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Le héron de Guernica

Le héron de Guernica

Titel: Le héron de Guernica
Autoren: Antoine Choplin
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tourne le dos à Basilio. D’un pied adroit, il se met à shooter dans son ballon. Il le fait rebondir contre le mur de la maison de Basilio, prenant peut-être pour poteaux de buts les deux soupiraux brisés.
    Un bon quart d’heure plus tard, la voix de son père retentit à une centaine de mètres de là, dans la direction du marché.
    Sans saluer Basilio, Ramiro part en courant vers lui, le ballon serré par le bras contre son flanc.

Quand Basilio rejoint le bord de la rivière au pont de Rente-ria, le jour a commencé de décliner. La brise de mer est tombée et les frondaisons ont cessé de bruire. Les mouettes ont déserté les lieux.
    Par intermittence, il y a encore le chant flûté de quelques passereaux, bouvreuils et fauvettes.
    Tout est tellement tranquille, ici. C’est ce que se dit Basilio, en progressant à pas lents, d’abord au plus près de la Mundaca, puis sous le couvert des arbres.
    Il arrive au marais, en vue de la roselière. Sans la quitter des yeux, il la contourne en s’éloignant de la rivière.
    Plusieurs fois, son pied s’enfonce dans la mousse détrempée et il sent le frais de l’eau coulant dans ses souliers.
    Il marche à pas minuscules, la tête tournée vers la roselière et gagne le grand aulne. Son matériel de peinture est toujours là, pendu à la branche, à demi dissimulé dans le feuillage.
    Il hésite un instant, puis revient en arrière.
    Il manque plusieurs fois de trébucher à cause du sol au relief inégal auquel il n’accorde pas suffisamment d’attention.
    Il s’accroupit à l’endroit exact où le matin même, il a commencé à peindre.
    Il se souvient que les eaux du marais étaient alors tellement scintillantes à l’avant des roseaux qu’on ne se posait même pas la question de leur couleur. À présent, leur teinte violacée, celle des fins de journée, est comme un ultime salut avant le noir. Elle leur donne une lourdeur d’huile.
    En face de Basilio, la palissade formée par la roselière est percée de plusieurs brèches. C’est souvent le signe du passage des grands échassiers. Parfois aussi, il est vrai que c’est seulement le fait d’une moindre densité naturelle du végétal.
    En tout cas, le regard exercé de Basilio s’engouffre par ces trouées. En les prenant l’une après l’autre, de gauche à droite, il en fouille les espaces disponibles avec application.
    Sa première exploration ne donne rien.
    Il cligne énergiquement des paupières, plusieurs fois, et recommence à scruter, de la gauche vers la droite, une ouverture après l’autre.
    Voyons, mon pépère, il murmure.
    Dans ce qui pourrait trahir la présence du héron, il tente d’épier, dans un même temps, les variations de formes et les nuances de couleurs.
    Son regard s’attarde au fond d’une trouée.
    Il se fige sur une oblique curieuse, rompant avec la verticalité des roseaux. C’est une ligne aux contours peu nets, plongeant vers l’eau depuis une hauteur d’environ cinquante centimètres. Le tressaillement dont elle est agitée par instants est presque imperceptible.
    Plusieurs fois, Basilio se frotte les yeux de ses deux poings avant de les écarquiller à nouveau en direction de la roselière et de l’oblique mystérieuse.
    Quel idiot, se dit-il au bout d’un moment. T’as bien failli m’avoir, cette fois-ci, hein, mon pépère.
    Il observe à nouveau quelques secondes et se le confirme une bonne fois : la ligne oblique n’est pas une patte comme il l’a cru au début, mais bien la partie antérieure d’une aile.
    Il se moque de lui-même encore un instant, puis redevient sérieux.
    Il se lève, se décale de quelques mètres et cette fois, il peut distinguer la silhouette entière du héron.
    Cette posture étrange.
    La droiture du cou, bien sûr, et la tête parfaitement immobile. Cet élancement parfait de la partie supérieure du corps. Mais aussi, vers le bas, ce drôle de penchant, cette dissymétrie inhabituelle à cause de l’aile à demi ouverte et s’inclinant jusqu’à l’eau.
    Durant plusieurs minutes, Basilio observe le héron.
    Et sans doute, le héron observe Basilio, le bec pointant du côté de la rivière.
    Une fois, il ramène l’aile affalée presque devant lui comme s’il voulait s’en draper et Basilio peut entendre les clapotis que cela produit. Un instant après, l’aile reprend sa place, retombant jusqu’à l’eau.
    Qu’est-ce qui t’arrive, mon vieux, souffle Basilio.
    Il le regarde encore un moment et puis
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