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Le faucon du siam

Le faucon du siam

Titel: Le faucon du siam
Autoren: Axel Aylwen
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Loyaux mandarins, nous vous avons convoqués aujourd'hui
pour évoquer des problèmes importants. C'est une période éprouvante pour notre
nation que celle où des étrangers convoitent ouvertement la richesse de notre
pays. Nous ne vivons plus une époque d'isolement ou de confortable solitude,
car les habitants du monde occidental voyagent de plus en plus loin. Le monde
se réduit et continuera de le faire. Ces nations de l'Occident sont mieux
armées et mieux équipées que nous et, même s'il n'y a guère de domaine où nous
souhaitions rivaliser avec elles, force nous est de reconnaître que la
puissance grandissante de leur armement nous rend de plus en plus vulnérables à
leurs attaques.
    « Nous avons donc résolu de conclure un traité avec notre
digne frère souverain, le roi de France, dont la nation a exprimé des
sentiments amicaux à notre égard et avec qui nous avons échangé des ambassades
et des présents à une échelle sans précédent. Ce sera la plus grande alliance
que nous aurons signée en tant que nation et ce sera le premier lien important
entre les mondes de l'Orient et de l'Occident. Auprès des farangs français, de
leurs soldats, de leurs dessinateurs et de leurs ingénieurs, nous apprendrons
ce qui touche à la science. Car, mes loyaux mandarins, c'est de la connaissance
scientifique que va dépendre la stabilité future de notre antique pays. »
    Le roi marqua un silence éloquent.
    « Notre prochain Barcalon sera donc un homme de science.
Et nous vous engageons tous, présentement, à résoudre l'énigme suivante. Celui
qui en trouvera la solution — ou bien, si vous êtes plus d'un à réussir, celui
qui y parviendra par les moyens les plus habiles —, cet homme sera notre
prochain Barcalon. »
    L'assemblée attendait avec une impatience silencieuse.
    « Nous vous demandons, poursuivit Sa Majesté, de nous
donner le poids précis de notre plus gros canon, celui que l'on appelle le Pra
Pirun. Nous réclamons cette information le plus tôt possible et le premier à
concevoir le moyen de calculer avec précision son poids se présentera aussitôt
devant nous. Le concours se terminera dans une semaine. »
    À peine l'ordre du roi lancé, les courtisans entreprirent
tous de chercher la solution. Un mandarin décidé, le gouverneur de Phitsanulok,
fit entreprendre la construction d'une énorme balance avec des chaînes de fer,
mais ses efforts répétés pour mesurer le poids du canon géant avec un semblant
d'exactitude échouèrent. Tout d'abord, on ne parvint pas à soulever la pièce
comme il convenait. Quand enfin on y réussit, la balance se brisa. Le général
Petraja, irrité de voir retardée sa nomination qu'il avait considérée comme
assurée et inquiet à l'idée que l'un des mandarins puisse trouver une réponse,
consulta les astrologues et alla voir son ami le Patriarche suprême. Mais aussi
bien le chef du clergé bouddhiste que le plus célèbre astrologue du pays lui
assurèrent que la tâche était impossible. Le problème demeurerait insoluble en
raison des dimensions mêmes du canon. Soulagé, le général rentra chez lui pour
attendre l'issue de la période de sept jours.
    Sur ordre de Sa Majesté, un messager du palais vint
annoncer la nouvelle du concours au domicile de Phaulkon, qui l'accueillit avec
un mélange d'inquiétude et de détermination. Il n'était pas au mieux de sa
    forme, mais quelle merveilleuse occasion lui était
offerte! C'était la chance qu'il attendait. Mesurer le poids d'un tel canon et
il pourrait devenir Barcalon ! S'il y parvenait, il n'aurait plus besoin de
supplier les Jésuites de conclure un traité, ce serait lui qui leur annoncerait
la nouvelle. Quant à Aarnout Faa, il allait... Non, se dit-il, il n'allait pas
faire ce que l'on attendait de lui. Il n'allait pas chasser les Hollandais du
Siam, car cela ne convenait pas aux intérêts de ce pays. Le Siam avait besoin
de Batavia pour les revenus que lui rapportaient les exportations : les Hollandais
avaient toujours été de prompts et honnêtes payeurs. Il allait montrer aux
Hollandais qu'il était impartial et ne s'intéressait qu'à la prospérité du
Siam. Il allait veiller à ce que l'alliance avec la France les dissuade de tout
projet de conquête. Il allait utiliser tout à la fois la carotte et le bâton.
Mais de combien de temps disposait-il? Pourrait-il parvenir au résultat à temps
pour prévenir l'invasion prévue? Il donna à Sunida l'ordre de fermer la porte
de sa
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