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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3
Autoren: Mireille Calmel
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quelques-uns, enfant, du temps de sa défunte mère, Jeanne de Commiers. L'endroit qu'elle retrouvait après une si longue absence n'avait pas changé. Pas davantage cette maison qu'un ami de son père leur prêtait. Pourtant, la demeure lui avait semblé vide et triste lorsqu'elle s'était installée la veille au soir dans cette chambre qu'occupait autrefois sa mère.
    Son attention se porta soudain vers le parvis de l'église collégiale. La bure nouée d'une corde à sa taille bedonnante, un clerc gesticulait au sol, visiblement furieux qu'on ait barré le portail de planches et d'outils en attente d'être montés sur les échafaudages. Cassé en deux au-dessus d'une des rambardes de sécurité, cramoisi, le maître d'œuvre lui donnait une réplique que Philippine aurait apprécié d'entendre tant les passants et les ouvriers en avaient le sourire aux lèvres. S'il ne lui avait fallu écarter la table pour ouvrir la croisée et s'avancer sur le balcon, elle l'aurait fait sans hésiter. Tant pis.
    Elle détourna son regard, jaugea l'imposant espace qui s'ouvrait sur trois cents pieds de long et cent de large, qu'hôtels particuliers et maisons bourgeoises bordaient sur ses deux autres côtés. Bientôt, se rendant avec son escorte à la demeure qu'on lui avait attribuée, Djem traverserait la place de part en part. Il lèverait les yeux vers chacune de ces façades pour saluer ces bonnes gens de Romans qui l'acclameraient. Mais Philippine savait que ce serait elle et elle seule dans la foule qu'il chercherait. Elle ferma un instant les yeux, prise du vertige que le manque de lui provoquait. Cinq jours, cinq jours seulement qu'elle l'avait quitté, et elle en mourait. Elle l'aimait. Follement. Inconsidérément. Autant sans doute qu'il l'aimait.
    On toqua à la porte.
    Elle chassa l'image de leur dernier baiser dans la forêt, lorsqu'elle était venue lui apprendre qu'à Sassenage où elle devait se rendre, Algonde demanderait l'aide de la sorcière. Privé de l'élixir contenu dans le flacon pyramidal de verre bleu que Mounia lui avait volé, Djem se sentait vulnérable. Algonde était donc partie, quelques heures à peine après son mariage discret avec Mathieu, pour officiellement assister à celui de sa mère et de maître Janisse.
    Afin de ne plus penser à l'absent, Philippine s'était activée à sa garde-robe pour le tournoi, rejoignant en cela l'excitation de ses jeunes sœurs et de Sidonie qui, depuis le retour du baron Jacques, avait recouvré le sourire. Ce tourbillon joyeux l'avait emportée. À présent, le temps lui durait.
    On insista derrière le battant.
    — Entrez, se résigna Philippine, certaine de voir reparaître Bonnemine.
    À sa place s'avança un laquais sec comme un coup de trique, porteur d'un billet cacheté sur un petit plateau d'argent.
    Surprise, elle l'ouvrit sans attendre. L'écriture était fine, aérée. Élégante. Féminine, jugea Philippine avant de le parcourir.
    Votre voisine depuis hier, je fais antichambre ce matin devant votre porte. Il me faut vous parler de toute urgence.
    La signature, Marie de Dreux , ne lui évoqua rien.
    Le laquais demeurait immobile dans sa livrée.
    — La dame qui vous a remis ce billet, où se tient-elle ?
    — Au bas de l'escalier, où dame Sidonie l'a autorisée à patienter, répondit l'homme, stylé.
    Philippine se mordit la lèvre. Pouvait-elle s'accorder le temps de la recevoir ? Dans cette tenue négligée ? Elle fouilla de nouveau ses souvenirs. Non, décidément, le nom de Marie de Dreux n'en éveillait aucun. De toute urgence, relut-elle. Avant l'arrivée de Djem? Elle en trembla. Cette femme savait-elle quelque chose ? Sur eux ? Sur un éventuel complot contre lui ? Il lui fallait savoir. Sans attendre en effet.
    — Faites-la monter, décida-t-elle en repoussant la table.
     
    Blonde, des yeux d'un bleu translucide dans un teint parfait d'albâtre, Marie de Dreux possédait cette grâce angélique des statues d'église qui évoqua à Philippine une image familière, sans qu'elle pût se remémorer l'endroit où elles s'étaient de toute évidence rencontrées.
    — Pardon de vous déranger en cette heure matinale, damoiselle Philippine, mais vous sachant ma voisine, je ne pouvais manquer de venir vous entretenir en privé.
    — Prenez un siège, l'invita courtoisement Philippine, se donnant ainsi quelques secondes supplémentaires de réflexion avant que de la froisser.
    Marie choisit le tabouret recouvert de coutil
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