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Labyrinthe

Labyrinthe

Titel: Labyrinthe
Autoren: Kate Mosse
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diable, ni même aux créatures maléfiques réputées hanter ces montagnes. Pourtant, pour la première fois de sa vie, le sentiment la submerge d'être confrontée à un phénomène surnaturel, quelque chose dépassant ses connaissances et sa compréhension. Un esprit malveillant qui ramperait sur sa peau et gagnerait tout son être, depuis la plante des pieds jusqu'à la racine des cheveux.
    Son courage chancelle. Un froid pénétrant a brusquement envahi la grotte. La peur lui étreint la gorge. L'air qu'elle respire lui glace les poumons. Elle vacille. Sa présence profane ce lieu très ancien. À présent, elle n'aspire plus qu'à fuir, échapper à cette odeur de mort et de violence. Se retrouver à l'air libre, en pleine lumière.
    Il est trop tard.
    Au-dessus, au-dessous d'elle, retentissent des bruits de pas. Des pierres qui roulent frappent la paroi rocheuse en coups sourds et effrayants. On vient.
    Alice pivote précipitamment sur ses talons, et dans sa hâte, lâche le briquet. La voilà plongée dans les ténèbres. Elle veut fuir, un vertige la saisit, et chaque pas la ramène à son point de départ. Ses jambes refusent de la porter. Elle trébuche.
    Elle tombe. Et l'anneau qu'elle serrait dans sa main retourne au squelette auquel il appartenait.

    II
    Los Seres
    À quelques kilomètres à l'est, à un vol de corbeau, dans un village oublié des monts Sabarthès, un homme grand et mince est assis à une table de bois verni.
    La pièce où il se tient est basse de plafond, et de grandes dalles couleur de la terre rouge des montagnes contribuent à lui garder sa fraîcheur malgré la chaleur qui sévit à l'extérieur. Il y fait sombre, car le volet de l'unique fenêtre est clos. Seule source de lumière, le halo jaune d'une petite lampe à huile posée sur la table, près d'un verre rempli presque à ras bord d'un breuvage couleur lie-de-vin.
    Plusieurs feuilles de papier de lin jonchent la table, toutes noircies d'un texte manuscrit. Dans le silence de la pièce, l'on n'entend que le raclement de la plume et le tintement clair des glaçons contre le verre chaque fois que l'homme le porte à ses lèvres. Subtile odeur d'alcool et de cerise. Le tic-tac de la pendule ponctue le passage du temps, tandis que l'homme marque une pause, réfléchit puis reprend sa rédaction.
     
    Nous ne laissons en ce monde que le souvenir de ce que nous fûmes et de ce que nous y avons accompli. Une empreinte, rien de plus. J'ai beaucoup appris. J'ai gagné en sagesse. Mais ai-je pour autant bien agi ? Je ne saurais le dire. Pas a pas, se va luènh 1 .
    J'ai regardé le vert printemps céder la place à l'or de l'été, les flamboiements de l'automne aux blancheurs de l'hiver, quand je restais assis, attendant le crépuscule. Jour après jour, je me suis demandé : pourquoi ? Si j'avais su ce que serait de vivre pareil isolement, que d'être le témoin esseulé du cycle éternel de la vie et de la mort, qu'aurais-je fait de plus ? Je suis écrasé de solitude, Alaïs, trop affaibli aussi pour l'endurer plus longtemps. J'ai traversé cette longue vie avec le vide en mon cœur. Un vide, au fil des ans, devenu plus grand que mon cœur lui-même.
    Je me suis efforcé de tenir les promesses que je t'ai faites. L'une est tenue, l'autre non exaucée. Jusqu'à ce jour. Depuis quelque temps, je te sens près de moi. Ce temps qui était nôtre va bientôt revenir. Tout l'indique. Bientôt, la grotte sera rouverte. Je le sais. Cette réalité me cerne de tous côtés. Et le livre si longtemps préservé sera, lui aussi, retrouvé.
     
    L'homme fait une nouvelle pause et prend son verre. Ses yeux sont brouillés de souvenirs, mais le guignolet fort et sucré le revigore.
     
    Je l'ai trouvée. Finalement. Et je me dis à présent : si tu lui donnes le livre, lui semblera-t-il familier ? Son souvenir est-il gravé dans sa chair et dans ses os ? Se rappellera-t-elle sa couverture aux couleurs chatoyantes ? Et si, une fois défaits les nœuds qui le tiennent refermé, elle l'ouvre doucement pour n'en pas altérer le fragile vélin, se souviendra-t-elle des mots qui, depuis des siècles, résonnent comme un écho ?
    Alors que ma vie arrive à son terme, je prie pour avoir l'heur de réparer mes torts, de connaître enfin la vérité. Car seule la vérité me libérera.
     
    L'homme s'adosse à son siège, et pose à plat sur la table sa main criblée de fleurs de sépulcre. Il a la chance, enfin, de savoir après si longtemps ce
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