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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk
Autoren: Anne Perry
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désolé.
    Elle le regarda, la mine inexpressive, presque comme si elle
dormait. Puis elle passa la main sur sa lourde jupe de taffetas, peut-être en
souvenir du sang de la veille.
    — A-t-elle dit quelque chose ? questionna-t-il
doucement. Quoi que ce soit…
    — Non, Mr. Pitt. Elle était déjà à l’agonie quand elle
est arrivée ici.
    Il jeta un coup d’œil sur les portes-fenêtres.
    — Est-ce par là qu’elle est entrée ?
    C’était le seul moyen de ne pas tomber sur le valet ; néanmoins,
il jugea naturel de le demander.
    Elle frissonna imperceptiblement.
    — Oui.
    Il s’en approcha et regarda dehors. La pelouse était petite,
un simple carré bordé de lauriers, avec un chemin herbeux par-derrière. Un mur
séparait le jardin de celui d’à côté. Le temps de mener l’enquête, il
connaîtrait sûrement le moindre recoin de chacune de ces maisons… à moins qu’il
n’y eût quelque solution simple et pathétique, mais pour l’instant il n’en
voyait pas. Il se tourna vers Jessamyn.
    — Votre jardin communique-t-il avec ceux de vos voisins,
par une grille ou une porte dans ce mur ?
    Elle le considéra sans ciller.
    — Oui, mais je doute qu’elle soit passée par là. Elle
revenait de chez Lady Cumming-Gould.
    Il enverrait Forbes inspecter tous les jardins pour voir s’il
y avait des traces de sang. Une blessure pareille avait forcément laissé des taches.
Peut-être même y aurait-il des plantes cassées ou des empreintes de pas dans l’herbe
ou sur le gravier.
    — Et où habite Lady Cumming-Gould ?
    — Chez Lord et Lady Ashworth. C’est une tante, je crois ;
elle est venue les voir pendant la saison.
    Chez Lord et Lady Ashworth… ainsi donc, Fanny Nash s’était
rendue chez Emily le soir de son assassinat. Les souvenirs affluèrent, de
Charlotte et Emily telles qu’il les avait connues au début, en enquêtant sur l’étrangleur
de Cater Street. Tout le monde avait peur ; on se regardait d’un œil neuf
entre amis, voire entre membres d’une même famille. Des soupçons étaient nés, qui
autrement n’auraient jamais vu le jour. De vieilles relations avaient chancelé
et cédé sous leur poids. Et voilà que la violence, les secrets sordides et
scabreux étaient de retour, peut-être même à l’intérieur de cette maison. Les
cauchemars resurgissaient, les questions glaçantes que l’on redoutait même d’envisager,
et pourtant qu’on ne pouvait éluder.
    — Tous les jardins sont-ils ainsi reliés entre eux ?
s’enquit-il prudemment, chassant le brouillard et la terreur de Cater Street de
son esprit. Aurait-elle pu rentrer de cette façon-là ? La soirée avait été
agréable, une belle soirée d’été.
    Elle le regarda d’un air quelque peu surpris.
    — Ça m’étonnerait fort, Mr. Pitt. Elle portait une robe
de dîner, pas une paire de culottes ! Pour sortir et rentrer, elle est
passée par la rue. C’est là qu’elle a dû tomber sur un détraqué.
    Une idée absurde l’effleura : il faillit lui demander
combien de détraqués habitaient dans Paragon Walk, mais peut-être ignorait-elle
qu’il y avait des cochers se prélassant dans l’attente de leurs maîtres invités
à une réception à un bout de la rue, et un agent de police qui effectuait sa
ronde à l’autre.
    Il se dandina d’un pied sur l’autre et se redressa
légèrement.
    — Eh bien, il ne me reste plus qu’à aller voir Lady Cumming-Gould.
Merci, Mrs. Nash. J’espère que l’affaire sera rapidement éclaircie et que nous
ne vous importunerons pas longtemps.
    — Je l’espère aussi, acquiesça-t-elle d’un air compassé.
Bonne journée à vous.
     
    Chez les Ashworth, il fut introduit dans le grand salon par
un majordome en proie à un dilemme d’ordre protocolaire. Il avait affaire à
quelqu’un qui se réclamait de la police, quelqu’un d’indésirable donc, qui ne
devait pas oublier que sa présence était tolérée seulement, pénible nécessité
due au drame de la veille. Mais par ailleurs, incroyablement, il était aussi le
beau-frère de Lady Ashworth ! Voilà à quoi ça vous menait, une mésalliance !
Finalement, le majordome opta pour une courtoisie peinée et s’en fut chercher
Lord Ashworth. Pitt s’amusait trop de le voir ainsi au supplice pour songer à s’en
offusquer.
    La porte s’ouvrit, non pas sur George, mais sur Emily
elle-même. Elle possédait un charme fou, il l’avait oublié, mais en même temps
elle était foncièrement
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