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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer
Autoren: Hervé Gagnon
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haine, sans que la foi y change quoi que ce soit. Il tue, viole, pille et estropie. Il n’est qu’un animal sur deux pattes. Pendant ce temps, Dieu semble se croiser les bras, indifférent.
    —    Les Églises sont des créations humaines. Elles sont donc faillibles, répondit-elle avec douceur. C’est pourquoi les âmes s’incarnent autant de fois qu’il le faut pour atteindre la perfection. Toutes ne le font pas au même rythme. Si Dieu intervenait dans notre vie, pourrions-nous faire nos propres choix et nous améliorer ?
    —    Et cela rend acceptable la transgression de la morale divine ? intervint Montbard, aussi amer que moi.
    —    Bien sûr que non. Le péché est le péché et l’ignorance n’est pas une excuse. Mais cela fait partie de l’apprentissage nécessaire. Sans la chance de comprendre peu à peu la nature de nos fautes, nous finirions tous en enfer. La possibilité de la rédemption doit exister, sinon la vie n’aurait pas de sens. Sauf que les pauvres chrétiens croient qu’ils n’ont qu’une seule vie et, partant, une seule chance d’atteindre le Paradis.
    À ces mots, un frisson me parcourut le dos. Elle ne pouvait savoir à quel point elle voyait juste. Mon existence était définie tout entière par l’espoir de la rédemption.
    —    C’est pour cette raison que la Vérité a une telle importance, mes frères, dit la Parfaite. Elle doit être préservée à tout prix car, le jour où Dieu le jugera bon, elle permettra à chaque homme de comprendre qu’il est l’unique responsable de son salut, sans que les prêtres s’en mêlent. L’Église deviendra obsolète.
    Elle se redressa et posa une main sur nos épaules.
    —    Cessez de vous torturer ainsi, mes amis, dit-elle avec ce sourire serein qui rendait tout ce qu’elle disait si évident. L’apitoiement est une fort mauvaise chose pour des hommes tels que vous. Trop de questions finiront par vous faire perdre l’esprit. Vous êtes faits pour l’action et non pour la réflexion.
    Elle désigna de la tête la cour centrale, en bas de la muraille.
    —    Allez dormir. Vous en avez bien besoin. Vous vous torturez et vous avez trop bu. Demain, joignez-vous aux troupes et exercez-vous. Retrouvez le plaisir de vivre. L’Ordre des Neuf et Montségur ont besoin de vous. Et peu importe l’ampleur de vos tourments, ayez confiance. Dieu vous guidera.
    Elle me toisa d’un regard pénétrant.
    —    Quant à toi, sire Gondemar, ne néglige pas tes amitiés. Dame Pernelle est peut-être tenue occupée par ses malades, mais elle pense beaucoup à toi. Ton silence l’inquiète.
    Elle inclina gravement la tête.
    —    Dieu vous bénisse et vous mène à bonne fin, mes frères.
    Un éclair de douleur dans ma cicatrice et un serrement dans
    ma gorge me rappelèrent que les prières, même bien intentionnées, ne faisaient que me ramener à ma condition de damné. Puis, Esclarmonde s’éloigna et la nuit l’enveloppa. Montbard et moi nous regardâmes et le vieux diable esquissa un sourire. Sans un mot, mais un peu plus sereins, nous restâmes sur la muraille et terminâmes la bouteille. Ayez confiance. Dieu vous guidera... J’espérais de tout mon cœur qu’Esclarmonde ait raison. J’en avais grand besoin, plus que quiconque.
    Nous nous engageâmes d’un pas fort mal assuré dans l’escalier, le cœur un peu plus léger qu’au début de la nuit. Nous n’avions descendu que quelques marches lorsqu’un objet froid fut plaqué contre ma gorge. Même ralenti par l’ivresse, je reconnus sans peine la lame d’un poignard. La pression qu’appliquait celui qui se tenait derrière moi me fit comprendre qu’il n’entendait pas à discuter. Pour éviter d’être égorgé sur-le-champ, je passai les doigts sous l’avant-bras de mon agresseur et le repoussai vers l’extérieur. Faute de parade plus élégante, j’y plantai les dents. Je les sentis percer la chair et l’autre hurla de douleur. Puis je donnai un coup de tête par l’arrière et mon crâne lui écrasa le nez. Profitant de l’étourdissement qui lui avait fait lâcher prise, je me retournai vivement, lui tordis le poignet jusqu’à en tirer un craquement, lui arrachai son arme et la jetai au sol. Quelques coups de poing suffirent ensuite pour l’assommer.
    Je me retournai vers Montbard, prêt à me porter à sa défense, mais constatai que le vieux diable n’avait nullement besoin de mon aide. Il avait dû projeter son
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