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Le secret des enfants rouges

Le secret des enfants rouges

Titel: Le secret des enfants rouges
Autoren: Claude Izner
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se nourrissent exclusivement de…
    — M’sieu Legris, intervint Joseph, à propos de Paul et Virginie , il faut satisfaire M. Hilaire de Kermarec, il traque un exemplaire édité par Curmer en 1838, les illustrations sont protégées par des serpentes et la reliure en plein maroquin est de Simier.
    — Si ces messieurs se mettent à employer leur jargon, nous allons nous sauver, je brûle de connaître les résultats du rallye-paper 7 à bicyclette qui s’est couru dimanche à la Concorde. Venez, ma chère, trancha Helga Becker d’un ton sans réplique.
    À contrecœur, Mathilde de Flavignol prit congé, non sans avoir décoché une œillade langoureuse à Victor.
    Dès qu’elles furent sorties, celui-ci se tourna vers Joseph.
    — N’était votre présence d’esprit nous en serions encore au menu des singes.
    — Ah, j’allais oublier, un pékin voulait voir M. Mori, et puis une dame a téléphoné. Elle veut vendre sa bibliothèque, des reliés XVII°, elle a exigé de parler à M. Mori, je lui ai dit qu’il était absent et que vous vous chargeriez de l’estimation. Si vous voulez décrocher l’affaire, il faudrait aller là-bas en début de soirée parce que vous n’êtes pas le seul sur les rangs. Je vous ai noté le nom et l’adresse, 4, rue des Hortensias, à Neuilly. Elle vous attend à dix-neuf heures.
    — Je comptais dîner avec Mlle Tasha.
    — M. Mori se plaint qu’on ne rentre pas beaucoup de livres depuis Noël. Enfin, moi, ce que j’en dis… grogna Joseph déjà plongé dans la lecture de La Vie populaire .
    » Y a pas à tortiller, le père Zola, il a du souffle ! Grâce à lui, l’après-midi va filer comme un trait.
     
    Le temps était glacial et Joseph avait hâte de fermer afin de foncer rue Visconti avaler le potage que sa mère avait sûrement préparé. Il avait introduit la clé dans la serrure de la librairie et allait attraper le dernier contrevent, quand un cri attira son attention. À quelques mètres, une femme venait de déraper sur le trottoir désert. Étalée de tout son long, elle tentait vainement de se relever. Il se précipita à son secours.
    — Vous êtes blessée ?
    — Plus de peur que de mal. Ça va aller. Je vous remercie.
    — Vous désirez un sapin ?
    — Inutile, j’irai à pied.
    Étouffée par la voilette, la voix n’exprimait aucune émotion. Joseph regarda la silhouette s’éloigner en direction de la Seine et revint empoigner le contrevent. Lorsqu’il voulut boucler, il eut la surprise de constater que son trousseau était sur le bitume.
    — Elle est bleue, celle-là ! Voilà que mes clés imitent les cloches de Rome, elles ont des ailes… J’ai des visions, ça prouve simplement qu’il est impératif que j’aille becqueter.
     
    Samedi matin, 9 avril
     
    L’émissaire tourna la tête et contempla la croix de bois accrochée au chevet du lit. L’espace d’un instant, ce fut comme si la chambre avait disparu, il ne subsistait que des rais de poussière dorée qui tombaient des cieux à travers les fentes des volets clos. Peu à peu ses yeux s’accoutumèrent à la pénombre. Sa main gratta une allumette et enflamma la mèche de la lampe. La lumière rose tremblota sur la page blanche du cahier.
    Seigneur, je suis le témoin de ta gloire. Moi, ton émissaire, j’ai mené à bien la mission que tu m’as confiée. La flétrissure est à l’abri. Je dois m’armer de patience, attendre le moment propice pour la rejeter au néant. Il n’en subsistera nulle trace, ainsi les faux prophètes ne pourront attenter à ton œuvre, et l’humanité n’encourra plus ton courroux .
     

 
     
     
     
     
CHAPITRE III
    Samedi 9 avril
     
    Joseph aimait astiquer les reliés. Lustrer délicatement la basane, le maroquin ou le chagrin lui procurait un plaisir sensuel. Il ressentait une joie particulière à raviver l’éclat des dorures ornant le dos et les plats. L’arrivée matinale de Victor interrompit ce travail qui l’avait mis d’excellente humeur. Il l’accueillit, souriant, une superbe reliure à la « fanfare » entre les mains. Victor, lui, arborait une expression menaçante.
    — J’aurais dû m’en douter ! Ce nom est ridicule ! s’exclama-t-il.
    — Quel nom, patron ?
    — Hortensias. Hier soir, je suis allé à Neuilly pour des prunes : inconnue au bataillon, votre rue ! Offensé, Joseph posa le livre sur le comptoir.
    — D’abord ce n’est pas ma rue, c’est celle que m’a indiquée la
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