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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate
Autoren: Emma Locatelli
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à l’autre bout de la pièce.
    Près de la tenture, se tenait une femme vêtue d’une simple stola (18) et d’un long châle. Un jeune garçon d’une dizaine d’années, à l’air timide, s’agrippait à elle, à demi caché dans sa tunique.
    Maesa et Soemias, gênées, interrompirent aussitôt leur conversation.
    — Tu m’as demandé de venir, mater ? demanda l’intruse.
    — Voilà deux jours que je ne t’ai pas vue, dit Maesa à sa seconde fille, en lui faisant signe d’approcher. Pourquoi restes-tu enfermée dans ta suite ?
    — Alexianus ne se sentait pas bien, répondit celle-ci. Je surveillais sa fièvre.
    La vieille Syrienne observa d’un air perplexe le petit garçon.
    — Cet enfant n’a pas l’air malade. Aurais-tu quelque chose à me reprocher, Mammaea ?
    — Je n’ai rien à reprocher à personne, répondit la jeune femme en se raidissant. La santé de mon fils occupait mon esprit et je n’avais pas le cœur à le laisser seul.
    Maesa claqua des mains et les esclaves quittèrent la chambre comme des sauterelles que la foudre aurait soudain effrayées. Elle concentra son attention sur Mammaea.
    — Est-ce la décision que nous avons prise qui blesse ton orgueil ?
    — Je ne suis pas orgueilleuse, se défendit la jeune femme en resserrant son châle autour de ses épaules. Je pensais que tu me connaissais mieux.
    — Je ne te fais aucun reproche. Une mère nourrit toujours de grandes ambitions pour ses enfants, cela est bien naturel. Et la déception que tu peux ressentir est à la mesure de l’amour que tu portes à ton fils.
    — Inutile de revenir là-dessus, dit froidement Mammaea. Tu as fait ton choix.
    Malgré la sérénité apparente et l’air compassé de sa fille, Maesa devinait qu’elle était blessée et qu’elle ruminait sa rancœur.
    Elle s’adressa à elle sur un ton apaisant :
    — Tu sais très bien qu’Alexianus est trop jeune pour être empereur.
    — Il n’a que quatre ans de moins que Varius, répondit Mammaea plus sèchement qu’elle ne l’aurait voulu. Alexianus a toutes les qualités pour faire un empereur.
    — Nous ne pouvons pas encore le savoir. Alexianus n’est qu’un enfant.
    — Moi je le sais, protesta de nouveau Mammaea, mais sans s’emporter, en gardant son visage impassible de matrone. Comme je sais que Varius est incapable d’assumer les responsabilités que vous projetez de lui confier.
    — Pour qui te prends-tu ? s’écria Soemias d’une voix tremblante où perçaient la colère et l’indignation. Pour qui te prends-tu pour affirmer que Varius est un incapable ?
    Mammaea dévisagea sa sœur avec une certaine condescendance.
    — Ton fils est beaucoup trop occupé par le culte d’Élagabal pour s’intéresser au gouvernement de Rome, répondit-elle calmement.
    En tant que petit-fils aîné de Maesa, elle-même fille aînée de Julius Bassianus, dernier descendant mâle de la dynastie sacerdotale des rois-prêtres de la cité, le jeune Varius présidait au culte héliaque d’Émèse.
    Dans cette région de la Syrie, comme dans beaucoup d’autres contrées de l’Asie antérieure, le soleil était vénéré par les Orientaux comme un dieu tout-puissant. Les indigènes l’adoraient sous la forme d’une pierre noire, probablement tombée du ciel en des temps très anciens et qu’ils surnommaient Élagabal.
    Ils s’imaginaient que le soleil avait trouvé refuge dans ce débris de météorite, dans ce gros morceau de roche conique auquel ils rendaient les dévotions les plus ardentes. Ce culte arabe du Ba’al solaire s’était fixé trois siècles plus tôt dans la petite cité caravanière, à l’époque où le cheikh nomade Sampsigeram avait détrôné le dernier souverain séleucide de Syrie et fondé la principauté d’Émèse.
    Depuis lors, tous les héritiers mâles de la famille régnante étaient appelés à exercer la grande prêtrise de cette étrange religion solaire, incarnée mystérieusement dans la pierre.
    — Garde tes sarcasmes pour toi, Mammaea, cracha Soemias. Mon fils assure avec un dévouement exemplaire et une grande ferveur la charge de nos ancêtres ! Sa piété l’honore et le rend plus digne encore d’assumer la direction de l’Empire !
    Mammaea ne se laissa nullement impressionner par les regards de tigresse que lui lançait sa sœur.
    — Ah oui ? Sait-il au moins où commencent et où finissent les frontières de cet empire qu’on s’apprête à lui offrir ?
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