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Le Brasier de Justice

Le Brasier de Justice

Titel: Le Brasier de Justice
Autoren: Andrea H. Japp
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ordonner mes déclarations, si je souhaite vous convaincre. Tout d’abord, je vais me permettre un aveu dont je vous demande qu’il demeure entre nous.
    — Ma parole, seigneur bailli.
    Arnaud de Tisans tournait une rissole de viande entre ses doigts, la fixant, semblant se demander s’il la savourerait. Il la reposa dans le plat avant de déclarer :
    — Selon moi, Guy de Trais, qui est de plaisant commerce, ne se pardonne pas sa… légèreté dans cette affaire. Sans doute accaparé par d’autres urgences, il a laissé la bride sur le col à son premier lieutenant, qui a rondement conclu l’enquête, en se fourvoyant. Sous la torture, le trucheur a avoué ses infâmes viols et meurtres sanguinaires et a été pendu.
    — Quels indices les avaient conduits jusqu’à cet homme ?
    — Une commère qui ouvrait ses volets à l’aube. Elle a reconnu le trucheur, Bastien Mollard donc, qui l’avait insultée au porche d’une église parce qu’elle lui refusait la piécette. Il était agenouillé à côté de ce qui ressemblait à un paquet de vêtements. Levant le visage, l’homme l’a découverte à sa fenêtre et a pris la fuite. C’est alors qu’elle a remarqué qu’un petit pied nu dépassait du tas abandonné dans la ruelle. Son mari est descendu et a découvert l’enfant mutilé d’atroce manière.
    — Qu’a répondu le mendiant pour sa défense ?
    — Qu’il passait dans la ruelle. De loin, dans l’aube naissante, il a lui aussi songé qu’on avait abandonné des nippes 27 . Belle aubaine pour lui. En s’approchant, il a compris qu’il s’agissait d’un enfant mort. Inutile de vous préciser que son ivrognerie, sa trucherie et les menus larcins dont on l’accusait n’ont pas aidé sa cause.
    — Selon vous, ce Bastien Mollard n’était pas coupable ?
    — Certes pas. Mon premier argument naît de ma connaissance des meurtriers dégénérés, ceux qui assassinent par plaisir, en général de faibles créatures, expliqua le sous-bailli. Rien à voir avec un mendiant cuit dans le vin et hébété la majeure partie du temps. Celui-ci aurait tué par panique, ivrognerie, voire pour détrousser sa victime, et aurait pris l’escampe aussi vite que possible. En revanche, les meurtriers dégénérés auxquels je faisais allusion ne sont pas des fols privés de sens. D’aucuns sont très madrés et intelligents. Selon moi, ce tueur d’enfants en fait partie. En effet, il s’attaque à de petits laissés-pour-compte dont il n’ignore pas que personne ne leur prête attention. Des proies faciles, suggérant un jugement pertinent de sa part. Et il aurait eu la bêtise de ramener la dépouille sanglante de sa victime à l’aube, dans une rue commerçante où les marchands s’affairent au tôt matin ? Je n’y crois guère. Il l’a déposée au plein de la nuit, lorsque tous étaient claquemurés derrière leurs volets clos.
    — Convaincant raisonnement. Pourtant, je sens que vos doutes se nourrissent d’autre chose, observa Hardouin.
    — Le mendiant était arrivé à Nogent-le-Rotrou deux mois auparavant. Or les meurtres ont commencé deux ans plus tôt.
    — Et le premier lieutenant du bailli de Nogent-le-Rotrou ne s’en est pas étonné ?
    — Non pas. Inutile de vous préciser que la tension est vive dans certains quartiers de la ville. On reproche vertement leur inaction et leur incompétence aux gens de Guy de Trais. Sans doute ledit lieutenant a-t-il pensé qu’un coupable, n’importe lequel, atténuerait les protestations et ramènerait un peu de calme. Un fort mauvais calcul, comme vous l’allez voir. Le trucheur fut donc torturé et pendu. Un mois plus tard, une fillette était retrouvée en limite de bourgade. Martyrisée de même affreuse manière.
    — Diantre !
    — Le mécontentement de la populace enfle de dangereuse façon. Des gens d’armes au service de Guy de Trais se sont fait insulter par des femmes. La rumeur court que les habitants prépareraient ou auraient déjà envoyé une missive à messire Jean II de Bretagne* 28 , soulignant l’incurie de Guy de Trais et de ses hommes, notamment de son premier lieutenant.
    — Je doute que messire de Bretagne s’intéresse aux affaires criminelles qui secouent l’une de ses lointaines seigneuries, remarqua Hardouin.
    — Il est fort occupé ailleurs, concéda le bailli.
    Hardouin cadet-Venelle commenta d’un plat et peu compromettant :
    — À l’évidence. Quand fut pendu ce
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