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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas
Autoren: Hervé Gagnon
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Foix, le vieux comte honorable et tenace qui m’avait accueilli parmi les siens à Toulouse, a quitté ce monde les armes à la main, comme il le souhaitait, en l’an 1223, après avoir reconquis presque toutes les terres que Montfort lui avait volées. Dès lors, Roger Bernard est devenu comte en titre et a fait honneur à sa lignée.
    Amaury de Montfort a succédé à son père et s’est avéré aussi incapable que son frère, le méprisable Guy. Roger Bernard lui a tanné les fesses à répétition et les possessions de la famille Montfort dans le Sud ont fondu comme neige au soleil. Il a fini par remettre ce qu’il en restait à la couronne de France plutôt que de le perdre. Le roi Louis VIII s’est empressé de venir en prendre possession en 1226 avec une armée bien supérieure à celle de Montfort dont l’arrivée annoncée a semé la terreur dans la population. Providentiellement, la dysenterie l’a fauché en route, emportant des milliers de ses soldats. Sa veuve, Blanche de Castille, a pris le relais et s’est révélée la plus cruelle de tous les chefs croisés. Elle a fait empoisonner les puits et brûler tout ce qui entourait Toulouse. Les récoltes, les vergers, les oliveraies, les villages, tout y est passé. Les troupes françaises n’ont rien laissé qui n’était pas cendres ou ruines. La ville a crevé de faim pendant deux ans avant de se rendre.
    Comme c’est toujours le cas, les charognards ont envahi le champ de bataille dès qu’il a été abandonné. Les inquisiteurs ont surgi dans le Sud comme une épidémie, allant de village en village, brandissant la croix et exigeant une profession de foi de tous les habitants. Les cathares qui s’entêtaient étaient torturés à mort. Ceux qui avouaient étaient mis au bûcher. Les chrétiens qui refusaient de les dénoncer aussi. Les fous de Dieu, encore plus féroces et violents que les soldats, allaient jusqu’à faire exhumer les dépouilles de cathares pour les brûler en public. Une fois encore, l’odeur de la chair rôtie a empuanti l’air du Sud. Pendant dix longues années, la terreur a régné, les frères dénonçant les sœurs, les fils donnant leurs mères en pâture pour sauver leur propre vie, les voisins se trahissant l’un l’autre. Les seigneurs cathares qui restaient encore ont bien tenté de se révolter et, pendant quelques années, l’espoir a été permis. Des inquisiteurs étaient massacrés, des villes se soulevaient. Mais l’échec était inévitable.
    En l’an 1244, le glas a sonné lorsque Montségur est tombée. Les deux cents Parfaits qui s’y étaient retranchés sont montés volontairement sur le bûcher que leur réservait Hugues d’Arcis, qui menait les troupes françaises. Ainsi les choses se sont-elles terminées exactement comme elles avaient commencé. Les cathares qui restent toujours vivent dans la terreur et la clandestinité, préservant leur religion de leur mieux.
    J’ai dû assister à toutes ces atrocités sans pouvoir intervenir. Ma tâche, mon terrible fardeau, primait sur la vie de tous ces innocents. La Vérité est en sécurité dans le temple et je me demande sans cesse si elle valait tout cela ; si les mots de Yehohanan, que presque personne ne connaît, justifiaient que je perde l’amour et que j’envoie tant d’amis à l’abattoir. Mais Dieu l’a voulu ainsi. Il devait avoir ses raisons. J’ai payé cher mon salut. Trop cher. Au fil du temps, j’en suis venu à détester la Vérité. Il y a plus de trente ans que je n’ai pas remis les pieds dans le temple où reposent le manuscrit et la tête du Baptiste. Ils demeureront là jusqu’au jour de la révélation, comme Dieu l’a voulu. D’ici là, l’Église triomphera. Comme tous les royaumes trop puissants pour leur propre bien, elle finira sans doute par s’effondrer d’elle-même. Ce jour-là, Yehohanan parlera.
    Tout n’est pas fini pour autant et je dois continuer à veiller. Lorsque le doute me prend, il me suffit de toucher la marque sur mon épaule et la cicatrice autour de mon cou pour me rappeler que Métatron veille toujours. Tôt ou tard, le Sud sera rattaché au royaume de France, fille aînée de l’Église. Son roi, le très pieux Louis IX, guerroie allègrement en Terre sainte au nom de la foi chrétienne. S’il fallait qu’il apprenne l’existence de la Vérité, il mettrait le Sud à feu et à sang pour la trouver. Quant à eux, les Templiers sont de plus en plus puissants. Leur richesse
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