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Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes
Autoren: Conn Iggulden
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bas, le féal Murakh avait rejoint le dernier carré des
défenseurs. Quoique exténués et brisés, ils relevèrent la tête en sa présence
et s’efforcèrent de ne pas montrer qu’ils avaient peur. Kökötchu les entendit
se dire adieu avant de repartir au combat d’un pied plus léger.
    Gengis en personne fendit à cheval la masse de ses guerriers
pour rejoindre le pied de la colline, l’armure marbrée de sang. Sentant le
regard du chef ennemi passer sur lui, Kökötchu frissonna et toucha la poignée
de sa dague. Gengis épargnerait-il un chamane qui aurait égorgé son propre khan ?
Le vieil homme assis dans l’herbe baissait la tête au-dessus d’un cou d’une
extrême maigreur. Un tel meurtre sauverait peut-être la vie de Kökötchu qui, en
cet instant, avait désespérément peur de la mort.
    Gengis resta immobile un long moment et Kökötchu laissa sa
main retomber. Il ne connaissait pas cet homme froid surgi de nulle part avec l’aube.
Le chamane s’assit à côté de son khan et regarda mourir les derniers Naïmans. Il
entonna une vieille incantation que son père lui avait apprise, un charme pour
mettre les ennemis de son côté, et les mots qui tombaient de sa bouche parurent
rasséréner le vieux khan.
    Murakh, premier guerrier des Naïmans, n’avait pas encore
combattu ce jour-là. Avec un ululement, il se précipita vers les hommes de
Gengis sans songer à son sort. Les derniers Naïmans joignirent leurs cris au
sien et leur fatigue s’envola. Leurs flèches firent tournoyer les guerriers
ennemis, mais ils se relevèrent aussitôt, brisèrent le bois des traits et
avancèrent en montrant les dents. Lorsque Murakh pourfendit le premier qui se
présenta devant lui, dix autres le pressèrent de tous côtés, lui rougissant les
flancs de leurs coups.
    Kökötchu écarquilla les yeux quand Gengis souffla dans un
cor et que ses hommes refluèrent, s’écartant des Naïmans survivants et hors d’haleine.
    Murakh se tenait encore debout, hébété. Kökötchu vit que
Gengis s’adressait à lui mais il ne put entendre ce qu’il disait. Murakh secoua
la tête, cracha du sang sur le sol et brandit de nouveau son sabre. Seuls
quelques Naïmans l’entouraient encore, tous blessés, les jambes ruisselantes de
sang. Eux aussi levèrent leurs armes en titubant.
    — Vous avez vaillamment combattu ! leur cria
Gengis. Rendez-vous et je vous accueillerai autour de mes feux. Je vous
traiterai avec honneur.
    Murakh eut un rictus qui dénuda des dents rouges.
    — Je crache sur l’honneur d’un Loup.
    Gengis resta sans bouger sur son cheval, haussa finalement
les épaules et abaissa de nouveau le bras. Ses hommes chargèrent ; Murakh
et ses compagnons furent engloutis par le flot, piétinés ou transpercés.
     
     
    Sur la colline, Kökötchu se leva et son incantation mourut
dans sa gorge lorsque Gengis mit pied à terre et commença à gravir la pente. La
bataille était finie. Les morts gisaient alentour, par centaines, mais des
milliers d’hommes s’étaient rendus. Kökötchu n’avait cure de ce qui leur
arriverait.
    — Il vient, souffla-t-il.
    Son estomac se serra, les muscles de ses jambes
frissonnèrent comme ceux d’un cheval assailli par des mouches.
    L’homme qui avait rassemblé les tribus des plaines sous sa
bannière avançait d’un pas résolu, le visage sans expression. Kökötchu remarqua
que son armure était bosselée et qu’un grand nombre des écailles métalliques
pendaient au bout de leurs fils. Le combat avait été âpre mais Gengis montait
la bouche close, comme si cet effort n’était rien pour lui.
    — Mes fils ont-ils survécu ? demanda le khan, brisant
son silence.
    Il tendit le bras, agrippa une manche du deel de Kökötchu.
    — Non, seigneur, répondit le chamane avec une soudaine
amertume.
    La main retomba, le vieil homme se tassa sur lui-même. Puis
les yeux laiteux se relevèrent et Kökötchu vit de la force dans la façon dont
il se redressa.
    — Alors, laisse venir ce Gengis, dit le khan. Peu m’importe,
à présent.
    Kökötchu ne répondit pas, incapable de détacher son regard
du guerrier qui gravissait la colline. Il sentait le vent froid sur son cou et
savait pourquoi il le trouvait plus doux que jamais. Il avait vu des hommes
face à la mort ; il la leur avait envoyée par les rites les plus sombres
et avait expédié leurs âmes tournoyantes vers le ciel. Il voyait sa propre mort
s’avancer au pas égal de cet homme et, l’espace
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