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Labyrinthe

Labyrinthe

Titel: Labyrinthe
Autoren: Kate Mosse
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éclipsait une part de sa personnalité.
    Alaïs soupira : restait à espérer qu'avec le temps les choses s'arrangeraient.
    Un imperceptible changement dans l'air, l'obscurité profonde qui virait lentement au gris, le chant bref d'un oiseau à proximité lui apprirent que l'aube approchait, et que le sommeil la fuirait pour le reste de la nuit.
    Écartant les tentures, elle se dirigea à pas comptés vers le coffre qui trônait au bout de la chambre. Sous ses pieds nus, le sol était froid, et râpeuse la natte qui le recouvrait. Soulevant le lourd couvercle, elle sortit, parmi les senteurs de lavande, une robe verte et unie. Frissonnant, elle glissa ses bras dans les manches étroites puis, passé le vêtement par-dessus son jupon, resserra pudiquement le lacet de son bustier.
    Alaïs avait dix-sept ans et, bien que mariée depuis six mois, n'avait acquis que peu de douceur et de féminité. Sa robe, pendant sans forme sur sa silhouette gracile, ne semblait pas lui appartenir. Prenant appui contre la table, elle enfila ses chaussons de cuir, puis récupéra la cape rouge, sa préférée, abandonnée la veille sur une chaise à haut dossier. C'était un vêtement finement ouvragé, dont les bords et l'ourlet s'ornaient de motifs bleus et verts, entremêlés en une alternance de losanges et de carrés. Au centre des motifs, de petites fleurs jaunes qu'elle avait elle-même brodées à l'occasion de ses épousailles.
    Alaïs se tourna vers son panièr , posé par terre, près du coffre. Elle s'assura que sa bourse et son sac d'herbes s'y trouvaient, de même que ses outils de jardinage et les bandelettes d'étoffe dans lesquelles elle serrait les plantes qu'elle cueillait. Revêtant sa cape, elle en noua les rubans, couvrit de son capuchon sa longue chevelure emmêlée et récupéra sur la table le couteau de chasse qui ne la quittait jamais. Ses préparatifs achevés, elle se glissa dans le couloir désert, laissant la lourde porte se refermer derrière elle avec un bruit étouffé.
     
    L'heure de prime 1 n'avait pas encore sonné, aussi ne voyait-on âme qui vive dans les appartements. Alaïs traversa furtivement les couloirs, dans le bruissement de sa longue cape effleurant le sol. Après avoir prudemment enjambé le valet endormi devant la chambre qu'Oriane, sa sœur, partageait avec son époux, elle descendit à pas pressés l'escalier désert.
    Des éclats de voix montaient des cuisines. Le domestique était à l'œuvre depuis déjà longtemps. Un claquement sec suivi d'un petit cri lui apprit que le maître queux venait de corriger un marmiton maladroit.
    Un valet vint au-devant d'elle, titubant sous un baril d'eau qu'il venait de tirer du puits.
    «  Bonjorn , lui sourit-elle.
    — Bonjorn , dame », répondit-il timidement. Puis, comme elle lui ouvrait la porte pour lui livrer passage : «  Mercé, dame, grand mercé.  »
    Dans les cuisines régnait une grande effervescence. De la payrola – ou chaudron – pendue à la crémaillère de la cheminée montaient des panaches de fumée. Un servant s'approcha du porteur d'eau, s'empara du tonneau, et l'alla vider dans le chaudron, avant de le lui restituer sans un mot. Le garçon s'en retourna au puits en roulant à l'adresse d'Alaïs de grands yeux effarés.
    Sur la longue table dressée au centre de la salle, chapons, carottes et choux s'entassaient dans des jarres de terre cuite en attendant d'être accommodés, de même que carpes, anguilles et brochets. À une extrémité s'alignaient des sacs de jute contenant des fogaças , fougasses du pays, des pâtés d'oie et des travers de porc salé, à l'autre, des paniers débordant de prunes, de coings, de figues et de raisin. Un enfant de dix ans était accoudé à la table, son visage morose attestant de son peu d'enthousiasme à manœuvrer le tournebroche toute la journée. D'un four à pain bâti près de l'âtre s'élevait le crépitement des brindilles que l'on faisait brûler pour cuire le pan de blat , pain de blé, dont la première fournée refroidissait sur la table. Son odeur mit Alaïs en appétit.
    « Puis-je en avoir un ? »
    Le maître queux commença par lui décocher un regard venimeux qui exprimait sa réprobation face à l'intrusion d'une femme dans ses cuisines. Puis il la reconnut, et son visage d'ordinaire bougon se fendit sur une double rangée de dents gâtées.
    « Dame Alaïs, se radoucit-il en s'essuyant les mains sur son tablier. Benvenguda . Soyez la bienvenue. Quel
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