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Le secret des enfants rouges

Le secret des enfants rouges

Titel: Le secret des enfants rouges
Autoren: Claude Izner
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PROLOGUE
    Paris, 27 mars 1892
    Huit heures du matin venaient de sonner au clocher de l’église de la Trinité. Soudain, une explosion formidable secoua le quartier. En quelques secondes, rue de Clichy, un immeuble de cinq étages vacilla sur sa base, l’escalier s’effondra de l’entresol jusqu’aux combles, toutes les vitres volèrent en éclats.
    L’onde de choc fit vibrer son corps. Son cerveau traduisit : Apocalypse. La rue se mit à tournoyer. La poussière picotait ses narines, mais ce qui l’envahissait était autre chose que cette odeur âcre et paraissait émerger du souvenir d’une expérience ancienne depuis longtemps refoulée. Ce fut l’écho de ce qui s’était produit autrefois. Un signe.
    L’ardente croyance en l’existence d’une décision divine, le respect des Écritures, l’effroi des sacrements provoquèrent la vision de son tuteur pointant un index rigide vers le ciel sombre. C’était revenu, sa voix grondait. Toujours les mêmes mots :
    « Et il y eut un grand tremblement de terre, le soleil devint noir comme un sac de crin, la lune entière devint comme du sang… À se vautrer dans l’hérésie on récolte la damnation ! Châtiment ! Châtiment ! »
    Des débris de verre jonchaient les pavés. Un vieil homme tremblant de tous ses membres s’était assis au bord du trottoir. Une femme, les vêtements déchirés, les cheveux couverts de plâtre, hurla. Déjà les premiers secours arrivaient.
    La chambre était un refuge au cœur de la nuit, rassurante, confortable, protégée par des murs lambrissés. Sur le bureau, la lampe à abat-jour rose pâle créait des arcs-en-ciel au flanc d’une carafe d’eau. Une main attira l’encrier. Le silence ne fut troublé que par le crissement de la plume traçant consciencieusement les pleins et les déliés sur le papier à carreaux.
    Ce matin, le bruit a percé mes tympans, secoué la moelle de mes os, l’ire de Dieu résonne de nouveau. La cohorte des loups déguisés en moutons sème mensonge et incertitude parmi les ouailles. J’étais là. Mon estomac est remonté à ma gorge, j’ai cru que mon cerveau éclatait, mes yeux furent éblouis par un éclair fulgurant. Le ciel s’est abattu sur nous. Mille marteaux ont fracassé ma tête. Dieu m’a rappelé ce que j’avais à accomplir. J’éprouve un sentiment de triomphe, car mon Dieu est celui qui créa l’homme à son image selon sa ressemblance, ainsi que toutes choses sur la terre, et il m’a accordé sa confiance. Depuis que j’ai découvert ce qui se trame, il est de mon devoir d’agir. Je suis le bras de Dieu, j’atteindrai mon but, personne ne rentrera en possession de cette flétrissure. J’emploierai les moyens extrêmes. L’humanité a pris un chemin de traverse, je dois séparer le bon grain de l’ivraie, j’en fais le serment. Seigneur, armez votre émissaire.
     
     
     
     
     
CHAPITRE PREMIER
    Highlands, Écosse, 5 avril 1892
    Embusqué sur la branche basse d’un hêtre, les muscles bandés, les griffes prêtes à jaillir, Taby épiait le buisson où s’était coulé un mulot. Des nuées blanches et houleuses s’enfuyaient, malmenées par le sent du nord qui étrillait les arbres du parc. Une lune rousse, tour à tour voilée et dévoilée, éclairait chichement le paysage. Taby avait du mal à distinguer les bruyères noyées de brouillard au creux desquelles se terrait sa future victime. Par-delà un bosquet d’érables se profilait le manoir de Brougham Green posé sur son éminence, telle une sentinelle surveillant sans relâche la route de Crescent Dogall qui serpentait au pied de collines désertiques.
    Taby passa une patte humide sur son masque de siamois et se plaqua vivement à l’écorce. Là-bas, derrière au éventail de fougères, un trait sombre avait fusé. Le chat bondit. Au moment où sa gueule allait happer la créature, un tremblement sourd ébranla le sol. Les vibrations surprirent Taby qui marqua une brève hésitation, mise à profit par sa proie pour disparaître entre deux rochers. Désappointé, Taby renonça à sa chasse.
    Se dressant de toute sa hauteur, il se fit les ongles sur un tronc et rejoignit l’allée, de la démarche nonchalante d’un vieux monsieur qui fait sa promenade digestive. Soudain, une masse furieuse traînée par les efforts conjugués de chevaux aux yeux fous déboula devant lui. Affolé, Taby gagna le sommet d’un chêne nain et observa le monstre à quatre roues filer
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