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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3
Autoren: Mireille Calmel
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plairez, Djem. Depuis une quinzaine d'années, sa draperie gagne en notoriété. Je ne serais pas surpris qu'elle s'exporte bientôt au-delà de nos frontières, ajouta Blanchefort tandis qu'au-devant d'eux, effrayée autant qu'intriguée par les cimeterres pendus aux ceintures des accanguis et par leur teint basané sous le turban, la foule s'écartait prudemment.
    Djem ne répondit pas. Son esprit caracolait au-delà de ce gué, vers elle, la damoiselle de Sassenage qu'il se plaisait à aimer chaque jour davantage.
    — Seriez-vous souffrant, mon ami ? Je vous trouve étonnamment silencieux depuis que nous avons quitté Rochechinard.
    Cette fois Djem se tourna vers le visage - soucieux sous sa barbe brune veinée discrètement de blanc - du grand prieur d'Auvergne. Il n'aimait pas avoir à lui mentir. Avait-il d'autre choix pourtant ?
     — Rien qui doive vous inquiéter, Guy. Voyez… dit-il en ouvrant sa main vers son avant-garde. L'idée de ce tournoi les réjouit tous, du plus proche de mes compagnons au plus servile de mes esclaves. Tous. Mais celui qui en eût tiré la plus démonstrative des excitations n'est plus à mes côtés.
    — Je vois. Pardonnez-moi de n'y avoir pas songé, s'excusa, contrit, le grand prieur.
    Un sourire gaillard illumina les traits de Djem :
    — Le cœur des Turcs est ainsi fait, mon ami, il n'oublie jamais. Accordez-moi la nostalgie de Houchang comme une ode à sa mémoire. Dans quelques heures, pris dans l'engouement de cette ville et des notables qui me viendront visiter, croyez-moi, je serai plus léger.
    — En ce cas, il ne faut plus tarder…
    Détachant son cheval de celui de son prisonnier, Guy de Blanchefort dépassa les accanguis et s'en fut glisser un mot à Philibert de Montoison lequel, avec ses hommes, tenait la tête du cortège.
     
    Bouillant de la même impatience que le prince ottoman, le chevalier de Montoison s'accorda aussitôt aux vœux du grand prieur. Abandonnant les siens, il piqua sa monture pour la mettre au trot, provoquant dans la foule un sursaut de terreur. Des imprécations fusèrent, quelques jurons aussi, isolés. Pour la plupart, impressionnés par l'ordre monastique, les voyageurs se contentèrent de s'effacer vitement afin de ne pas faire obstruction à l'un de ses représentants. Forçant la place, Philibert de Montoison atteignit le péage.
    Adossé à la tour-portière sous la protection d'une poignée de soldats aux couleurs de la ville, leur pique à la main, le percepteur de l'octroi était occupé à recompter la monnaie d'un petit homme joufflu et bedonnant, dont l'habit dénotait davantage la bourgeoisie que l'attitude la noblesse.
    — Le compte y est, cette fois ! accorda ce dernier, amenant des soupirs satisfaits derrière lui.
    Visiblement, il avait retardé le passage des suivants. Pendant qu'un autre prenait sa place pour acquitter ses droits, il se retourna pour héler ses porteurs, ne les trouva point, chercha des yeux, puis, les voyant qui se garaient sur le bas-côté au risque de passer par-dessus bord et de rejoindre l'Isère, il les apostropha avec morgue.
    — Holà ! maroufles ! ne vous avais-je pas demandé de piétiner ?
    — Et moi de s'écarter, le toisa Philibert de Montoison, les deux mains en appui sur le pommeau de sa selle.
    L'homme gonfla le torse, écarta les bras, coinça ses doigts de chaque côté de ses hanches dans sa ceinture, pour gagner en volume ce qu'il perdait en pouces, et leva le menton d'un air de défi.
    — Et de quel droit, messire ?
    On s'esclaffa sur le pont. Mais Philibert n'était pas d'humeur à rire.
    Déjà, les gardes s'approchaient pour y mettre bon ordre. L'incident risquait de dégénérer s'il ne le réglait lui-même, amenant une perte de temps quand il voulait en gagner.
    Il s'avança au pas jusqu'à ce personnage grotesque. Lorsque son cheval lui souffla des naseaux sur le chapeau, l'inconnu fit un bond de côté, sous le rire moqueur des badauds et de la maréchaussée qui, ce voyant, s'était immobilisée.
    — Sont-ce des manières de la part d'un clerc ? aboya l'homme, outré.
    — Un chevalier, rectifia Philibert, qui t'ordonne de passer chemin, vite, avant que mon destrier s'en prenne à tes braies.
    L'homme devint cramoisi. Battant des bras comme un moulin à vent sous un ciel de tempête, et sans bouger d'un pouce, il hoqueta :
    — Ne savez-vous donc pas qui je suis ?
    Cet individu avait besoin d'une leçon. Philibert de Montoison se dressa sur
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