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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie
Autoren: Colleen McCullough
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l’étranger fut scellé. Il mourut et les chevaux devinrent propriété personnelle du souverain de Troie. Ils engendrèrent une lignée si célèbre que des marchands venaient du monde entier acheter des juments et des hongres ; mon père était bien trop roué pour vendre un étalon.
    Un chemin défoncé, sinistre, traversait le haras en son milieu. Il était autrefois emprunté par des lions, qui laissaient derrière eux l’Asie Mineure pour le nord afin de passer l’été en Scythie, puis redescendaient vers le sud où ils passaient l’hiver en Carie et en Lycie. Là, le soleil avait assez de force pour réchauffer leur pelage fauve. Les chasseurs les avaient décimés et la piste des lions était devenue un sentier qu’on prenait pour aller chercher de l’eau.
    Il y a six ans, des paysans au visage blême accoururent. Jamais je n’oublierai la mine de mon père lorsqu’ils lui annoncèrent que trois de ses meilleures juments étaient mortes et qu’un étalon était gravement mutilé, victimes d’un lion. Laomédon n’était pas homme à s’abandonner à une colère irréfléchie. D’un ton mesuré, il ordonna à un détachement entier de la Garde royale de se poster sur la piste au printemps suivant et de tuer l’animal.
    Mais ce n’était pas un lion ordinaire ! Chaque printemps et chaque automne, il se glissait si subrepticement que nul ne le voyait et il tuait bien plus que nécessaire pour se remplir la panse. Il tuait par pur plaisir. Deux ans après son apparition, la Garde royale le surprit en train d’attaquer un étalon. Les soldats foncèrent sur lui en frappant bruyamment leurs boucliers avec leurs épées, dans l’intention de l’acculer pour le transpercer de leurs lances. Il n’en fut rien. Le lion se dressa, lança son rugissement de guerre, chargea droit sur les soldats et traversa leurs rangs, tel un rocher qui déboule sur une pente. Tandis que les hommes se dispersaient, l’animal en tua sept avant de poursuivre sa route, indemne.
    Ce désastre ne fut pas inutile. Un homme, lacéré par les griffes du lion, survécut et alla voir les prêtres. Il rapporta à Calchas que le lion portait l’emblème de Poséidon, un trident noir sur son flanc clair. Calchas consulta l’oracle : le lion appartenait à Poséidon. Malheur au Troyen qui le frapperait ! s’écria Calchas, car c’était un châtiment infligé à Troie par le seigneur des Mers. Le lion cesserait ses méfaits dès que l’on recommencerait à payer les cent talents d’or.
    Mon père ne tint tout d’abord aucun compte de l’oracle. À l’automne, il ordonna de nouveau que la Garde royale abattît l’animal. Mais il avait sous-estimé la peur que les dieux inspirent aux mortels : même lorsque le roi menaça d’exécuter ses gardes, ils refusèrent d’obtempérer. Furieux et mortifié, il informa Calchas qu’il refusait de donner l’or troyen à Ly rn essos la Dardanienne. Il fallait trouver une autre solution. Calchas retourna consulter l’oracle : il existait bel et bien une autre solution ! Si chaque printemps et chaque automne six jeunes vierges tirées au sort étaient enchaînées dans la pâture aux chevaux et abandonnées au lion, l’ire de Poséidon se calmerait – au moins pendant un temps.
    Bien sûr, le roi préféra accorder au dieu la vie de six vierges plutôt que se départir de son or, aussi s’exécuta-t-il. Ainsi, chaque printemps et chaque automne, on couvrait toutes les vierges âgées de quinze ans d’un linceul blanc pour qu’on ne les reconnût pas, on les alignait dans la cour de Poséidon Bâtisseur de Murailles et les prêtres en choisissaient six au hasard pour le sacrifice.
    Le stratagème réussit. Deux fois par an, le lion passait, tuait les jeunes filles enchaînées et épargnait les chevaux. Pour Laomédon, c’était une perte dérisoire, qui lui permettait de sauver l’honneur tout en amassant de l’argent.
     
    Il y a quatre jours, on a choisi les six jeunes vierges pour le sacrifice. Cinq d’entre elles venaient de la cité, la sixième de la citadelle – le grand palais. C’était l’enfant préférée de mon père, sa fille Hésione. Lorsque Calchas vint lui annoncer la nouvelle, il ne put le croire.
    — Tu veux dire que tu as été assez stupide pour ne pas faire de marque sur le linceul ? demanda-t-il. Que ma fille a été traitée comme les autres ?
    — C’est la volonté du dieu, répondit Calchas avec calme.
    — Ce n’est pas la
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