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Le Signe rouge des braves (Un épisode durant la guerre de Sécession)

Le Signe rouge des braves (Un épisode durant la guerre de Sécession)

Titel: Le Signe rouge des braves (Un épisode durant la guerre de Sécession)
Autoren: Stephen Crane
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vacarme des plus effrayant. Le bruit était indescriptible. Ayant provoqué ce prodigieux tintamarre, et apparemment l’ayant trouvé trop excessif, la brigade, après un moment, ressortit du bois le pas léger, en gardant sa belle formation pas le moins du monde dérangée. Il n’y avait pas trace de hâte dans ses mouvements. La brigade joyeuse, elle paraissait tendre fièrement le poing vers le bois qui hurlait.
    Sur une élévation vers la gauche, il y avait une longue rangée de canons, rébarbatifs et hystériques, dénonçant l’ennemi, qui, en bas dans la forêt, se mettait en formation pour une autre attaque… L’impitoyable monotonie de tout conflit. Les décharges rondes et furieuses des canons donnaient des flammes pourpres et une grande et épaisse fumée. On pouvait avoir quelques brefs aperçus de groupes d’artilleurs très occupés. Derrière cette rangée de canons, une maison se tenait debout, blanche et calme, au milieu des obus qui explosaient. Des chevaux groupés et attachés à une longue barrière, tiraient frénétiquement sur leurs brides. Des hommes couraient ça et là.
    La bataille isolée entre les quatre régiments dura un bon moment. Le hasard fît qu’ils poursuivirent, seuls, leur dispute, aucune intervention extérieure ne s’étant manifestée. Pendant quelques minutes ils se donnèrent des coups forts et sauvages, puis les régiments aux teintes plus claires flanchèrent et se retirèrent, laissant les lignes bleu sombre poursuivre leurs tirs. L’adolescent pouvait voir les deux drapeaux comme secoués par un rire parmi les restes de fumée.
    À présent il y avait une accalmie chargée de menaces. Les lignes bleues firent mouvement, et changèrent quelque peu leur position ; et dans l’expectative, firent face aux bois silencieux et aux champs qui s’étendaient devant eux. Le silence était solennel et sacral, excepté une batterie distante qui, de toute évidence, incapable de rester tranquille, envoyait son faible roulement de tonnerre par-dessus le terrain. Cela irritait comme le bruit que feraient des gamins que rien n’impressionne. Les hommes s’imaginaient que cela empêcherait leurs oreilles aux aguets d’entendre les premiers bruits de la prochaine bataille.
    Subitement les canons sur les positions élevées rugirent des mises en gardes. Un bruit de rafales commençait à s’entendre dans les bois. Il augmenta avec une étonnante rapidité, jusqu’à devenir une profonde clameur de bruits qui enveloppait toute la terre ; et les craquements déchirants glissèrent le long des lignes jusqu’à atteindre un rugissement interminable. Pour ceux qui étaient au milieu du bruit, ce fut comme si l’univers entier explosait. C’était les vrombissements et les concussions d’une gigantesque machinerie, si complexe que les étoiles en paraissaient insignifiantes. Les oreilles de l’adolescent en étaient pleines. Il ne pouvait plus rien entendre.
    Sur une pente où serpentait une route, il vit des ruées sauvages et désespérées d’hommes, vers l’avant et vers l’arrière, en des surgissements d’émeutes répétés. Ces parts d’armées qui s’opposaient étaient comme deux longues vagues qui déferlaient l’une sur l’autre, follement, en des points ordonnés. Ces vagues enflaient d’avant en arrière. Parfois un côté proclamait des coups décisifs par ses hourras et ses hurlements, mais un moment après c’était l’autre côté qui criait son triomphe. L’adolescent vit un jaillissement de formes légères courir comme des lévriers vers les lignes ondulantes des bleus. Il y eut pas mal de hurlements, et à présent ils se retiraient avec une grande quantité de prisonniers. À nouveau encore, il vit une vague des bleus déferler avec une si grande force contre une obstruction des tuniques grises, qu’elle parût les faire disparaître du sol, et ne rien laisser qu’un gazon piétiné. Durant leurs mortelles et rapides ruées d’avant en arrière, les hommes hurlaient tout le temps comme des fous.
    On disputa âprement quelques endroits abrités, – partie de barrière, groupe d’arbres –, comme si c’était là des trônes d’or ou des lits de perles. À chaque instant apparemment, ces endroits choisis subissaient un assaut désespéré, et la plupart d’entre eux passaient comme des jouets entre les mains des deux forces en lutte. L’adolescent ne pouvait dire, d’après les étendards qui volaient dans toutes les
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