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L'archer démoniaque

L'archer démoniaque

Titel: L'archer démoniaque
Autoren: Paul C. Doherty
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d’oeil jeté sur saint Christophe juste après l’aube vous évitait une mort violente ce jour-là. Et il aurait besoin de toute l’aide et de toute la protection que ce saint pouvait lui apporter. Lord Henry, selon les commérages, avait organisé une grande chasse près de Savernake Dell. Il avait fait clôturer un espace pour que ses hôtes français, les lords et les clercs venus d’au-delà de la Manche et de la mer d’Irlande, puissent abattre les cerfs que ses forestiers et ses verdiers y auraient acculés. Le Hibou était fermement décidé à y assister. Il voulait créer un tel trouble, de tels dégâts que Lord Henry et ses invités n’oublieraient jamais cette partie de chasse.
    Il saisit son arc et s’éloigna en hâte. Il devait être près de l’abri de chasse de Beauclerc afin de voir partir Lord Henry et ses hôtes. Il se déplaçait sans bruit, examinant sans cesse les arbres et le sol devant lui. Il était à présent un pion dans un jeu mortel. Les gardes forestiers et les verdiers de Lord Henry, tous rusés fripons s’il en fut, auraient beaucoup aimé le capturer et le traîner comme un trophée devant leur maître. Ou, pis encore, s’ils avaient réussi à le prendre, suivre la loi de la forêt : jeter une corde sur une branche et passer l’autre bout autour de son cou. Ces bâtards se seraient alors accroupis pour le regarder étouffer jusqu’à ce que mort s’ensuive. Mais le Hibou était intelligent. Plus souple et rapide que Goupil, il connaissait tous leurs artifices, tous leurs pièges, alors qu’eux ne devineraient jamais qui il était en réalité.
    Il fit une pause à l’orée d’une trouée et scruta le terrain avec attention. Il avait plu la veille, dans l’après-midi, mais le chaud soleil d’automne avait tout séché. Il chercha quelque chose d’anormal, un indice prouvant qu’on avait creusé un trou, tendu une corde ou dissimulé avec soin sous un lit de feuilles rouge-brun un de ces grands pièges d’acier aux dents tranchantes comme des rasoirs.
    Alors qu’il s’apprêtait à traverser, il entendit un bruit sur sa gauche. Il sortit en hâte une flèche de son carquois, la plaça sur son arc, mais se détendit. Un renard, triomphant après sa chasse matinale, déboucha de sous les arbres, fier comme le champion d’un tournoi, un lapin mort entre ses crocs. Avec la superbe d’un prince, il trotta dans la clairière et disparut sous les buissons d’en face. Le Hibou soupira de soulagement : si le renard n’avait point perçu de danger, pourquoi lui s’inquiéterait-il ?
    Il s’avança, silencieux comme une ombre, et atteignit l’abri bienvenu des frondaisons. Le terrain s’inclinait en débouchant sur un chemin. Le Hibou s’arrêta. C’était un endroit fréquenté par les forestiers, les voyageurs et les pèlerins se rendant au prieuré de St Hawisia. Les marchands, qui passaient la nuit au Diable dans les Bois, une spacieuse hostellerie deux ou trois miles plus bas sur la route, empruntaient eux aussi ce sentier. Le Hibou tendit l’oreille. Pas un bruit ; rien ni personne. La brume du petit matin se levait à présent. Les oiseaux chantaient dans les arbres d’en face. Il n’entendait ni pépiements d’effroi ni cris d’alarme lancés par ces hérauts des bois qui manifestaient toujours à grand tapage quand on empiétait sur leur domaine. Il considérait ces petites créatures comme ses éclaireurs. Après tout, il avait été bien dressé : il avait grandi dans la forêt et savait identifier chaque cri d’oiseau, chaque son. Il pouvait faire la différence entre ce qui était normal et ce qui représentait une menace, entre ce qui était ancien et ce qui était récent. Satisfait, discret comme le renard qu’il venait d’apercevoir, le Hibou descendit à pas de loup le talus vers la sente. Dans les branches, les oiseaux jetèrent des cris, mais c’était normal. Une fois qu’il fut passé, ils reprirent leurs chants matinaux, leurs matines habituelles. Il fit une pause. Il aimait cette expression. Les créatures de Dieu entonnaient l’office divin tout aussi bien que ces nonnes hautaines dans leur prieuré au décor somptueux. Il leur rendrait peut-être visite, un jour, pour créer quelque désagrément à la demi-soeur de Lord Henry.
    Il repartit d’un bon pas. Il ne sut jamais vraiment ce qui s’était passé. C’était peut-être la façon qu’avait Dieu de montrer que l’orgueil précédait la chute, qu’il était
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