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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance
Autoren: Diana Gabaldon
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quand même… c’est l’idée de mourir comme ça. Seul. Si loin de chez soi.
    Ce n’était pas à Donner qu’elle pensait. Il glissa un bras autour de sa taille et appuya sa tête contre la sienne. Ellesentait le shampooing Prell et le chou frisé. Elle revenait du potager. Les lettres sur la page s’estompaient ou s’accentuaient au rythme des plongeons de la plume dans l’encrier mais elles étaient nettes et bien formées ; c’était une écriture de médecin.
    — Elle n’est pas seule, murmura-t-il.
    Du bout de l’index, il décrivit un cercle autour du post-scriptum rajouté par Jamie.
    — Ils ne le sont ni l’un ni l’autre. Et qu’ils aient un toit au-dessus de leur tête ou pas, ils sont chez eux.

    Je reposai ma lettre, décidant de la terminer plus tard. Je la rédigeais par petits bouts depuis quelques jours. Après tout, ce n’était pas comme s’il fallait se presser pour qu’elle parte avec le prochain courrier. Cette idée me fit sourire. Je repliai soigneusement la feuille de papier et la plaçai dans ma nouvelle sacoche de travail. J’essuyai ma plume, la rangeai puis massai mes doigts endoloris, savourant encore quelques instants l’agréable sensation de proximité qu’écrire me procurait. Manier une plume m’était beaucoup plus facile que pour Jamie mais la chair et le sang avaient leurs limites. La journée avait été très longue.
    Régulièrement, je jetais un œil à la paillasse de l’autre côté de la cheminée. Elle n’avait toujours pas bougé. J’entendais son souffle, un gargouillement sifflant entre des intervalles si longs que, chaque fois, je la croyais morte. Mais non, elle était toujours avec nous et, selon mes estimations, le resterait encore un moment. J’espérais seulement qu’elle partirait avant que ma petite réserve de laudanum soit épuisée.
    J’ignorais son âge. Elle paraissait avoir cent ans mais était peut-être plus jeune que moi. Ses deux petits-fils, des adolescents, l’avaient déposée deux jours plus tôt. Ils étaient descendus des hauteurs avec l’intention de conduire leur grand-mère chez des parents à Cross Creek avant de se rendre à Wilmington pour rejoindre une milice. En chemin, la vieille femme s’était sentie « pas du tout du tout dans son assiette », pour reprendre leurs termes. Ayant entendu dire qu’une sorcière vivait non loin à Fraser’s Ridge, ils me l’avaient amenée.
    Grannie MacLeod (les garçons n’avaient pas pensé à me donner son prénom et elle n’était pas en état de se présenter) se trouvait en phase terminale d’un cancer quelconque. Je le voyais à son teint cendreux. Elle était décharnée, ses traits tordus dans une grimace de douleur même quand elle dormait.
    Le feu était en train de s’éteindre. Il était temps de l’attiser et d’ajouter une autre bûche. Toutefois, la tête de Jamie reposait sur mon genou. Pouvais-je atteindre la pile de bois sans le réveiller ? Je posai doucement une main sur son épaule pour ne pas perdre l’équilibre et tendis l’autre, parvenant tout juste à saisir une bûchette de pin du bout des doigts. Je la délogeai en me mordant la lèvre inférieure, puis, en me penchant, réussis à la pousser dans l’âtre, écrasant les charbons ardents et soulevant une pluie d’étincelles.
    Jamie remua et marmonna quelques paroles inintelligibles mais, dès que je me fus redressée, il soupira, se recala contre moi et se rendormit aussitôt.
    Je lançai un regard vers la porte, tendant l’oreille. Je ne percevais rien hormis le bruissement du vent dans les arbres. D’un autre côté, je ne devais pas m’attendre à entendre quoi que ce soit puisque c’était Petit Ian que je guettais.
    Jamie et lui se relayaient pour monter la garde, cachés parmi les arbres au-dessus des ruines calcinées de la Grande Maison. Ian y était depuis plus de deux heures. Il était temps pour lui de rentrer manger et se réchauffer devant le feu.

    Trois jours plus tôt, au petit déjeuner, il avait annoncé, perplexe :
    — Quelqu’un a essayé de tuer la truie blanche.
    — Quoi ?
    Je lui tendis un bol de porridge couronné d’une noix de beurre fondant et d’un filet de miel. Fort heureusement, mes tonnelets et mes rayons de miel avaient été entreposés dans la resserre avant l’incendie.
    — Tu en es sûr ?
    Il acquiesça, humant son bol d’un air béat.
    — Oui, ma tante. Elle a une entaille au flanc.
    Croyant sans doute que je prenais à cœur le
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