de position avec nervosité, éperons tintinnabulant, et examina le fleuve. La brume se levait. La journée s'annonçait belle même si la saison déclinait. Il pouvait déjà distinguer des taches d'or dans la verdure. La brise matinale était froide mais elle tomberait avec le lever du soleil. De toute façon, il avait bien assez chaud. À sa droite et à sa gauche brûlaient des braseros à calotte dont les ardents charbons rouges et crépitants sifflaient parfois quand des gouttes d'eau les éclaboussaient à travers la grille.
    Le roi assouplit ses doigts engourdis. Toujours prêt à quitter sa barge et à sauter à cheval pour affronter un danger ou un rebelle, il portait bottes et éperons. Il était vêtu de sa robe grise habituelle, fourrée d'agneau blanc, et d'un capuchon de moine. Sur ce dernier il avait posé un grand chapeau à large bord alourdi par les nombreux médaillons d'argent représentant ses saints favoris qu'on y avait solidement cousus. Louis prit un morceau de fromage et mâcha à grand bruit. Il avait passé la journée précédente à élaborer des stratagèmes avant de partir pour un château du voisinage où des envoyés venus d'Espagne lui avaient apporté des porcs à la peau rouge, ainsi que moult chardonnerets, pies, tourterelles, et deux lévriers équipés de colliers en cuir de Lombardie et de laisses en peau de loup. Louis souffla et son haleine flotta dans l'air du matin. En aval, dans la brume, sa garde personnelle peuplait ses navires et, sur chaque rive, des troupes de la cavalerie normande marchaient de pair avec la barge royale, la Gloire des Lys. Louis entendit des cris et un léger choc au moment où un bateau accostait le sien. Il sourit. Ses visiteurs étaient arrivés. Il tendit sa canne à pêche à un valet.
    — Tiens-la bien, le prévint-il. Et si un poisson mord, tire d'un coup sec.
    Ses éperons tintant, le chapelet de nacre cliquetant et scintillant autour de son cou, le roi se dirigea vers les marches bordées de cuir qui menaient à la cabine royale. La pièce bénéficiait d'une fenêtre percée en hauteur sur chaque mur. Ces derniers, quant à eux, étaient couverts d'épaisses tentures tissées de couleurs vives - rouges flamboyants, bleus profonds, or resplendissant - dépeignant la vie des saints ancêtres du monarque. Le bois du plancher était ciré et, pour lutter contre le froid, on y avait jeté des peaux d'ours et de loup.
    Un scribe royal, assis sur une sellette, recopiait la missive que Louis lui avait dictée juste après avoir assisté à sa troisième messe. Le roi ôta ses gants et tendit les mains au-dessus d'un plateau de braises incandescentes. Il faisait encore froid céans.
    —
    Envoyez une lettre au trésorier, ordonna-t-il. Dites-lui de m'apporter une peau d'animal comme celle que l'évêque de Valence m'avait offerte. Elle me couvrait tout le dos et je pouvais aussi la déployer sur la croupe de mon cheval.
    Il tapota le bout de son nez pointu.
    —
    Quand il pleuvait, reprit-il, je n'avais pas besoin d'une chape et quand il faisait chaud elle était aussi fraîche que la brise. Avez-vous compris ?
    Le scribe acquiesça.

    —
    Parfait ! s'écria le roi en claquant des mains. Allez donc chercher mes hôtes et conduisez-les ici.
    Il se dirigea vers le trône placé sur une petite estrade installée au bout de la salle sous un dais bleu arborant les fleurs de lys dorées. Il s'installa et s'emmitoufla dans sa couverture en peau d'agneau. Il avait pêché trop longtemps et était transi ! La porte s'ouvrit et trois hommes firent leur entrée. Ils restèrent un instant dans l'ombre avant d'avancer. Ils portaient tous des bottes, des éperons et d'épaisses capes militaires sur les épaules. S'approchant de l'estrade, ils repoussèrent leurs capuchons et mirent un genou à terre. Louis les laissa agenouillés le temps de les observer. Le rousseau, de petite taille, qui se trouvait au milieu, était le vicomte de Sanglier, émissaire personnel du roi en Angleterre.
    —
    Avez-vous fait bon voyage, Messire le vicomte ? questionna Louis en se penchant.
    L'envoyé leva son visage pâle aux yeux verts cernés de rouge, à la moustache et à la barbe rousses taillées avec soin. Le souverain remarqua
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