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Le héron de Guernica

Le héron de Guernica

Titel: Le héron de Guernica
Autoren: Antoine Choplin
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toits
    Et les cheveux des filles
    Dans le bruit des machines
    Celles de l’usine n’ont rien entendu
    Ni le fer à l’approche ni mes cris d’alerte
    Presque jusqu’à la fin elles ont gardé l’œil bas
    Tout à leur ouvrage
    Trottinant parfois d’ici à là
    Et puis après seulement
    Je l’ai vue elle
    Son foulard noué sous le menton Et dénudant le front…
    De quelle couleur était le foulard ? interrompt Basilio, les poings serrés toujours collés à la tête.
    Son foulard…
    — Bolin marque une courte hésitation –
    Rouge et blanc
    Noué sous le menton
    Et dénudant le front
    Ses yeux larges et brillants des dimanches de bal
    Je l’ai vue Celestina
    Par-delà les grilles
    Frotter ses paumes contre le tablier jaune
    Avant d’attacher souriante le chignon d’une femme
    Et puis après seulement
    J’ai vu pleuvoir l’averse de métal
    Au moment où les visages de femmes
    Se dévissaient vers le haut
    Pour une courte épouvante
    Et puis après seulement
    J’ai vu les éclairs blancs
    Dont celui-ci pour elle
    Et son envol soudain dans le feu gris d’une flamme.
    Avant même que Fernando Bolin n’achève son récit, Basilio a commencé à chantonner. Il reprend en boucle une mélodie simple, sorte de rengaine enfantine, d’une voix nasillarde et qui va crescendo. Son buste se balance avec régularité et ses deux poings cognent doucement contre son front.
    Augusto et Julian le fixent avec de grands yeux tout ronds et le regard triste de Bolin va de l’un à l’autre.
    Voilà, il dit. C’est ça que j’ai vu vers chez Uncate. Autour d’eux, le silence s’est fait. On s’est même écarté un peu, avec de drôles de coups d’œil en direction de Basilio.
    Son chant à lui se met à dérailler, et après quelques secondes d’un curieux beuglement, émis avec le menton collé à la poitrine, il finit par se taire, sans cesser le martèlement à son front. Il fait quelques pas à reculons, vers la porte de l’église et les gens s’écartent sur son passage.
    Tu devrais pas y aller, Basilio, fait Bolin.
    Basilio, en marche, à reculons.
    De toute façon, il n’y a plus rien à voir là-bas, lance encore Bolin.

LA BLESSURE

Sur toute la longueur de son flanc est, le couvent des Carmélites est protégé par un haut mur. Il a été érigé à la hâte deux ou trois ans plus tôt sur le support d’une enceinte plus ancienne, alors jugée trop peu élevée pour garantir aux sœurs un environnement propice au recueillement et à la prière. Il faut dire qu’en la matière, la rumeur d’intrusions nocturnes de jeunes gens aux intentions peu avouables avait précipité la décision.
    À l’avant du mur, quelques arbres, platanes et tilleuls. Dont celui-ci au pied duquel s’immobilise Basilio.
    Depuis l’église Santa Maria, il a d’abord pris la direction d’Uncate et de l’usine de confiserie. Quelques pas, d’abord vifs, puis plus hésitants.
    Une première fois, il a stoppé, a fait volte-face, ses deux mains empoignant ses cheveux.
    Après, il s’est retourné à nouveau et a poursuivi son chemin. Il n’a ralenti son allure qu’au niveau du quartier Calzada. Il a fini par s’accroupir, les deux poings plantés dans le sol entre ses genoux écartés, comme saisi par un épuisement soudain. Il s’est tenu comme ça un bon moment, au milieu de la rue avant de s’éloigner vers la droite, en direction du couvent.
    Il est passé devant les grilles, dans le désordre invraisemblable des plaintes et des blessés que l’on achemine. Il a continué jusqu’à l’angle du mur d’enceinte et après une dizaine de mètres, a gagné le pied de l’arbre.
    Il lève le nez, avise la grosse branche horizontale.
    Il se rapproche d’abord du tronc. Doucement, il promène ses deux mains sur la surface grise et lisse de l’écorce, à la recherche d’aspérités. Il passe ses bras autour de l’arbre et en vain, essaie de gagner quelques centimètres par la seule adhérence de ses semelles.
    Il renonce. Regarde encore.
    Recule de quelques pas.
    Le regard tendu vers l’objectif, il s’élance, saute et agrippe la branche de ses deux mains. Un bon moment, ses jambes battent dans le vide avant qu’il ne réussisse à se rétablir.
    Il souffle un instant avant de se mettre debout, un bras en appui contre le tronc. Il grimpe facilement deux ou trois mètres de plus grâce à une ramure plus dense et s’assoit à califourchon sur une branche qui s’allonge jusqu’au sommet du mur. Par
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