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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite
Autoren: Elena Arseneva
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quelqu’un.
    Après ce spectacle improvisé, les trois amis quittèrent l’allée centrale et s’avancèrent le long d’un sentier sablé qui serpentait parmi des bosquets d’arbustes. Le crépuscule et la fraîcheur apportée par l’orage enveloppaient le parc. Mitko et Vassili continuaient d’échanger des plaisanteries, mais Philippos laissait libre cours à ses pensées qui ne cessaient de revenir à Nadia. Un plan audacieux germa dans son esprit. Si seulement Mitko acceptait de l’aider… Seul le Varlet, avec ses innombrables amis et amantes, était capable d’obtenir rapidement les informations dont Philippos avait besoin. Il pourrait alors réussir une escapade digne des équipées galantes de Mitko lui-même ! Le géant blond n’avait pas son pareil pour raconter les extraordinaires péripéties dont sa vie était pleine. Ces histoires enveloppées de mystère, empreintes de volupté et auréolées d’audace et de gloire, hantaient l’imagination de Philippos. Elles restaient inscrites dans sa mémoire comme autant de légendes… Et ce soir, il était bien décidé à vivre sa première aventure !
    Cependant, les Varlets avaient repéré la lumière qui éclairait la tonnelle située au fond du jardin. Ils la rejoignirent en quelques instants. Artem était installé devant une table carrée recouverte d’une nappe de lin rouge. Il portait un caftan en soie gris perle et une chapka bordée de zibeline. Les torches fixées aux piliers supportant le toit éclairaient des cruchons en grès remplis de kvas et d’hydromel frais qu’on venait d’apporter avec des coupes en bois peint.
    Apercevant ses amis, Artem eut un sourire qui adoucit son visage austère aux traits fins, encadré de cheveux blonds grisonnants et orné d’une moustache tombante à la varègue. Il se leva pour saluer les Varlets et serrer Philippos dans ses bras. Il s’écarta pour examiner la nouvelle cotte de mailles de son fils adoptif. Celui-ci bomba le torse avec fierté.
    — Bon, bon : voilà ton caprice satisfait, commenta Artem avec un sourire en coin. Je parie que d’ici peu, tu changeras d’avis et que tu finiras par porter la cotte réglementaire. Encombrante ou pas, elle sera tout de même moins voyante !
    — Elle brille de mille feux, et alors ? rétorqua le garçon. Elle a été rectifiée à mes mesures et je m’y sens à l’aise, c’est tout ce qui compte !
    — Sauf que tu ressembles à un preux de légende… ou plutôt à un héros de couplets satiriques ! Franchement, tu ferais mieux de la ranger avec tes caftans du dimanche !
    D’un geste, le boyard invita ses convives à prendre place. Il ôta sa chapka pour la poser négligemment au pied de son siège. Philippos et les Varlets, qui tenaient leur heaume sous le bras, suivirent son exemple. Deux servantes surgirent du jardin plongé dans l’obscurité. Chacune portait un grand plateau en équilibre sur sa tête. L’une d’elles servit la collation destinée à Philippos : soupe aux choux et galantine de pintade à la gelée garnie de cornichons. L’autre disposa sur la table des plats en terre cuite chargés de petits pâtés et de pains d’épice. Sur un signe d’Artem, elles remplirent les coupes, puis se retirèrent aussi discrètement qu’elles étaient apparues.
    — Pour moi, petit frère, tu évoques l’Oiseau de Feu, déclara Mitko avec un clin d’œil. Espérons que c’est le seul défaut de ta cuirasse !
    — L’épreuve du courage est dans le danger, et celle des armes, dans le combat ! remarqua Philippos. D’ailleurs, ajouta-t-il à l’adresse d’Artem, pas question d’exhiber ma cotte devant tout le monde ! J’ai l’intention de la dissimuler sous mes vêtements de tous les jours. Comme ça, je serai protégé de n’importe quel coup en traître… Et tu ne pourras plus m’empêcher de participer aux missions dangereuses que tu confies aux Varlets !
    — Si porter cette cotte peut t’inciter à la prudence, à la bonne heure ! concéda le droujinnik. Et maintenant, assez bavardé, mange !
    Quand Philippos eut assouvi sa faim, Artem se leva le premier, ramassa son couvre-chef et prit congé, déclarant qu’il allait repasser chez lui pour se rafraîchir un peu avant le banquet.
    Les deux Varlets, qui avaient le privilège d’occuper une petite chambre au lieu de partager le vaste dortoir commun, devaient eux aussi retourner chez eux pour troquer leur uniforme pour une tenue de fête. Vassili
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