Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le marquis des Éperviers

Le marquis des Éperviers

Titel: Le marquis des Éperviers
Autoren: Jean-Paul Desprat
Vom Netzwerk:
visage brusquement altéré :
    – Mon Dieu, l’étrange chose ! Qu’allons-nous faire, mes bons Thésut, à présent que me voici lestement pris au piège ?
    L’abbé, qui pendant toute cette scène n’avait cessé de frissonner, trouva le courage d’approcher.
    – Pouvez-vous, Altesse, confirmer ce que nous a indiqué tantôt Madame ?… Avez-vous vécu avec elle dans l’honneur ?
    Le duc, d’abord dérouté par la question, se redressa très vite pour parler d’une voix claire.
    – Ah, mes amis ! murmura-t-il, voici bien le plus curieux de l’affaire : j’ai été avec elle en tout point comme son frère… Je vous en donne ma foi sur ce que j’ai de plus précieux, sur les mânes de mon père, sur l’amour que je porte à ma mère… Je suis demeuré près d’elle étrangement heureux et rassuré, sans plus ressentir aucune de ces bouffées d’angoisse que me procure l’inutilité où le roi me ravale… Elle est donc ma sœur. Oh, Dieu ! la destinée.
    – Elle est promise à mon neveu, Altesse, à Victor de Gironde qui montre chaque jour ici, par son application à vous servir, combien il vous est dévoué.
    – De plus, balbutia le duc d’une voix redevenue ténébreuse, j’aurais causé le malheur d’un de mes fidèles.
    – Met Verloff ! Met Verloff 251 ! s’exclama la duchesse qui venait de recouvrer tous ses sens après avoir bu un chiquet de cette Eau de l’Empereur Charles dont elle avait toujours un flacon sur elle, je ne croirai, moi, à toute cette fable que lorsqu’on m’en aura montré les preuves !
    – Elles sont là, comme nous l’annoncions, Altesse ! fit le chevalier qui s’était avancé portant la cassette du notaire et poussant Quatrebarbes devant lui.
    – Je vous crois sans qu’il soit besoin de lire, reprit le duc, le mystère de la paix qui m’a gagné depuis que je suis auprès de Clémire s’est brusquement levé à la seconde où vous avez parlé.
    Madame, d’un geste impétueux, sortit ses besicles de dedans sa manche après avoir calé la cassette de maître Lendhormi entre son ventre et le bord d’une petite table. Elle était trop agitée pour se convaincre elle-même et tendit la liasse au conseiller qui lut comme l’avait fait Victor au Palais-Royal deux heures auparavant.
    Cette lecture achevée, la princesse, qui paraissait émerger d’un songe, se leva pour faire trois fois le tour de sa bergère.
    – Et voulez-vous me dire ce que vient faire le chevalier de Lorraine dans cette affaire ?… On ne parle que de lui céans… Ne serait-ce point lui qui aurait engrossé cette chambrière et qui, par avarice pure, en aurait fait porter la reconnaissance à votre père ?
    – Vous ne voulez donc point que Clémire soit ma sœur ? se désola le prince.
    – Elle ne l’est que par ce qu’on dit là, répliqua Madame, mais ce sont des fariboles… Je sais moi que votre père n’a pas connu d’autres femmes que les deux légitimes qu’il a eues par le mariage. M’asseyerait-on sur la sellette, me chausserait-on le brodequin, je ne conviendrais pas d’autre chose !…
    Le prince, ému de l’indulgence pleine de passion que découvrait sa mère, s’empara de sa main pour la baiser.
    – Nous ne percerons sans doute jamais ce mystère, dit-il… Quoi qu’il en soit, je vous supplie de n’empêcher point un fils aimant de considérer Clémire comme une autre partie de lui-même et de continuer d’en faire sa confidente.
    – Ah ! recevez-la ainsi, Philippe, s’exclama Madame qui avait achevé de mettre à vif ses joues pleines à force de les lustrer, cette enfant, je l’avoue a conquis mon cœur.
    – En somme, reprit le prince d’un accent mâle tout en abaissant un cordon de passementerie, la pièce finit sous des applaudissements universels : ma mère trouve une fille aimante pour remplacer celle qui est en Lorraine, je me découvre une sœur, monsieur de Gironde regagne un cœur qui ne brûle que pour lui et vous, messieurs, vous récupérez un maître…
    Il revint vers son bureau pour mettre en morceaux la lettre qu’il était en train d’écrire.
    – Il n’est plus temps de cela ! dit-il, je demandais au roi qu’il m’autorise à quitter la cour quelque temps… Un petit-fils de France ne peut se permettre de ces caprices.
    – C’est le commencement de la sagesse, se félicita tout haut le chevalier de Thésut.
    – La Maison d’Orléans, renchérit monsieur Davignon, est heureuse de posséder un chef tel que vous… Vous le
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher